Yves Grasset, consultant en sociologie clinique, analyse les dangers d’une individualisation toujours plus poussée du travail et de la performance sur la santé des salariés. Sa thèse, étayée par les travaux de sociologues et quelques témoignages de salariés, est connue : pour lui, c’est l’effritement du collectif qui fragilise l’individu et génère la montée de la violence et de la souffrance au travail. Un phénomène « qui ne nuit pas seulement aux salariés, mais ruine aussi la capacité d’adaptation et de régulation des organisations », insiste le sociologue. Peut-on réintroduire plus d’échanges collectifs alors que le numérique accélère la pression individuelle ? Yves Grasset convient que, si le contexte ne s’y prête guère, ces « respirations sont un enjeu indispensable ». Critiquant la psychologisation du travail et les études de mesure du stress qui renvoient « trop souvent le problème à l’individu sans s’attaquer aux problèmes de fond », il prône une approche globale de la prévention des risques, s’appuyant sur un diagnostic des dysfonctionnements de l’entreprise. Un processus long, mené par le CHSCT, la direction et les équipes de santé et de prévention du travail. Fin connaisseur du sujet, avec son intérêt et ses limites, Yves Grasset décline dans la seconde partie de son livre cette méthode de prévention globale visant à restaurer plus de collectif, qui « a conduit par exemple certains DRH à revoir les entretiens annuels ou à réintroduire des temps d’échanges entre pairs », argumente-t-il. Un regard partisan, mais instructif.