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L’enquête

Armor Lux : Faire d’une contrainte une opportunité

L’enquête | publié le : 13.12.2016 | Violette Queuniet

Pour travailler avec l’entreprise de textile, les fournisseurs doivent s’engager à signer une charte RSE. Des audits réguliers permettent à beaucoup d’entre eux de progresser.

Chez Armor Lux, il y a les vêtements grand public, distribués dans des boutiques appartenant au fabricant, et les vêtements professionnels destinés à de grands donneurs d’ordre comme la SNCF et La Poste. Seuls les premiers sont fabriqués en France, comme la célèbre marinière popularisée par l’ancien ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg. Les vêtements professionnels sont, eux, fabriqués hors de l’Hexagone : au Maroc, en Tunisie, en Roumanie, en Inde et d’autres pays d’Asie. Ils représentent aujourd’hui 40 % du chiffre d’affaires d’Armor Lux.

Le choix de sous-traiter une partie de la production a été pris il y a dix ans, pour des raisons de compétitivité. À la demande de certains donneurs d’ordre, l’entreprise a dû renforcer sa vigilance sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, notamment en matière de RSE (responsabilité sociale et environnementale). Les fournisseurs doivent s’engager à respecter un certain nombre de droits fondamentaux du travail énumérés dans les huit conventions fondamentales de l’Organisation internationale du travail. Ils doivent également appliquer des normes environnementales et des réglementations en matière de santé des utilisateurs (notamment le règlement REACH). Le tout est formalisé dans une charte que les fournisseurs doivent signer s’ils veulent obtenir le marché.

Pour s’assurer du respect de leurs obligations, Armor Lux confie l’audit des pratiques RSE à PricewaterhouseCoopers (PwC). Le cabinet anglo-saxon a été choisi pour son positionnement international, son expertise mais aussi pour son éloignement du milieu du textile. « L’objectif est d’avoir la démarche la plus transparente et la plus indépendante possible. Nous avons voulu éviter tout risque de collusion, qui peut parfois exister dans la filière textile, entre la certification qualité d’un produit et la certification de l’éthique sociale d’un fournisseur ou d’un site de production », souligne Grégoire Guyon, responsable de la communication et de la RSE d’Armor Lux.

Culture RSE

En dix ans, 350 audits, initiaux et de suivi ont été menés sur sites. Les résultats sont plutôt satisfaisants, selon le directeur de la RSE : d’une année sur l’autre, 90 % des fournisseurs progressent ; la quasi-totalité des sites lèvent entre 30 % à 40 % des non-conformités d’un audit à l’autre. La plupart des non-conformités relèvent de l’hygiène et de la sécurité : défaut d’équipement de protection, absence d’extincteur, etc. « Nous essayons d’éviter que l’audit soit considéré comme une sanction. Pour autant, nous les encourageons à progresser en partageant nos bonnes pratiques et on leur laisse le temps de le faire : entre six mois et un an, sauf en cas de non-conformité grave qu’ils doivent lever immédiatement », explique Grégoire Guyon. Dans les cas rares d’audits négatifs, la relation commerciale est rompue.

Certains fournisseurs ont vite compris l’intérêt de la performance sociétale et gagnent d’autres marchés grâce à l’audit positif de Pwc. Le coût de l’audit (4 000 euros) est pris en charge par Armor Lux pour ses fournisseurs historiques. Les nouveaux fournisseurs, eux, en supportent le coût.

En interne, les salariés sont largement informés des engagements d’Armor Lux dans la RSE. « Les IRP sont tenus au courant et, même si c’est du domaine des RH, le personnel a accès à tous les indicateurs de suivi et de pilotage de la démarche globale RSE sur l’intranet », souligne Murielle Barreau, déléguée syndicale CFDT.

L’entreprise cherche aussi à développer la culture RSE. Depuis 2012, une vingtaine de salariés en contact avec les fournisseurs (chefs de produit, chefs de marché, contrôleur qualité…) ont été formés aux risques RSE. « L’objectif est de leur donner un œil plus acéré sur la RSE, et pas seulement sur la qualité, et de remonter du terrain d’éventuels problèmes entre deux audits », précise le directeur de la RSE.

Une cartographie par fournisseurs

Armor Lux partage aussi volontiers son expertise avec ses donneurs d’ordre. Dix ans d’audit lui ont permis en effet de constituer une base de données précieuse avec une cartographie des risques par fournisseur en fonction de leur position occupée dans la chaîne d’approvisionnement et par zone géographique. Des exigences posées au départ, l’entreprise a su faire une force, comme le souligne Grégoire Guyon. « Nous considérons que la RSE n’est pas une contrainte mais une opportunité. C’est pour cela que nous avons structuré notre démarche et que nous la valorisons auprès de nos clients. »

Repères

Activité

Textile

Effectif

550 salariés

Chiffres d’affaires 2015

90 millions d’euros.

Auteur

  • Violette Queuniet