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Numérique : Quelles règles d’équipe pour la messagerie ?

Les clés | publié le : 19.07.2016 | Rozenn Le Saint

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Numérique : Quelles règles d’équipe pour la messagerie ?

Crédit photo Rozenn Le Saint

Mieux paramétrer sa boîte e-mail en privilégiant quelques interlocuteurs et s’astreindre à des plages horaires pour gérer ses courriels évitent de s’éparpiller et de perdre en productivité. Au manager de fixer un cadre.

Un lundi matin, Beth Dawson a trouvé 300 e-mails non lus en arrivant au bureau. Cette directrice de projets RSE chez Orange s’est dit que ça n’était plus possible. Elle s’est attelée à un sacré chantier : paramétrer sa messagerie électronique et changer les usages dans son service. D’abord, elle s’est désabonnée de toutes les newsletters et mailing lists auxquelles elle s’était inscrite auparavant, mais qui ne l’intéressaient plus. « Un tri régulier, au gré des changements de missions et un nouveau paramétrage de sa boîte e-mail tous les deux ou trois mois est nécessaire », recommande d’ailleurs Caroline Sauvajol-Rialland, coach et fondatrice de So Comment, cabinet de conseil en gestion de l’information.

La cadre d’Orange s’est ensuite libérée de la fenêtre pop-up qui s’affiche avec une sonnerie à la réception du moindre message. « J’étais tenté de regarder le message immédiatement au lieu de rester concentrée sur ce que je faisais », témoigne Beth Dawson. Puis elle s’est imposée des plages horaires pour traiter ses courriels. « Au début, je le faisais tôt le matin puis en début d’après-midi, mais je me suis rendu compte que je recevais des e-mails importants, voire urgents, en début de matinée, quand les gens arrivent au bureau », témoigne-t-elle. À présent, elle les regarde de 10 heures à 11 heures, puis après la pause déjeuner et enfin, le soir, rapidement, une fois rentrée chez elle.

Bien sûr, elle a dû prévenir sa hiérarchie et ses collaborateurs de son nouveau fonctionnement. « Certains ont été surpris, mais, quand je travaillais en Angleterre, la culture y était très différente. Envoyer un e-mail à un collaborateur du même open space était vraiment mal vu. En France, il faut que tout soit tracé, avec bien souvent le chef en copie, ce qui signifie : « J’espère que tu vas le faire puisque le chef est au courant », se souvient celle qui est également maître de conférence en communication digitale à l’Iscom et à HEC. C’est souvent le piège des boucles d’e-mails avec 20 personnes en copie, qui ne savent pas si elles sont censées répondre ou non.

Si le manager donne les règles en exigeant d’être mis en copie uniquement quand cela s’avère nécessaire, il freine la spirale inflationniste. Par ailleurs, « les gens se permettent parfois des mises en cause de collègues par écrit qu’ils ne s’autoriseraient pas à l’oral. Au manager de fixer directement les limites en proposant de mettre le sujet à l’ordre du jour de la prochaine réunion, cela réduit de moitié les e-mails reçus dans le service », assure Caroline Sauvajol-Rialland. À lui aussi de mettre fin à la flambée de messages à l’arrivée d’un nouveau venu dans une équipe, par exemple, qui répond plus vite que son ombre aux courriels et incite les autres à surenchérir en rapidité.

Chartes du bon usage

Pour une meilleure efficacité de l’ensemble des collaborateurs, tous les coachs s’accordent à dire qu’adopter des règles collectives, via des chartes notamment, est important. Les chartes du bon usage du numérique représentent un outil clé du manager. D’abord parce que, symboliquement, elles déculpabilisent les stressés de la messagerie en écrivant noir sur blanc qu’en dehors des horaires habituels de travail, on n’est pas censé répondre aux e-mails, comme dans la charte de La Poste. Ou qu’il vaut mieux privilégier l’envoi différé du message si on travaille tard le soir, pour ne pas angoisser ceux qui le reçoivent. La charte communicationnelle peut également proposer des outils d’homogénéisation des pratiques, pour que tout le monde soit sur la même longueur d’onde, comme le fait d’aider à prioriser le traitement via l’objet du message (lire les conseils du coach). Si tout le monde joue le jeu, chacun y gagne.

Pour limiter les courriels, la mise en place d’un forum ou d’outils collaboratifs est également efficace. Cela a fait gagner un temps considérable à la direction marketing d’Eclor : « Nous échangions des fichiers avec des versions amendées sans véritablement savoir quelle était la dernière retenue et finalisée. En revenant de congé ou de RTT, on pouvait se perdre et ne plus savoir dans quel e-mail trouver la bonne version », témoigne Bruno Chelet, DRH de l’entreprise leader du cidre. Les managers sont également incités à donner des consignes simples : « Si on a quelque chose à dire à son voisin, évitons d’utiliser les e-mails pour un oui ou pour un non, nous sommes seulement 80 au siège », rappelle-t-il.

Et pour éviter les 1 500 messages non lus au retour de vacances, il faut bien sûr anticiper avec un message d’absence qui renvoie à un collègue en cas d’urgence. À moins que l’entreprise n’adopte une mesure radicale, à l’instar du constructeur allemand Daimler : après avertissement de l’expéditeur par retour automatique, l’e-mail est tout simplement détruit.

Les conseils du coach

Caroline Sauvajol-Rialland

Fondatrice de So Comment, cabinet conseil en gestion de l’information*

–1– Cibler cinq interlocuteurs clés

Vous pouvez paramétrer votre messagerie pour autoriser seulement cinq personnes – manager direct, chef de projet, client, etc. – à “vous déranger”, en fonction des missions en cours et de vos projets professionnels : si vous venez d’arriver, mieux vaut répondre rapidement aux sollicitations de votre n + 1. Quand ces interlocuteurs privilégiés vous envoient un courriel, il apparaît d’une couleur distincte ou avec une sonnerie.

–2– Ne pas traiter ses e-mails tout au long de la journée

Pour les autres, ne traitez pas vos courriels au fil de l’eau, car le temps nécessaire pour se reconcentrer sur une tâche laissée en friche à l’arrivée d’un message est considérable : vous perdez en productivité. Bien souvent, la réponse peut attendre. Fixez-vous des plages horaires pour vous en occuper : une heure en arrivant le matin, une heure vers midi et une heure en fin d’après-midi, par exemple.

–3– Inclure dans l’objet du courriel votre objectif de communication

La méthode, une fois généralisée dans le service, voire l’entreprise, offre un gain de temps considérable. Précisez dans l’objet du mail “AR” pour action requise avec le thème, par exemple : « AR : report de la réunion ». “RR” pour réponse requise, “LR” pour lecture requise simplement et “PI” pour votre information. Cela facilite le tri et vous aide à mettre des priorités sur le traitement des courriels.

* Professeure à Science Po, auteure d’Infobésité. Comprendre et maîtriser la déferlante d’informations (Éditions Vuibert, 2013).

Auteur

  • Rozenn Le Saint