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Emploi des jeunes : L’alternance redémarre

L’enquête | publié le : 20.09.2016 | L. G.

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Emploi des jeunes : L’alternance redémarre

Crédit photo L. G.

L’alternance connaît un regain de vigueur, mais les entreprises vont devoir prendre en compte les changements nés de la loi Travail et la nouvelle régionalisation. La question de la fusion des deux contrats d’alternance ne sera abordée qu’après la prochaine élection présidentielle.

La rentrée est, traditionnellement, le moment privilégié de signature et d’enregistrement des contrats d’alternance, qu’ils soient d’apprentissage ou de professionnalisation. Tous les acteurs concernés par ce sujet (gouvernement, partenaires sociaux…) souhaitent que 2016 soit une bonne année, car 2015 l’a été, marquant ainsi un regain de vigueur pour cette modalité de formation particulière, après des années calamiteuses.

En 2015, 281 000 contrats d’apprentissage ont été signés dans les secteurs privé et public, soit une hausse de 2,3 % pour un total de quelque 382 000 contrats en cours d’exécution (1). Dans le secteur privé, 1,6 % de contrats supplémentaires ont été signés par rapport à 2014, après deux années de baisse. La reprise des entrées concerne tous les secteurs, à l’exception de la construction, et touche plus particulièrement les formations de niveau CAP (+ 2,7 %). Cette hausse s’explique essentiellement par la mise en place de l’aide “TPE jeunes apprentis” accordée aux petites entreprises recrutant un apprenti mineur. Ces recrutements ont augmenté de près de 10 % dans les entreprises de moins de 10 salariés.

Les entrées en apprentissage dans le secteur public ont fortement progressé (+ 25 %) pour s’établir à 11 000. Les embauches ont surtout augmenté dans les services de l’État (+ 18,9 %) répondant aux objectifs de recrutements fixés lors de la conférence sociale de juillet 2015.

Point noir en revanche : 38 % des nouveaux contrats sont signés par des entreprises de moins de cinq salariés (+ 5 %), alors que les entreprises de plus de 250 salariés ne représentent que 18 % des nouveaux contrats, en baisse de 2,2 %.

Côté contrat de professionnalisation : la France comptait 185 000 alternants en contrat d’apprentissage en juin 2016 contre 177 000 un an plus tôt(1) : la croissance du contrat de professionnalisation est moins forte que celle de l’apprentissage, mais malgré tout bien réelle.

Spécificités des métiers

La vertu pédagogique de l’alternance est reconnue et indiscutable. « Former et intégrer des jeunes est la meilleure façon de pérenniser les métiers et les compétences », assure Michel Misandeau, DG du groupe de travaux publics André Landais, qui fonde quasiment l’intégralité de ses recrutements sur l’alternance (lire p. 22).

Un avis partagé par Boubaker Es Sassi, responsable du pôle GPEC de la Compagnie nationale du Rhône : « Les formations initiales sont un peu trop généralistes, et nous devons souvent former nos nouvelles recrues à nos spécificités. » (lire p. 24).

Chez le chimiste Dow, Jean-Philippe Meyer, directeur de l’usine alsacienne, pratique et apprécie autant les deux contrats. Pour lui, l’alternance « sait former in situ à un besoin ciblé ». C’est pourquoi – expérience originale – Dow s’allie avec deux confrères, Tereos et Arlanxeo, pour mutualiser leurs besoins communs de formation sur un certificat de qualification professionnelle (CQP) en contrat de professionnalisation (lire p. 23).

Certains acteurs vont plus loin encore en conjuguant politique de formation et politique d’insertion de travailleurs handicapés. Ainsi, fait rarissime, la mairie de Lyon compte 11 % de travailleurs en situation de handicap parmi ses 80 apprentis (lire p. 25). « C’est une démarche répondant à des besoins identifiés par notre GPEC, afin de recruter des profils spécifiques sur des remplacements ou des postes vacants », précise Rachel Klingelschmidt, responsable de la mission management et accompagnement des cadres de la ville.

Reste que les politiques d’alternance menées par les entreprises et les collectivités risquent d’évoluer du fait des changements apportés par la loi Travail (lire p. 22) et de la nouvelle régionalisation.

Enfin, la question de la fusion des deux contrats reste entièrement posée. Sujet extrêmement épineux, mais central en termes de choix stratégique sur l’alternance. « Les entreprises le désirent », assure Céline Delort, dirigeante du cabinet Alithia, qui pratique l’externalisation de la gestion de ces contrats. D’autres ajoutent que les jeunes et les parents le souhaitent aussi. Nombre d’Opca-Octa également. Les CCI et l’Éducation nationale peut-être beaucoup moins. Le sujet rebondira certainement en 2017 au lendemain de l’élection présidentielle.

