logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les clés

Gestion d’équipe : Osez le management optimiste !

Les clés | publié le : 29.11.2016 | Sabine Germain

Image

Gestion d’équipe : Osez le management optimiste !

Crédit photo Sabine Germain

Alors que le pessimisme mène à la passivité, l’optimisme est une énergie de l’action. Mais une énergie qui peut tourner à vide si le manager n’a aucune prise sur son environnement. Le management optimiste consiste à identifier les leviers d’actions qui permettront – peut-être – d’aller vers une issue positive.

« Parfois, tout vous sourit. Rassurez-vous, ça ne va pas durer. » Professeur de psychologie à ESCP Europe, auteur d’un Éloge de l’optimisme(1), Philippe Gabilliet aime à citer cette phrase de Jules Renard. À ses yeux, l’optimisme ne doit pas être une humeur ou une énergie déconnectée de la réalité. « Il est des situations où l’optimisme n’est clairement pas de mise : face à un risque vital ou quand vous n’avez aucune marge de manœuvre, par exemple. Car l’optimisme n’est pas seulement une forme de confiance dans l’avenir : c’est aussi la conviction qu’en cas de problème, vous aurez la capacité de réagir. »

Ces marges de manœuvre sont parfois très minces : « Face à des événements aussi accablants que les attentats du 13 novembre 2015, l’optimisme ne consiste pas à dire que ce n’est pas grave et que tout va bien, explique Philippe Gabilliet. Mais il permet de travailler la résilience collective pour repartir de l’avant. » Ce qui suppose de regarder les choses autrement. « Nous vivons effectivement une époque difficile, observe Sylvaine Pascual, coach (lire les conseils du coach). Mais si l’on se place dans une perspective historique, comme le fait le philosophe Michel Serres(2), on se rend compte que le monde n’a jamais été aussi pacifique. »

Alors que le pessimisme « mène à l’immobilisme », l’optimisme ressemble plutôt à « une énergie d’action et de prise de risque », poursuit Philippe Gabilliet. « L’environnement économique et le monde du travail sont foncièrement anxiogènes. Mais, comme je le dis souvent aux managers avec lesquels je travaille, si vous ne pensez pas que l’optimisme permet d’aller de l’avant, alors essayez le pessimisme. »

Être optimiste consiste donc, en premier lieu, à savoir regarder ce qui va bien : « Si l’on veut maintenir une équipe dans une disposition optimiste, on ne peut le faire qu’en valorisant ses points forts, ses atouts et ses marges de manœuvre. » Cette recherche des marges de manœuvre est, aux yeux de Philippe Gabilliet, la clé de la démarche. On peut considérer que la concurrence est mieux armée pour la bataille, que l’entreprise n’a jamais réussi à décrocher de gros appels d’offres, que la direction ne nous donnera jamais les moyens dont nous avons besoin. Il est alors difficile de ne pas baisser les bras ! Au manager d’identifier des leviers d’actions et de proposer des solutions alternatives pour sortir des scénarios négatifs.

Prenons le cas de Marc : directeur commercial dans une PME marseillaise de matériel vidéo, il croule sous les tâches administratives et le reporting : « Je me sens pieds et poings liés par une machine technocratique qui me dévore et m’enlève toute envie d’aller de l’avant », soupire-t-il. Comme beaucoup de managers, « enfermés dans l’idée qu’ils n’ont pas le choix », selon les termes de Sylvaine Pascual, Marc se laisse aspirer par une spirale délétère. « A-t-il réellement pris le temps d’exposer simplement son problème en proposant des solutions concrètes ? », poursuit la coach. « La bonne blague ! Vous croyez vraiment qu’on m’écoute ? », répond Marc en admettant à demi-mots qu’il n’a jamais réellement abordé la question.

Faire bouger les lignes

On n’est pourtant jamais à l’abri d’une bonne surprise ! « Prenons le cas du télétravail, explique Sylvaine Pascual. Pendant des années, comme personne ne le pratiquait, on a considéré que ce n’était pas possible. Mais certains managers ont eu l’optimisme de penser que ça pouvait marcher. Au lieu de s’enfermer dans l’impuissance pessimiste, avec ce qu’elle génère de frustrations et de perte d’estime de soi, ils ont fait bouger les lignes. »

Des effets pervers

« L’optimisme est effectivement une belle valeur, abonde Matthieu Tran Van, qui tient un blog “business et management”. Loin de moi l’idée de la démolir ! » Mais le jeune blogueur a aussi eu l’occasion d’en découvrir les effets pervers. « Certains managers font preuve d’un optimisme si forcené qu’ils finissent par déconnecter avec la réalité. » Un excès d’optimisme peut être contre-productif, voire dangereux : « Refuser d’envisager des scénarios sombres, les occulter derrière le futur radieux que l’on désire à tout prix n’est pas la solution. »

Cette vision trop rose de l’avenir amène le manager à fermer les yeux sur les facteurs externes qui peuvent menacer son business : « Le monde est plein de surprises, bonnes ou mauvaises. Une innovation disruptive pour anéantir votre marché en quelques mois. Au contraire, vous pouvez rencontrer un gros client qui vous emmène vers de nouvelles activités. » Garder les yeux rivés sur son horizon rêvé ne permet pas d’appréhender ce type d’événement. Au risque de passer à côté de belles occasions…

Les conseils du coach

Sylvaine Pascual

Coach consultante spécialiste du plaisir au travail.

–1– S’autoriser à voir le positif

Autorisez-vous à penser que les choses peuvent avoir une issue positive : il ne s’agit pas de faire preuve d’un optimisme béat, passif et déconnecté de la réalité. Au contraire, il faut passer à l’action en pensant que les choses peuvent bien se terminer dès lors que vous œuvrez dans ce sens.

–2– Exprimer ses besoins

Exprimez clairement vos besoins : votre direction vous fixe des objectifs inatteignables ? Inutile de maugréer « Non mais vous vous rendez compte de ce que vous nous demandez ! » On vous écoutera plus volontiers si vous démontrez en quoi cet objectif est irréaliste ou dans quelles conditions (une équipe étoffée, davantage de moyens) vous pourriez l’atteindre. L’optimisme ne consiste pas à transformer quelque chose de détestable en quelque chose d’acceptable mais d’oser dire : « Je ne peux pas faire ce que vous me demandez dans les conditions présentes. »

–3– Mieux répartir les tâches

Ne vous forcez pas à faire ce que vous n’aimez pas : aussi incroyable que cela vous paraisse, certaines personnes adorent remplir des tableaux, faire du classement ou être sur la route toute la journée. Au lieu de vous surcharger en gardant des tâches que vous détestez et/ou dont vous pensez que personne ne veut, interrogez vos collaborateurs sur leurs goûts et dégoûts. Dans la quasi-totalité des cas, vous vous rendrez compte qu’une meilleure répartition des tâches – c’est-à-dire plus satisfaisante pour tous – est possible.

(1) Éloge de l’optimisme, Éditions Saint Simon, 2010.

(2) Voir son interview « Nous vivons dans un paradis », parue dans le Monde du 10 septembre 2016.

Auteur

  • Sabine Germain