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Sur le terrain

Retour sur… Le mentorat féminin à la Toulouse Business School

Sur le terrain | publié le : 18.07.2017 | Catherine Sanson-Stern

PENDANT 14 MOIS, Toulouse Business School a fait appel à une soixantaine de femmes cadres pour accompagner 84 étudiantes en dernière année de master. Un programme de mentorat qui fait partie d’Equal.Id, un projet plus large de lutte contre l’autocensure chez les étudiantes.

Fin mai, Toulouse Business School a réuni les « mentores », c’est-à-dire les femmes cadres qui ont accepté de suivre une jeune étudiante durant sa scolarité, pour leur présenter les résultats de l’enquête menée auprès des étudiantes accompagnées (dénommées par l’anglicisme « mentees ») et faire un premier bilan. « Cela s’est bien passé pour la plupart, mais les mentores nous ont dit que ce n’était pas évident de faire comprendre aux étudiantes qu’elles pourraient être amenées à rencontrer des problèmes plus tard, reconnaît Alexia Anglade, directrice marketing et communication de TBS. Elles n’ont pas encore commencé leur carrière, négocié leur salaire, ne sont pas encore passées à côté d’une promotion… »

Un public élargi

Pour avoir un impact plus décisif, l’école de commerce a décidé de proposer l’an prochain le mentorat à un public plus mature : celui des mastères spécialisés, qui compte 50 % d’étudiants en formation continue, en l’ouvrant aussi aux étudiantes étrangères. Les mentores de cette année sont prêtes à participer à nouveau l’an prochain, et seront rejointes par de nouvelles recrues. Par ailleurs, le programme de sensibilisation à l’égalité auprès des jeunes de formation initiale sera maintenu et élargi, en veillant à présenter la démarche de façon positive.

« Parfois, dans des conférences, des étudiantes nous ont dit qu’on leur faisait peur, alors que notre but est de leur faire gagner du temps. Le sujet est très sensible, juge la directrice marketing et communication de TBS. C’est un sujet passionnant, mais qui demande de bien réfléchir à l’angle par lequel l’aborder si on veut être efficace. »

Ce programme de mentorat a été lancé en novembre 2016, après que la Toulouse Business School s’est aperçue que ses étudiantes de dernière année avaient des ambitions salariales significativement plus faibles que leurs homologues masculins, espérant démarrer à 32 000 euros annuels contre 37 000 euros, alors même que les filles étaient souvent plus brillantes et parfaitement représentées à la tête des associations de l’école. « Nous nous sommes demandé pourquoi ces jeunes femmes s’imposaient un handicap à elles-mêmes, explique Alexia Anglade. Pour y remédier, nous avons décidé de lancer le programme Equal.Id avec plusieurs axes : un accompagnement individuel de 14 mois pour des étudiantes volontaires de troisième année avec des femmes managers, un volet de sensibilisation pour tous les étudiants, garçons et filles, afin que, lorsqu’ils seront managers, ils sachent repérer les femmes qui s’autocensurent, et un volet recherche pour en identifier les mécanismes. »

Des réseaux divers

L’école a fait appel à ses réseaux d’entreprises, d’anciennes élèves, et aux réseaux sociaux pour recruter des marraines. PME et grands groupes ont répondu présent dans des secteurs variés, cabinets RH, sociétés de conseil, banques, agences de communication, médias, industrie, informatique… La vice-présidente de l’association Business Professionnal Woman (BPW) à Toulouse, très engagée en faveur de l’égalité entre femmes et hommes au travail, a accepté logiquement de faire partie de 60 femmes en position de management sollicitées par TBS. « J’aurais aimé avoir un mentor quand j’ai commencé ma carrière, affirme Valérie Carbonne, responsable RH dans des grands groupes pendant une vingtaine d’années avant de fonder son propre cabinet il y a un an. J’espère faire gagner du temps à Floriane, l’aider à s’affirmer dans ce qu’elle a envie de faire et à avoir l’ambition de choisir un métier qui ait du sens. »

TBS se défend de vouloir faire de toutes ses étudiantes de futures « arrivistes tradeuses qui vont se mettre à la place des hommes dans la finance et les conseils d’administration des grands groupes ». « Nous n’avons pas de modèle idéal de réussite et de projet de carrière pour nos étudiantes, insiste Alexia Anglade, qui accompagne elle aussi une étudiante. Nous voulons qu’elles soient bien dans leur peau, quel que soit leur projet de vie, mais qu’elles ne se ferment rien. »

Stéphanie Malenfer, BNP Paribas Real Estate
« C’était très stimulant de partager mon expérience »

Stéphanie Malenfer, directrice des investissements chez BNP Paribas Real Estate en région parisienne, a été sollicitée par le service des ressources humaines pour participer au programme de mentoring de TBS, parce qu’elle avait bénéficié elle-même en 2012 de Women In Leadership, un programme d’accompagnement en interne pour promouvoir les femmes et accompagner leur carrière. « C’était très stimulant de partager mon expérience avec ces jeunes femmes », raconte celle qui, en dix ans, a gravi les échelons dans son entreprise. Après une première rencontre avec ses deux « mentees » en mode speed-dating lors du cocktail de lancement, elle a déjeuné avec une des étudiantes en alternance en région parisienne et échangé depuis par mail et téléphone, la deuxième étudiante étant en stage en Allemagne. « Marion et Manon m’ont demandé des conseils sur l’affirmation de soi. Mais, finalement, j’ai surtout essayé de leur transmettre les codes du monde du travail, indique la quadragénaire. Elles se sont inquiétées de savoir comment gérer le rapport vie professionnelle-vie privée plus tard. J’ai dédramatisé tout ça en disant qu’on peut mener sans problème carrière et vie personnelle. » Stéphanie a aussi conseillé très concrètement l’une de ses protégées qui avait l’impression que son tuteur en entreprise la prenait moins au sérieux que son collègue homme et lui confiait des tâches moins intéressantes. « Je lui ai suggéré d’aller demander des explications avec des éléments factuels et surtout pas de façon émotionnelle, raconte-t-elle. Après cela, son tuteur a totalement changé de comportement. Il a arrêté de faire des blagues et est devenu plus respectueux. Mon expérience m’a permis de me rendre compte de ce qui marche ou pas. »

Auteur

  • Catherine Sanson-Stern