Un quart d’apprentis en plus dans la fonction publique

En septembre, l’État recrutera 10 000 apprentis de 16 à 25 ans de tous niveaux, sur toute la France. De nombreux secteurs professionnels sont ouverts : informatique, juridique, éducation, sécurité, restauration, administration générale, métiers d’art, communication, maintenance, exploitation, urbanisme… Toutes les offres d’apprentissage sont sur www.biep.fonction-publique.gouv.fr

En 2015, la Fonction publique a enregistré 10 700 nouveaux contrats d’apprentissage (+ 25 % par rapport à 2014), précise un rapport DGAFP-Dares* paru en juin dernier.

La fonction publique territoriale (FPT) reste le principal employeur des nouveaux apprentis avec 61 % des entrants en 2015, mais avec un recul de 9,8 % par rapport à 2014.

Dans la fonction publique d’État, le nombre de nouveaux contrats a quadruplé. Ils représentent cette année un tiers des nouveaux contrats l’apprentissage de la fonction publique.

Dans la fonction publique hospitalière (FPH), le nombre des nouveaux entrants est plutôt stable en 2015.

La part des femmes se rapproche des 50 %, avec une hausse dans la fonction publique d’État, où elle était plus faible, et une baisse dans la fonction publique territoriale et hospitalière, où elle était plus forte.

L’âge moyen des apprentis est stable dans la fonction publique d’État (21 ans) ; il se rapproche de 21 ans également dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière.

Près de la moitié des diplômes préparés relèvent de l’enseignement supérieur, proportion en hausse de 8 points du fait de l’augmentation des recrutements dans la fonction publique d’État ; Les diplômes inférieurs au bac représentent 1/3 des contrats (-11 points). Dans la fonction publique d’État, la croissance du nombre de nouveaux contrats favorise particulièrement la préparation de diplômes niveau bac et bac + 2.

Les durées de contrat sont stables dans la FPT et la FPH ; la part des contrats de deux années scolaires augmente nettement dans la fonction publique d’État.

La part des contrats concernant des étudiants en situation de handicap augmente de 0,9 point en 2015, comme en 2014, pour atteindre 4,7 %.

Un Erasmus pour les apprentis ?

Les 20 et 21 septembre, à Bruxelles, un projet pour porter de façon expérimentale une forme d’Erasmus de l’alternance – et peut-être créer un nouveau programme européen – est lancé par l’Association pour la mobilité longue des apprentis en Europe, dont le président est Antoine Godbert, ancien directeur de l’agence Erasmus + France. « L’année prochaine, nous fêterons le trentième anniversaire d’Erasmus, et les résultats ont toujours été très positifs, explique-t-il. Mais aujourd’hui, les mobilités d’apprentis ne bénéficient pas suffisamment de promotion. »

Ce projet a débuté voici dix-huit mois et rassemble 33 centres de formation professionnelle, de France (majoritaires, 16 centres), d’Allemagne (2), de Croatie (1), du Danemark (1), d’Espagne (2), de Finlande (2), de Hongrie (2), d’Italie (3), de Pays-Bas (1), de Portugal (1), de Roumanie (1) et de Slovaquie (1).

Cette expérimentation devrait débuter dès l’automne prochain, avec les départs dans un autre pays de 150 apprentis pour des périodes de six à douze mois de mobilité. Une deuxième rentrée est prévue en 2017. L’association espère continuer au moins jusqu’à la fin de la période de programmation européenne 2014-2020.

L’association devrait recevoir un financement de 786 000 euros pour couvrir les dix-huit premiers mois de l’expérimentation ; utilisés exclusivement pour l’ingénierie pédagogique, la préparation linguistique, et éventuellement pour combler les déficits de certains pays en termes de couverture sociale.

Chaque centre de formation qui va accueillir un jeune va en effet devoir construire des modules de mise à niveau linguistique avant le démarrage de la formation. L’initiative est particulièrement tournée vers les niveaux V, IV et III, mais s’adresse à tous les apprentis. En l’absence d’un contrat de droit européen, les partenaires vont utiliser tous les dispositifs d’apprentissage qui existent dans les pays. Ces parcours seront validés, même si tout reste à faire sur l’objectif d’obtenir des doubles ou triples reconnaissances.

(1) Chiffres issus du “Tableau de bord des politiques françaises” (avril 2016), et de l’étude Dares n° 44 de septembre 2016 intitulée “L’apprentissage en 2015  : nette reprise dans les entreprises de moins de 10 salariés et dans le secteur public”.

* www.fonction-publique.gouv.fr/nouveaux-apprentis-dans-la-fonction-publique-2015

Auteur

  • L. G.