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Relations interpersonnelles : Manager en open space

Les clés | publié le : 06.12.2016 | Florence Roux

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Relations interpersonnelles : Manager en open space

Crédit photo Florence Roux

Les bureaux en open space favorisent les échanges entre salariés, au risque de la promiscuité. Un défi pour les managers “immergés”, qui misent sur le respect et la confiance pour maintenir des relations harmonieuses.

En France, 18 % des salariés travaillent en open space*. « Cependant, le phénomène se développe depuis dix ans, explique Alain d’Iribarne, chercheur au CNRS (lire ci-contre les conseils du coach), souvent à la faveur d’un réaménagement de locaux. » Loin des énormes plateaux des années 80, on parle aujourd’hui d’open space intelligent, avec un îlot par équipe, des espaces de réunion, de coworking ou de créativité, bulles de confidentialité ou box téléphonique. Avec, aussi, un recours accru au télétravail. « Dans cette configuration, le manager doit s’adapter », ajoute le chercheur.

Son premier souci : les relations entre collègues, que sept actifs sur dix placent au top de la qualité de vie au travail*. Et qui, en open space, souffrent du bruit et du manque de confidentialité. À Accenture, l’un des pionniers de l’open space et des bureaux partagés en 1995, ces questions sont prises au sérieux, mais sans stress. « Il faut un peu de discipline pour ne pas parler trop fort au téléphone ou ne pas lorgner sur l’écran de son collègue, concède Marc Thiollier, secrétaire général d’Accenture France. Comme manager, il m’arrive de rappeler au respect de chacun, mais sur un ton informel, volontiers avec humour. Il faut juste savoir dire simplement : “Tu parles trop fort”. »

Autre support du bien-être ensemble, pour le dirigeant, les petits espaces qui, autour de l’open space, offrent aux managers et aux salariés des lieux de confidentialité pour discuter un problème précis, un coup de fil prolongé, une réunion de dernière minute. Sans oublier, pour mieux se concentrer, le télétravail, ouvert depuis 2010 chez Accenture et que pratiquent 500 collaborateurs un à trois jours par semaine. Il offre une respiration, voire une soupape.

Les nouveaux locaux de Bayer à La Garenne-Collombes (92), investis en juin dernier, disposent aussi d’un grand éventail de “postes de travail” : bureaux de passage pour les salariés du groupe, îlots-villages, par équipes de 5 à 10 personnes, salles de réunion de proximité, box téléphoniques, agoras. « Tout ne se fait pas forcément dans l’open space mais, selon le degré de confidentialité, selon son travail, dans l’un des espaces dédiés, explique Pascale Delgrandi, responsable du site. Et chacun se régule. Comme manager, je suis dans l’équipe, mais je n’ai pas à faire la police. » Charge à chacun de respecter la charte de bonne conduite, concoctée par un groupe de salariés en amont de l’installation.

Manager au milieu

Pas de charte écrite, mais la même « confiance en chacun » et dans l’autorégulation chez Horizontal Paris, société qui propose aux entreprises de la prise de rendez-vous commerciaux. « La recherche de nouveaux marchés, avec obligation de résultats, est un travail sur-mesure, difficile, avec des risques d’essoufflement, relève Cédric Buisson, directeur exécutif de la PME. C’est un sport d’équipe où l’open space joue un rôle essentiel d’émulation pour nos vingt salariés. Les deux managers – l’un, RH et l’autre, directeur commercial, organisent ensemble des challenges au résultat, seul ou en équipe. » L’idée ? Trouver le bon équilibre entre la compétition et la solidarité, pour soutenir la personne et la maintenir en alerte… Le bruit ? « Nous nous sommes équipés de panneaux absorbants et de casques multidirectionnels, ajoute-t-il. Mais ça ne suffit pas. Il faut aussi faire confiance à chacun, en sachant qu’on reste dans l’humain. Imprévisible. »

Et que devient le manager dans ces bureaux ouverts aux sensibilités ? « Il a le même rôle qu’avant, mais il est au cœur de l’îlot, au milieu de son équipe, rétorque Pascale Delgrandi, à Bayer. Je travaille de concert avec mes collaborateurs. Quand j’ai un point à faire avec l’un d’entre eux, un rendez-vous important, j’utilise une salle de proximité. Au début, mon équipe était surprise que je sois au milieu d’elle, sans porte. Mais ça se passe très bien. Ça permet plus de coopération et d’échange. »

Gains en efficacité et en qualité

À Accenture, également, quasiment tout le monde travaille en open space et bureau partagé – à part le médecin du travail, le président monde (français) et le responsable sécurité. « Je passe beaucoup de temps en réunion, au téléphone, en dehors de l’open space, note Marc Thiollier. Mais quand je reviens, au milieu de l’équipe, j’apprécie d’être au courant de se qui se passe, de connaître les hauts et les bas de chacun. Savoir qui a été déçu par une réunion, par exemple. Et j’aime aussi échanger avec quelqu’un en cinq minutes, même dans un couloir, opération qui nous aurait pris tellement de temps par mail ! Nous gagnons en efficacité, en qualité. Et cette simplicité nous manquerait si nous devions retourner dans des bureaux traditionnels, avec des portes. »

Les conseils du coach

Alain D’Iribarne

Chercheur et président du conseil scientifique d’Actineo, observatoire de la qualité de vie et des conditions de travail

–1– Cultiver de bonnes relations entre les gens

Si l’open space permet le travail en interaction, le défi du manager de premier niveau sera de favoriser des relations harmonieuses entre les gens. Cela passe par des règles de vie ensemble : ne pas parler trop fort au téléphone, éviter le bruit à côté d’un collègue au téléphone, veiller à ne pas se bousculer dans les allées, mettre son mobile en mode vibreur… Plus qu’une charte écrite, difficile à respecter, le manager peut élaborer ces règles avec son équipe, les rappeler régulièrement de manière informelle. Dire les choses.

–2– Choisir la confiance contre la défiance

Les nouveaux open spaces intelligents – avec des bureaux partagés, petites salles de réunion, le recours au télétravail – multiplient les lieux où les collaborateurs sont libres de travailler, en leur offrant plus de confidentialité, de concentration. Mais cette plasticité des lieux et des temps demande au manager de diriger dans la confiance, et non dans le contrôle et la défiance. Cela passe par un contrat qui fixe des objectifs. Le contrôle se fait plutôt au résultat.

–3– Bien resituer son rôle de manager

Dans un espace ouvert, le manager ne pose pas son autorité en se retranchant dans un bureau à part. Il est au cœur de l’équipe, en permanence et se doit plus encore de rechercher la qualité. Il s’agit donc de se recentrer sur ses compétences premières, de donner des instructions claires et de bons conseils techniques, d’assurer dans son rôle d’expert du métier. L’open space peut être un révélateur terrible des mésententes et des fragilités professionnelles.

* Dans des “espaces collectifs ouverts d’au moins quatre personnes”, selon le baromètre Actineo, observatoire de la qualité de vie au bureau, novembre 2015.

Auteur

  • Florence Roux