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L’enquête

AXA : Les accords d’anticipation des changements font le job

L’enquête | publié le : 02.05.2017 | Emmanuel Franck

AXA a signé deux accords-cadres européens sur l’anticipation des changements en 2011. Ils définissent encore aujourd’hui les règles pour accompagner les restructurations, notamment dans les pays qui en sont dépourvues. La représentativité de la fédération syndicale européenne signataire n’est pas allée de soi.

Observatoire des métiers, encadrement de l’information aux instances nationales de représentation du personnel, mesures RH destinées à anticiper les évolutions des métiers, commission de suivi… Les accords européens sur “l’anticipation des changements” d’AXA Assistance et d’AXA Groupe – le second répète à peu près le premier –, signés fin 2011, rappellent les accords GPEC et les accords de méthode qui existent en France. Avec deux grandes différences toutefois. Ils couvrent toutes les entreprises d’AXA dans le périmètre du comité d’entreprise européen, soit 66 000 salariés dans 12 pays. Ils ne se substituent pas aux accords nationaux ni, bien sûr, aux législations nationales.

À l’époque de leur négociation, l’objet de ces textes était de prendre en compte l’impact sur l’emploi et sur les compétences des salariés du projet de transformation, lancé quelques mois auparavant par la direction d’AXA afin de renforcer la compétitivité de l’entreprise. Les accords, renouvelés tacitement depuis, continuent d’être utilisés dans d’autres cas de restructuration et pour cadrer le dialogue social.

« L’idée était, en cas de réorganisation, de disposer de règles en matière d’information-consultation ou de suivi des effectifs, explique Olivier Pelras, signataire de l’accord groupe pour la CFDT et membre du bureau du comité européen de groupe d’AXA (CEG), dont il est aujourd’hui le secrétaire CFE-CGC. L’accord nous a également servis lorsque la direction a lancé un plan de transformation numérique, en 2013. C’est l’outil de travail du comité européen. » L’accord a également repris du service au mois de septembre 2016, lorsqu’AXA a annoncé un plan social en Belgique. « La direction ne voulait pas inscrire le plan social à l’ordre du jour du comité européen, arguant qu’il s’agissait d’un problème belgo-belge, se rappelle Olivier Pelras. Nous lui avons rappelé l’accord sur l’anticipation, qui légitime le CEE dans ce genre de situation. Le fait d’aborder la situation belge en comité européen nous a permis de faire pression sur la direction du groupe, qui elle-même a fait pression sur la direction locale. » Le syndicaliste explique que les accords de 2011 sont également utiles pour donner un cadre au dialogue social dans les pays où il n’y en a pas beaucoup, « comme la Pologne ».

En l’absence de règles européennes précises encadrant la négociation collective des accords transnationaux, la légitimité des accords d’AXA et la représentativité de ses signataires ont été fabriquées sur mesure par ses partenaires sociaux. Le bureau du CEG s’est chargé de la négociation. UNI Europa Finance, fédération des syndicats européens de la banque et de l’assurance, était également partie à la négociation et participait aux séances du CEG, ce qui n’est pas prévu par les textes européens. « J’ai participé à la négociation des accords transnationaux d’anticipation du changement d’AXA en qualité de représentant de la fédération UNI Europa Finance dont j’étais le coordinateur du secteur assurances pour la France à l’époque, étant précisé que je siégeais par ailleurs au CEE comme expert, poste prévu par l’accord AXA sur le CEG », explique Maurice Zylberberg. Il faut dire aussi que Maurice Zylberberg connaissait bien l’entreprise puisqu’avant d’être à UNI Europa, il était membre du CEG d’AXA pour la CFDT. « On était entre nous », déclare Olivier Pelras. C’est le gentlemen’s agreement dont parle Udo Rehfeldt (lire son interview p. 23). Comment la direction aurait-elle réagi si elle avait dû accueillir un négociateur extérieur ? Sollicitée, celle-ci n’a pas pu répondre à nos questions.

Les accords d’anticipation ont été signés par les Pdg des deux entreprises (Henri de Castries pour l’accord de groupe et Serge Morelli pour l’accord AXA Assistance) et, côté salariés, par UNI Europa Finance, par la CFDT, la CGT (pas l’accord groupe), la CFE-CGC, et l’UDPA/Unsa. « Les syndicats français ont signé de leur côté parce qu’ils sont historiquement prépondérants au sein du CEG, l’UNI représentant les salariés des autres pays européens », explique Maurice Zylberberg.

Contrairement à beaucoup d’autres accords européens, le comité européen n’a pas signé ceux d’AXA. « Les élus de comité européen n’ont pas de pouvoir de signature, rappelle Maurice Zylberberg. Les syndicats leur donnent en général un mandat temporaire, mais cela n’a pas été le cas chez AXA. » Néanmoins, la plupart des syndicalistes français signataires étaient également membres du CEG. Ainsi, même s’il ne fait pas partie des signataires, le CEG a été un acteur central de ces accords. Son rôle est d’ailleurs souligné dans l’accord groupe.

Dysfonctionnement

Si la représentativité des syndicats français sur leur périmètre n’a pas fait de doute, il n’en fut pas de même pour celle de l’UNI. UNI Europa Finance fédère 80 syndicats nationaux dont la CFDT, la CGT et FO. La signature de Maurice Zylberberg engageait-elle les syndicats présents chez AXA en Europe ? « En principe oui, répond l’intéressé. La quasi-totalité des syndicats nationaux sont adhérents à UNI Europa. Mais il s’est trouvé que les syndicats belges n’ont pas été unanimes et une organisation a même contesté le déroulement des négociations. » Il admet qu’il y a peut-être eu un dysfonctionnement chez UNI Europa et que les syndicats nationaux n’ont peut-être pas été informés suffisamment en amont. Il rappelle aussi que les élus du comité européen avaient l’obligation d’informer leurs syndicats mais que, là aussi, les choses n’ont peut-être pas fonctionné comme prévu. « Les belges n’ont pas apprécié que les accords évoquent la question des plans sociaux, même pour dire qu’il fallait privilégier les alternatives, explique Olivier Pelras. Il peut arriver que des syndicats préfèrent utiliser leurs outils nationaux et refusent qu’un accord s’impose à eux ».

Repères

Accord européen sur l’anticipation des changements d’AXA Assistance

Signature : septembre 2011.

Durée : trois ans renouvelables tacitement.

Signataires : Pdg AXA Assistance, UNI Europa Finance, CFDT, CGT, CFE-CGC, UDPA/Unsa.

Accord européen sur l’anticipation des changements d’AXA Groupe

Signature : novembre 2011.

Durée : trois ans renouvelables tacitement.

Signataires : Pdg AXA SA, UNI Europa Finance, CFDT, CFE-CGC, UDPA/Unsa.

Les principales dispositions des accords d’anticipation d’axa

– Informations détaillées une fois par an au comité européen sur le contexte économique d’AXA en Europe.

– Mise en place d’un observatoire des métiers.

– Garantie d’un entretien annuel de performance pour chaque salarié.

– Mise en place d’une bourse à l’emploi internationale.

– Mise en place d’un entretien individuel avec la DRH pour les salariés dont l’emploi est menacé.

– Incitations au temps partiel et aux aménagements de fin de carrière.

– Mise en place d’outils d’accompagnement à la mobilité externe (coaching, outplacement, management de transition…).

– Recours aux plans sociaux et aux PDV en dernière extrémité.

– Suivi de l’accord par le bureau du comité européen.

Auteur

  • Emmanuel Franck