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L’enquête

La Redoute : Le régime au forfait, levier du changement

L’enquête | publié le : 04.07.2017 | M.-M. S.

Pour accompagner sa transformation numérique, l’enseigne a misé sur une nouvelle organisation du temps de travail, dont le forfait jours est un pivot. L’accord, signé il y a un an avec la CFE-CGC et la CFDT, est entré dans les mœurs. Sans anicroche.

C’est un véritable virage culturel qu’a réussi à négocier le groupe La Redoute, en cours de redressement après sa reprise par deux ex-cadres dirigeants en 2014. Depuis le 1er juin 2016 en effet, tous les cadres sur ses deux sites de Roubaix et Wattrelos (Hauts-de-France) sont passés au forfait jours, alors qu’ils étaient tous à 41 heures hebdomadaires depuis quinze ans. Soit 450 personnes sur 1 350 salariés. Toutefois, l’accord “relatif à l’aménagement du temps de travail”, daté du 21 avril 2016, qui instaure entre autres ce nouveau régime de décompte du temps pour les cols blancs, a nécessité plus de onze mois de discussion. « Nous trouvions aberrant que des collaborateurs en responsabilité, qui mènent des missions et connaissent leurs objectifs, soient tenus de badger à l’entrée et à la sortie des locaux et que l’on mesure leur temps de travail à la minute, expose le DRH Pascal Lafon, arrivé fin 2014. Or, pour nous, le forfait jours n’est pas une simple mesure technique. Renforcert la dimension managériale l’autonomie et la responsabilistion de l’encadrement était un élément fondamental de la transformation de l’entreprise, comme l’ouverture du nouveau centre logistique, le Quai 30, sur la base de nouveaux horaires. » L’avantage d’avoir signé un accord aussi récent, c’est d’avoir évité tous les pièges juridiques. « Nous avons tenu compte de la jurisprudence sur les conventions de forfaits jours », se loue le DRH.

Aborder la charge de travail

Le texte qui fixe à 214 jours le forfait cadre, prévoit notamment un suivi du temps de travail via un système informatique, alimenté par le salarié lui-même, et qui permet un décompte « par exception » (par journée ou demi-journée) des jours de congés, de RTT, des arrêts maladie, etc. « Nous avons été vigilants sur la compensation, et obtenu 14 jours de RTT », se félicite de son côté Jean-Jacques Deleu, délégué syndical CFE-CGC et signataire de l’accord avec la CFDT. Surtout, le e-commerçant encourage le salarié et son supérieur à établir, lors d’un premier entretien en début d’année, un calendrier prévisionnel des jours de repos. Et il prévoit un second entretien spécifique entre manager et managé pour aborder la charge de travail. « Ils sont couplés avec les entretiens de développement et de performance, pour ne pas avoir à remobiliser toute l’organisation sur deux rendez-vous supplémentaires, mais il s’agit bien d’un thème à part », précise Pascal Lafon.

Par ailleurs, La Redoute s’est souciée de pédagogie : les managers ont été réunis par petits groupes de dix, pour leur expliquer la nouvelle organisation – horaires des cadres et des non-cadres – explicitée aussi dans un fascicule papier imprimé et disponible sur l’intranet.

Enfin, une commission de suivi, associant la direction et les élus signataires, fait un point tous les deux mois sur les dysfonctionnements du forfait jours. « Nous n’avons constaté que peu d’anomalies, qui ont vite été rectifiées. Les cadres qui se plaignaient d’horaires élastiques par le passé, sont contents de ce forfait », résume Jean-Jacques Deleu, de la CFE-CGC. Un bilan de l’accord temps de travail sera dressé et présenté au CE et au CHSCT fin 2017 et publié dans le bilan social. Enfin, l’accord livre en annexe, et à titre indicatif, les métiers concernés par le forfait jours, dits “emplois repères”. Cela va de l’acheteur au comptable, en passant par les chefs de groupe et chefs de projet et par les coordinateurs divers, jusqu’aux cadres dirigeants, dont le forfait spécifique monte à 224 jours. Pascal Lafon aimerait l’an prochain, pouvoir étendre la liste des bénéficiaires à des agents de maîtrise – au marketing, au Web, aux RH, aux finances, etc. – lors d’une nouvelle négociation. « Certains le réclament, surtout les jeunes. Il faudra être précis sur les postes, mais ce sera un deuxième saut culturel »

Repères

Activité

e-commerce, centrée sur la mode femme et enfant et la déco (linge et meubles).

Effectifs

2 000 salariés, dont 500 cadres.

Chiffres d’affaires 2016

750 millions d’euros.

Auteur

  • M.-M. S.