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Denis Monneuse : Du côté de la recherche

Chronique | publié le : 15.11.2016 | Denis Monneuse

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Denis Monneuse : Du côté de la recherche

Crédit photo Denis Monneuse

La face cachée de la rivalité

Rivalité et concurrence sont deux principes phares du management dans la mesure où ils sont au centre de l’économie. Ce sont les concurrents d’une entreprise qui poussent celle-ci à se surpasser, notamment à innover et/ou à baisser ses prix pour gagner des parts de marché.

De même, il n’est pas rare que deux services ou deux personnes soient mis en concurrence au sein d’une même entreprise afin que cette rivalité produise une saine émulation, celle-ci étant considérée comme un gage de motivation et de performance.

C’est d’ailleurs pour cela que le vocabulaire du sport, voire de la guerre, s’immisce régulièrement dans le champ lexical managérial, notamment lors des séminaires de management qui visent à (re) mobiliser les troupes. Des entraîneurs ou des athlètes renommés sont donc de plus en plus souvent invités par les dirigeants lors de ces séminaires pour partager leur expérience et leurs secrets afin d’aboutir à la victoire.

Toutefois, l’exacerbation de la rivalité est-elle toujours productive ? Ne débouche-t-elle pas aussi sur des effets pervers tels que la rétention d’information et le manque de coopération, par exemple ? Ce sont les questions que se sont posées Benjamin Converse et David Reinhard, deux chercheurs en psychologie de l’université de Virginie, aux États-Unis. Les résultats de leurs études sur la rivalité entre athlètes, publiés dans le Journal of Personality and Social Psychology, pointent le revers de la médaille(1).

Quand la rivalité dure, les protagonistes élaborent tout un récit mental de la compétition qui les « unit » à leur « adversaire ». Obsédés par leur rival, ils cherchent une victoire sur lui à tout prix pour marquer le coup, voire pour entrer dans l’histoire. L’objectif initial risque d’être perdu de vue. Ce qui, comme l’observent les deux chercheurs, mène souvent à des comportements à risque : excitation, imprudence, trop grande confiance en soi, erreurs de jugement, etc.

Les chercheurs notent aussi que cette rivalité déteint sur l’entourage des athlètes, en l’occurrence les supporteurs qui, eux aussi, prenant part à la rivalité en cours, privilégient des comportements à risque où l’émotion peut prendre le dessus sur la raison.

Si les dirigeants s’imprègnent du monde du sport pour parfaire leurs techniques de management, il est dans leur intérêt de s’intéresser à ses côtés positifs bien sûr, mais aussi aux risques encourus. Benjamin Converse et David Reinhard ont le mérite de le souligner dans leurs travaux de recherche. Ils ne cherchent pas à nier que la concurrence comporte bien des aspects positifs, en premier lieu une possible émulation entre deux personnes ou deux équipes. Mais ils invitent à ouvrir également les yeux sur ses potentielles dérives quand elle est trop exacerbée. Autrement dit, trop de rivalité tue les bénéfices d’une saine concurrence… en particulier quand les dirigeants appellent dans le même temps à plus de collaboration et de coopération !

1) B. Converse et D. Reinhard, « On Rivalry and Goal Pursuit : Shared Competitive History, Legacy Concerns, and Strategy Selection », Journal of Personality and Social Psychology, vol . 10, n° 2.

Auteur

  • Denis Monneuse