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La chronique juridique d’avosial

Chronique | publié le : 06.12.2016 | Angéline Duffour, Hélène Bérion

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La chronique juridique d’avosial

Crédit photo Angéline Duffour, Hélène Bérion

Loi sapin II : les entreprises face au nouveau statut des lanceurs d’alerte

Le 8 novembre, le Parlement a définitivement adopté le projet de loi Sapin II relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. La loi a fait l’objet d’une saisine du Conseil constitutionnel, lequel a jusqu’au 15 décembre 2016 pour se prononcer.

Parmi les mesures phares de la loi, le statut protecteur accordé au lanceur d’alerte et de nouvelles obligations à la charge des entreprises (dispositif de recueil des alertes professionnelles et programme anti-corruption). En voici quelques précisions.

1. Après la succession d’affaires médiatiques telles que Luxleaks et Panama Papers, la France a décidé de doter le lanceur d’alerte d’un statut et d’une protection spécifiques.

C’est ainsi que la loi Sapin II définit le lanceur d’alerte comme une personne physique « qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance ».

Le lanceur d’alerte bénéficie d’un statut protecteur. Les éléments de nature à identifier le lanceur d’alerte ne peuvent être divulgués, sauf à l’autorité judiciaire, qu’avec le consentement du lanceur d’alerte.

La responsabilité pénale du lanceur d’alerte ne peut être engagée en cas d’atteinte à un secret protégé par la loi que sous certaines conditions. Enfin, le lanceur d’alerte est protégé contre d’éventuelles représailles de son employeur.

2. En outre, la loi Sapin II consacre pour les entreprises d’au moins 50 salariés, l’obligation de mettre en place un système de recueil des alertes, avec une gradation sécurisée des canaux de signalement. Le signalement d’une alerte est porté en premier lieu à la connaissance du supérieur hiérarchique, direct ou indirect, de l’employeur ou de toute personne de confiance désignée par l’employeur (chargé de conformité, déontologue…), via un dispositif laissé à l’appréciation de l’employeur (adresse électronique, « hotline », plateforme dédiée, etc.).

Sans retour de la part du destinataire du signalement dans un délai raisonnable, l’alerte est ensuite adressée à l’autorité judiciaire, à l’autorité administrative ou aux ordres professionnels. En dernier ressort, à défaut de prise en compte par l’un des organismes précités dans un délai de trois mois, l’alerte peut être rendue publique, via la presse ou les réseaux sociaux notamment.

Ces dispositions contiennent déjà certains écueils, la loi ne précisant pas la notion de « délai raisonnable » et organisant en pratique un mode de signalement réservé aux salariés alors même que le dispositif est ouvert aux collaborateurs extérieurs et occasionnels.

3. La loi Sapin prévoit par ailleurs, pour les entreprises d’au moins 500 salariés, et dont le chiffre d’affaires dépasse 100 millions d’euros, l’obligation de mettre en place un programme anti-corruption afin de prévenir et de détecter la commission de faits de corruption ou de trafic d’influence.

Il s’agit pour l’essentiel d’intégrer dans le règlement intérieur un code de conduite, de mettre en place un dispositif d’alerte interne, de former les cadres et les personnes les plus exposées et d’instituer un régime de sanctions disciplinaires.

La mise en place de ces dispositifs implique une logistique bien encadrée dans le respect des règles relatives à la protection des données personnelles et du droit du travail (consultation des représentants du personnel, information des salariés notamment) pour laquelle la plus grande prudence est recommandée.

Auteur

  • Angéline Duffour, Hélène Bérion