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L’enquête

Adrexo : Une formation dédiée pour mettre le pied des décrocheurs à l’étrier

L’enquête | publié le : 25.09.2017 | Lou-Eve Popper

En juin, l’entreprise a lancé “First Job”, un dispositif destiné à recruter, d’ici 2018, plus de 300 jeunes des quartiers en échec scolaire et professionnel. Relayée par l’Afpa in situ, l’opération s’avère plus difficile que prévue, faute de candidats… ou d’assiduité !

Ardu de recruter dans les cités ! Adrexo, spécialiste de la distribution d’imprimés publicitaires, en sait quelque chose. En juin, le groupe français (20 000 salariés), racheté fin 2016 par Colis Privé, a lancé avec l’Afpa le dispositif “First Job”. Soit la possibilité pour les jeunes de moins de 26 ans issus des quartiers sensibles, et en très grande difficulté de bénéficier d’une formation en alternance pour obtenir une première certification professionnelle via une POE (préparation opérationnelle à l’emploi) ou mieux, un titre professionnel de chauffeur-livreur via un contrat de professionnalisation. Deux parcours avec, à la clé, un CDI à temps partiel comme distributeur d’imprimés publicitaires ou livreurs de colis. L’objectif ? Combler les pénuries d’emplois et limiter le turn-over, véritable fléau chez Adrexo. « Beaucoup de gens démissionnent au bout de quelques semaines pour trouver un temps complet ailleurs. Avec cette opération, l’entreprise espère garder les jeunes, au moins le temps de leur formation », explique Pascale Gérard, directrice de l’insertion sociale à l’Afpa. L’idée du dispositif est aussi de permettre aux jeunes des cités de sortir de la précarité. « Adrexo est une entreprise citoyenne. Nous voulons aller au-devant de personnes qui n’ont pas l’habitude de voir des dirigeants », explique le président Hervé Estampes.

Un Manque d’information

En lançant “First Job”, ce dernier était certain de voir ses DRH crouler sous les candidatures. Raté. Après quelques mois seulement, l’opération, inaugurée à Marseille, puis à Thionville, Strasbourg, Toulouse et Metz, patine sérieusement. « Depuis juin, nous avons recruté à peine une vingtaine de jeunes sur nos cinq sites pilotes. C’est une très mauvaise nouvelle. Car l’objectif est d’en trouver 150 d’ici la fin de l’année ! », déplore-t-il. Pour Hervé Estampes, cette désaffection tient en partie au manque de volonté des jeunes. « J’ai l’impression que c’est compliqué pour eux de s’engager dans un projet. Sans compter qu’il n’est pas très valorisé, au sein de la cité, d’aller distribuer des prospectus ou de livrer des colis », estime-t-il. Pourtant, convient-il, le problème vient plutôt du manque d’information. Car les jeunes des zones sensibles sont très peu inscrits à Pôle emploi. Un constat qui expliquerait pourquoi, sur les 1 000 SMS envoyés par l’antenne de Toulouse, seuls six ont reçu une réponse. « Ce sont des invisibles qui ne sont pas connus des institutions publiques. Pour les recruter, il faut aller les chercher chez eux ou dans les endroits qu’ils fréquentent », constate Lionel Wawrzyniak, directeur du développement RH du groupe Hopps (regroupant désormais Adrexo et Colis Privé).

Pour déployer son projet, l’entreprise a donc décidé de s’appuyer sur les antennes atypiques de l’Afpa : des centres situés au cœur des cités, en bas des tours. Avec ce dispositif “hors les murs”, les formateurs de l’Association ont l’habitude de travailler main dans la main avec les gardiens d’immeubles, qui connaissent bien les jeunes en déshérence. C’est donc dans ces locaux qu’Adrexo a décidé d’aller pour communiquer sur le dispositif “First Job”. « On a fait du micro-sourcing », explique Hervé Estampes. Ce circuit court est, d’après lui, la clé pour recruter les jeunes des quartiers, réputés très volatils dans leurs décisions : « Si on repère un jeune le jeudi, il faut que la formation démarre trois jours plus tard au maximum. Sinon, ils disparaissent dans la nature. »

Accompagnement “resserré”

Une fois recrutés, l’entreprise doit encore batailler pour que ces jeunes en difficulté suivent leur formation jusqu’au bout. Or, pour la majorité d’entre eux, ce n’est pas chose simple. « Beaucoup ont quitté l’école en troisième. Résultat, ils n’ont pas forcément les bases en français et en mathématiques, souligne le DRH. Sans compter qu’il faut se plier à un rythme de travail, se lever tôt le matin, apprendre à respecter des consignes, des choses qu’ils n’ont pas faites depuis longtemps. » Pour éviter les désertions, Adrexo a donc mis en place un accompagnement très resserré. Après un entretien d’embauche et une période d’essai de deux jours, chaque recrue est suivie par un tuteur personnel ou “passeur de savoirs”. Des salariés plus expérimentés, formés au préalable par Adrexo et l’Afpa, et dont la mission consiste à épauler leurs apprentis et leur apprendre les ficelles du métier.

Pour certains, l’intégration se passe très bien. Surtout les diplômés, malheureusement sous-représentés. « Ce sont souvent des jeunes issus de l’immigration. À cause de la discrimination, ils n’arrivent pas à trouver de travail, malgré leur bac + 2 », explique Lionel Wawrzyniak. “First Job” représente donc pour eux une opportunité, qu’ils comptent bien ne pas laisser passer. « Ce sont les plus assidus. Car ils ont compris qu’il y avait chez nous de réelles possibilités d’évolution. » La preuve, deux d’entre eux ont déjà été repérés par leur manager pour être promus coordinateurs techniques. Pas mal, pour un premier emploi.

Repères

Activité

Diffusion d’imprimés publicitaires physiques et numériques, diversifié dans la livraison de colis et de courrier.

Effectif

20 000 salariés.

Chiffres d’affaires 2016

290 millions d’euros.

Auteur

  • Lou-Eve Popper