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Royaume-Uni : Le Royaume-Uni face à une crise de compétences

Sur le terrain | International | publié le : 04.07.2017 | Stéphanie Salti

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Royaume-Uni : Le Royaume-Uni face à une crise de compétences

Crédit photo Stéphanie Salti

Les grandes entreprises s’inquiètent particulièrement de la perte de talents, liée à la faiblesse du système de formation continue. Et ce d’autant plus avec le Brexit.

Le système de compétences outre-Manche ne répond plus aux besoins. C’est en substance la conclusion à laquelle est parvenu le CIPD, fédération des professionnels des RH, dans une étude sur le sujet (From inadequate to outstanding : making the UK’s skills system world class). Selon l’organisme, le Royaume-Uni ne ferait rien d’autre que glisser lentement vers une économie à faible valeur et à faibles niveaux de compétences.

La faute en particulier à l’incohérence des politiques en matière de compétences menées depuis une vingtaine d’années outre-Manche : au total, pas moins de 56 secrétaires d’État et 11 changements en matière de responsabilité départementale ont été identifiés au cours de cette période. « La politique britannique consistant à mener de plus en plus d’étudiants à décrocher un diplôme universitaire a bien fonctionné, explique Lizzie Crowley, conseillère en compétences au sein du CIPD et auteur de l’étude. Mais nous avons négligé le système de formation continue pour tous les gens qui ne vont pas à l’université. » De façon générale, l’investissement élevé du Royaume-Uni dans son système éducatif (6e sur les 33 pays de l’OCDE), n’aboutit pas à de meilleurs résultats scolaires : les jeunes âgés de 16 à 24 ans en Angleterre et en Irlande du nord se situent à la troisième place du classement en partant de la fin en lecture et écriture et 4e en calcul, selon une enquête de l’OCDE menée en 2012.

Faible financement

En revanche, souligne l’étude, cet investissement ne tient pas compte de la manne de financement dédiée à la formation professionnelle après les études secondaires, jugée très faible, à la différence de nombreuses économies européennes comme l’Allemagne, la France et l’Italie. Le sous-investissement chronique des entreprises en matière de formation professionnelle est ainsi pointée du doigt : le Royaume-Uni dépense en moyenne moins en formation professionnelle que n’importe laquelle des autres économies majeures de l’Union européenne et cet écart s’est creusé depuis 2005. En 2010, le coût par salarié était de 266 euros au Royaume-Uni, comparé à 511 euros au travers de l’Union européenne. Autre point faible : le taux de participation des salariés aux programmes de formation sponsorisés par l’employeur est aussi sur le déclin.

Les dernières mesures prises pour endiguer le phénomène ne seraient pas non plus cohérentes : introduite en 2015 par le gouvernement britannique, la taxe sur l’apprentissage, destinée à créer 3 millions de postes d’apprentis entre 2015 et 2020, aurait finalement abouti à un effet pervers. « L’introduction de cette taxe s’est révélée être un instrument inefficace, selon Lizzie Crowley. Les employeurs ont réduit les investissements dans d’autres dispositifs de formation ou renommé ces activités sous le terme d’apprentissage sans pour autant qu’on perçoive un quelconque signe d’investissement supplémentaire des entreprises. »

Dans un contexte de déclin des compétences, le Brexit ne ferait qu’aggraver la situation. La Commission européenne a accueilli fraîchement les propositions faites par Theresa May le 26 juin dernier en matière de droit des ressortissants européens après la sortie du Royaume-Uni de l’UE. Plus d’un tiers des multinationales opérant au Royaume-Uni s’inquiètent d’ores et déjà de leur capacité à attirer les talents post-Brexit, selon le sixième rapport annuel du RES Forum publié mi-juin. Les sondages leur donnent raison : plus de la moitié des diplômés d’université européens et travaillant pour l’une des entreprises du FTSE 250 ou au CA supérieur à 50 millions de livres, envisagent plus ou moins fermement de quitter le Royaume-Uni avant même la fin des négociations, selon le cabinet d’avocats Baker McKenzie. En l’absence de certitude concernant le sort des Européens, le CIPD préconise un réinvestissement significatif des employeurs dans la formation professionnelle : « L’immigration européenne a contribué largement à la croissance outre-Manche, conséquence d’une main-d’œuvre souvent à plus fortes compétences qu’au Royaume-Uni », souligne Lizzie Crowley. L’organisme propose ainsi d’augmenter les financements publics à destination des plans de formation professionnelle dans l’entreprise : « Le gouvernement devrait aussi se saisir de cette occasion pour augmenter ses ambitions pour le Royaume-Uni et mettre en place un plan d’action clair pour s’attaquer aux compétences, à un niveau national, local et sectoriel », suggère le CIPD.

Dans les médias

FINANCIAL TIMES. Les propositions sur les droits des Européens mécontentent le monde des affaires

Les entreprises ont fait part de leur désaprobation à l’écoute, le 26 juin, des propositions faites par Theresa May sur les droits des citoyens européens en Grande-Bretagne dans un univers post-Brexit. Pour ces organismes, ces propositions manquent de clarté et sont susceptibles de rajouter un poids administratif sur les entreprises et les individus. 27 juin 2017. Financial Times, quotidien économique.

Auteur

  • Stéphanie Salti