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Du côté de la recherche

Tendance | publié le : 29.08.2017 | Denis Monneuse

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Du côté de la recherche

Crédit photo Denis Monneuse

Alors, heureuse ?

Un dirigeant se plaignait récemment auprès de moi de la difficulté à briser le plafond de verre. Il prenait l’exemple d’une femme identifiée « à haut potentiel » à qui l’on avait proposé un nouveau poste à responsabilité ainsi qu’un changement de statut. En passant dans le cercle très fermé des cadres dirigeants, elle faisait un bond en matière de rémunération mais connaissait aussi un recul du nombre de ses jours de vacances : elle n’avait alors plus droit qu’à cinq journées de RTT. Elle répondit alors qu’elle avait besoin de réfléchir avant d’accepter cette promotion car elle tenait à sa vie de famille et réduire ses RTT lui paraissait un lourd sacrifice à accepter. « Elles veulent le beurre et l’argent du beurre ! », soupira mon interlocuteur.

Pour mieux comprendre la gent féminine, et en particulier les femmes managers, ce dirigeant devrait lire un article récemment publié dans la revue Journal of Happiness Studies. Hilke Brockmann, Anne-Maren Koch, Adele Diederich et Christofer Edling, chercheurs à l’Institut universitaire européen, l’université de Brême et l’université de Lund, y présentent leur analyse d’une gigantesque étude menée en Allemagne entre 1984 et 2011 auprès de plus de 3 000 managers, dont un tiers de femmes. Les résultats confirment des enquêtes précédentes en montrant que les femmes managers ont tendance à être moins heureuses dans la vie que les hommes managers. Devenir manager aboutit à un surcroît de bonheur chez les hommes tandis que cet effet est généralement faible chez les femmes.

Pourquoi ? Hilke Brockmann et ses collègues ont testé plusieurs explications. Passer manager peut amener des femmes à renoncer à la maternité ou bien repousser l’âge d’avoir des enfants. Les femmes managers entre 35 et 45 ans qui n’ont pas d’enfant se montrent moins satisfaites de leur vie que celles du même âge qui ont des enfants, et que les hommes managers qui n’ont pas non plus d’enfant. Par ailleurs, les femmes managers se montrent globalement moins sensibles que leurs homologues masculins aux compensations financières reçues pour occuper un travail très prenant. Les auteurs de cet article montrent que les femmes managers ont besoin de recevoir une plus grosse augmentation que les hommes pour ressentir une hausse de leur satisfaction équivalente à celle de ces messieurs.

En revanche, les femmes managers valorisent plus le temps libre que les hommes. Elles sont moins prêtes à échanger du temps libre contre une plus forte rémunération. Si les femmes managers sont moins heureuses que les hommes managers, ce n’est donc pas parce que ce métier leur déplaît, au contraire, mais à cause du temps de travail qui va avec.

Le cas cité en introduction, de la femme qui hésite à passer cadre dirigeante du fait de la baisse de RTT imposée, est donc représentatif et non pas simplement anecdotique. En l’espèce, le cas fut réglé simplement : le dirigeant lui dit que si elle faisait bien son travail, personne n’irait regarder si elle ne prenait pas quelques jours de vacances en plus en « oubliant » de poser officiellement des jours de RTT. Plus globalement, on pourrait se demander si les entreprises ne devraient pas revoir la rétribution accordée aux cadres supérieurs pour attirer plus de femmes à ce niveau. Pourquoi ne pas offrir des jours de RTT supplémentaires en guise de bonus et une décharge de certaines tâches à la place d’une augmentation ?

Auteur

  • Denis Monneuse