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L’enquête

Fédération de la plasturgie : Un accord exemplaire avec service après-vente

L’enquête | publié le : 04.07.2017 | Violette Queuniet

La branche a signé en mai 2013 un accord forfait jours anticipant les nouveautés de la loi Travail. Particulièrement bordé et détaillé, le texte sécurise les conventions d’entreprise qui s’y rattachent. Un guide pratique très pédagogique a facilité son appropriation par les employeurs.

La branche plasturgie a toujours été innovante, en particulier dans le domaine social. Dès 2000, elle s’était dotée d’un dispositif forfait jours. Mais le ministère du Travail en avait refusé l’extension faute de précisions suffisantes dans la définition des salariés concernés. Chaque entreprise devait donc signer son propre accord, celui de la branche n’étant pas directement applicable. Dans les faits, avec 37 salariés en moyenne – 88 % des structures ont moins de 50 salariés – et donc dépourvues de délégué syndical, rares étaient celles qui avaient négocié sur ce point. Une discussion s’est ouverte courant 2012 pour aboutir à un nouvel accord forfait jours signé le 15 mai 2013 avec la CFE-CGC, la CFDT et la CFTC. L’attente a été bénéfique car entre-temps, la jurisprudence a fortement évolué, après les invalidations en cascade d’accords de branche et d’entreprise par la Cour de cassation. Les acteurs de la branche en ont donc tiré les leçons en produisant un accord particulièrement équilibré, qu’on pourrait qualifier de gagnant/gagnant. Il faut dire aussi que la fédération, pressée de sécuriser les pratiques en la matière au sein des entreprises, a dû lâcher du lest. Car celles-ci fonctionnent de plus en plus en mode projets peu compatibles avec des horaires fixes. La plasturgie a ainsi dû limiter l’accord aux seuls cadres pour obtenir la signature de la CFDT. Pour le syndicat, l’ouverture du forfait jours aux non-cadres était en effet une ligne jaune à ne pas franchir.

Points clés

À partir de là, la CFDT et la CFTC ont laissé le lead à la CFE-CGC qui a voulu aller très loin dans les détails. Par exemple, l’accord ne se contente pas de fixer la durée maximale de jours travaillés dans l’année. Sont abordées des situations particulières comme l’arrivée et le départ en cours d’année avec les mécanismes de calcul. « Nous n’avions pas intégré ces aspects au démarrage, mais au final cela s’avère très utile. Nous avons traité toutes les questions qu’un DRH ou un comptable peut se poser sur les forfaits jours », constate Mathieu Dufour, directeur des affaires sociales de la Fédération de la plasturgie. Les points clés de l’accord sont les suivants : une durée annuelle de 215 jours, des plafonds d’heures maximales travaillées par jour et par semaine identiques aux durées maximales de droit commun (10 heures/jour ; 44 heures/semaine sur 12 semaines consécutives), la possibilité de travailler 6 jours par semaine limitée à 10 semaines dans l’année ; un système d’alerte par le salarié auprès de son manager (document de contrôle établi par l’employeur et rempli par le salarié) ; un entretien annuel sur la charge de travail et sa répartition, avec le détail des points à aborder ; un prix de rachat de jours de repos plus avantageux que dans la loi (25 % au lieu de 10 % préconisés), le nombre de jours étant limité à 3 maximum par an.

En revanche, l’accord ne prévoit pas de fixation d’une grille de salaires plus élevés pour les cadres en forfait jours. « C’est le deal que nous avons proposé aux syndicats : soit une grille majorée avec moins de garde-fous, soit un vrai encadrement de la durée du travail mais sans grille. Les syndicats ont préféré la deuxième solution », indique Mathieu Dufour. C’est donc clairement l’équilibre vie privée/vie professionnelle qui est privilégié, cette fameuse « durée raisonnable » du travail préconisée par les arrêts jurisprudentiels… et donc totalement en ligne avec les dispositions de la loi Travail sur le forfait jours. Étendu début 2014, l’accord de branche s’applique aux 3 800 entreprises, du moins à celles qui n’ont pas signé d’accord d’entreprise. Pour faciliter son appropriation, la Fédération a conçu un guide pratique “forfait jours” (lire l’encadré p. 22). « L’environnement juridique étant complexe et mouvant, les DRH ont la tête dans le guidon. Notre rôle est de leur faciliter la vie », explique Mathieu Dufour. La fédération est coutumière de ce type de documents qui outillent ses adhérents. Leurs pages sont d’ailleurs les plus consultées de son site Internet. En revanche, les négociateurs n’avaient pas anticipé une disposition particulière de la loi El Khomri : le droit à la déconnexion. Un nouvel accord n’est pas à l’ordre du jour. En revanche, le guide “forfait jours” va être réactualisé sur ce point. Il sera disponible dans sa nouvelle version à l’automne.

Un guide pratique, utile aux ETI et PMI

Clair, maniable, et surtout très pédagogique, le fascicule de 20 pages, réalisé en octobre 2013, est un véritable mode d’emploi pour les entreprises qui veulent instaurer le forfait jours. Les divers chapitres rappellent l’environnement juridique, présentent les points essentiels de l’accord plasturgie, et proposent des fiches modèles : convention de forfait jours, document de relevé d’heures, droit d’alerte, assortis de conseils judicieux. Les auteurs font également un focus sur les liens entre l’accord de branche et l’accord d’entreprise. Car l’objectif du premier, est-il bien précisé, « est de ne pas impacter les entreprises ayant déjà leur propre forfait jours et souhaitant conserver celui-ci ». Cela dit, le guide profite à tout le monde. « Il fallait absolument expliquer aux entreprises qui avaient des accords et des conventions individuelles ce qu’il fallait faire pour les sécuriser, explique Mathieu Dufour. Et celles qui n’avaient rien ont désormais un outil clés en main. Il ne leur reste qu’à signer les conventions individuelles selon les modèles proposés ».

Repères

Activités :

Plasturgie et composites, 3 900 entreprises en France, dont une majorité de PMI (88 % d’entreprises de moins de 50 salariés).

Effectifs

208 000 salariés.

Chiffre d’affaires 2016

51,7 milliards d’euros.

Auteur

  • Violette Queuniet