PRÈS DE DEUX ANS APRÈS s’être associée à une démarche collective visant à améliorer performance industrielle et conditions de travail des salariés, Briane Environnement, PME de recyclage située dans le Tarn, en mesure les résultats. Les accidents du travail ont diminué et les impacts sur la santé sont maintenant pris en compte lors des projets d’investissement industriels.
Spécialisée dans le recyclage et la valorisation de verres et de métaux, Briane Environnement (38 salariés) a été reprise en 2012 par la fille du fondateur, Sandra Cot. Elle souhaite moderniser l’une des infrastructures, en sous-capacité de production et à l’origine de plusieurs accidents du travail. La proposition de son conseiller de la chambre de commerce et d’industrie de Midi-Pyrénées, en 2014, d’intégrer la démarche Diapason (lire l’encadré) tombe à pic. Largement subventionné par les pouvoirs publics, ce dispositif se veut une alternative à certaines démarches lean qui ont permis des gains de productivité rapides mais qui ont généré ensuite des dysfonctionnements et ont un impact sur la santé des salariés.
La chaîne de production qu’il faut moderniser fabrique du verre broyé destiné à des produits industriels (laine de verre, produits abrasifs…) à forte valeur ajoutée. Or elle n’arrive pas à répondre à toutes les commandes à cause de nombreux arrêts. Le diagnostic, posé par les deux experts Diapason, un consultant en performance et un ergonome, établit un lien manifeste entre les problèmes de sécurité et la sous-performance industrielle : « Il y avait peu de maintenance préventive, car la ligne tournait en 3 x 8. Les pannes étaient donc fréquentes, mais comme la ligne de production était un outil maison, adapté au fil du temps et pas du tout sécurisé, l’équipe maintenance avait tendance à limiter ses interventions parce que la ligne était dangereuse. De fait, les accidents du travail touchaient essentiellement les salariés de la maintenance », explique François Rigal, ergonome, intervenant dans la démarche Diapason.
Un plan d’actions est établi avec le consultant « performance » Jean-Philippe Lascombes, en concertation avec la dirigeante de Briane et le responsable de production, et mis en œuvre progressivement. Les équipements les plus dangereux sont protégés par des dispositifs de sécurité. Des éléments sont ajoutés pour faciliter l’accès à certaines machines. L’organisation de la production est rationalisée, l’entreprise se dote d’un outil de planification de la maintenance pour ordonnancer les actions correctives et préventives.
Près de deux ans après, l’entreprise a énormément progressé sur l’aspect sécurité. Cinq accidents du travail ont été enregistrés en 2015 contre 12 auparavant, et ils sont nettement moins graves. Chaque accident fait l’objet d’une analyse pour trouver des axes d’amélioration afin qu’il ne se reproduise pas. L’entreprise vient d’embaucher, à l’issue d’un contrat de professionnalisation, une responsable sécurité. « Cette démarche a permis de faire évoluer les mentalités et de développer une culture managériale plus attentive à la sécurité et aux conditions de travail. Par exemple, nous sommes aujourd’hui en train de revoir les installations de retraitement du verre ménager. Automatiquement, le responsable de la maintenance prend en compte la partie humaine dans le process », souligne Sandra Cot.
Côté experts, l’intervention en binôme complémentaire était une première et a porté ses fruits. Certes, « la notion de performance est incluse dans le modèle de l’intervention de l’ergonome », précise François Rigal mais, selon lui, un consultant classique a souvent davantage d’arguments clés pour convaincre. De son côté, Jean-Philippe Lascombes a chiffré pour l’entreprise le manque à gagner des arrêts de ligne dûs aux problèmes de sécurité. Le consultant, dirigeant du cabinet Opérative, reconnaît l’intérêt du regard de l’ergonome : « Aujourd’hui, mes pratiques sont enrichies de réflexes que je n’avais pas auparavant. Par exemple, le fait d’adapter la temporalité du projet en dimensionnant autrement les étapes d’apprentissage des nouvelles méthodes – moins de rapidité, plus d’interaction avec les parties prenantes. En effet, on ne peut pas se dédouaner de la dimension psychosociale dès lors que l’on se place dans une optique de performance durable. »
Le dispositif Diapason est une initiative conjointe de la Direccte, de la Carsat, de l’Aract et de la CCI Midi-Pyrénées. Pendant dix-huit mois, d’octobre 2014 à avril 2016, huit PME industrielles ont bénéficié d’un accompagnement humain et financier pour mettre en œuvre un projet associant amélioration de la performance (en termes de production, de qualité, de délais) et amélioration des conditions de travail des salariés. Le dispositif alterne temps individuels de 10 à 16 jours de conseil personnalisé en entreprises par un binôme d’experts sur les deux domaines (performance et conditions de travail, santé), des temps collectifs communs aux huit entreprises comprenant des séminaires d’échanges d’expérience et deux ateliers de formation à destination des dirigeants. « Dans Diapason, la combinaison d’expertises permet de trouver plus efficacement et rapidement de nouvelles organisations de la production et du travail, qui améliorent durablement la performance globale de l’entreprise et installent des démarches d’amélioration continue pérennes », explique Carine Belin, chargée de mission à l’Aract Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon. L’opération, dont le montant total s’élève à 200 000 euros, a été financée par le Fact (Fonds d’amélioration des conditions de travail) à hauteur de 120 000 euros, par la Carsat et la Direccte. Le reste à charge pour chaque entreprise était de 1 500 euros. Un colloque fera le bilan de Diapason le 6 octobre 2016, à Toulouse.
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