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Sur le terrain

Retour sur… L’accompagnement de la fermeture du site d’Alcatel-Lucent à Ormes

Sur le terrain | publié le : 05.07.2016 | Virginie Leblanc

En janvier 2014, à l’occasion de la fermeture d’un de ses sites, Alcatel-Lucent a constitué des groupes de discussion avec les salariés afin de prendre en compte leurs attentes dans le cadre d’une mobilité géographique. Les syndicats n’ont pas souhaité s’associer à cette démarche.

Comment concilier restructuration et qualité de vie au travail ? C’est la question que s’est posée Alcatel-Lucent (racheté depuis par Nokia) en janvier 2014, au moment de la fermeture du site d’Ormes*, rattaché administrativement à la région parisienne mais situé en banlieue d’Orléans. Il s’agissait alors d’organiser le transfert des salariés vers le site de Nozay-Paris-Saclay (Essonne, 4 500 salariés), avec l’objectif de « préserver au mieux la qualité de vie des collaborateurs, expose Pierre Touchet, ingénieur santé sécurité au travail. Sans rester dans la prévention tertiaire, mais en s’orientant vers la prévention primaire ».

Peggy Morel, chef de projet, représentant la direction, a été chargée d’organiser l’accompagnement du changement dans cette perspective. Pour les salariés acceptant cette mobilité géographique, le projet s’est déroulé par étapes afin que chacun puisse se projeter et s’adapter à ces bouleversements. « Nous avons misé sur la communication autour du nouvel environnement de travail, explique Peggy Morel. Nous avons notamment organisé un système de managers référents, car certains travaillaient en site distant et n’avaient pas forcément de manager de proximité. En parallèle, nous avons mis en place des comités de site réunissant managers, équipes, chefs de projets et direction, pour partager sur ce qui se passait. »

Groupes de travail

Concrètement, sur la base du volontariat, le manager référent du comité de site avait pour mission d’animer un groupe de discussion de son choix et en était le rapporteur.

Quatre groupes de travail ont ainsi été constitués autour des questions qui remontaient le plus souvent. À commencer par le télétravail, sujet déjà bien intégré en région parisienne, mais moins dans les sites régionaux. « Il était donc important de pouvoir l’expérimenter, ce qui a été réalisé entre mars et décembre 2014 », souligne Peggy Morel. Le deuxième groupe a traité de la mobilité géographique et des déménagements, avec l’intervention de l’assistante sociale de l’entreprise. Le troisième groupe s’est occupé de la mise à disposition de navettes pour ceux qui ne voulaient pas changer de résidence. Enfin, le quatrième a abordé la question du système de covoiturage, afin d’effectuer les 100 kilomètres séparant les deux sites.

Les conclusions des groupes de discussion ont été restituées aux salariés, aux organisations syndicales et à la direction. « Nous avons élaboré une grille de référence pour suivre la santé psychique des collaborateurs, utilisable par les managers individuellement ou collectivement en réunion. Il faut pouvoir aborder les points irritants du travail. Nous ne souhaitions pas censurer de sujets », assure Pierre Touchet.

Les idées d’accompagnement émises par les groupes de discussion ont rejoint celles portées par les syndicats dans le cadre de la procédure d’information-consultation du projet. Le transport en navette, plébiscité par les salariés, a été mis en place ainsi que de nombreuses mesures d’accompagnement qui répondaient à leurs attentes. Ce que confirme Laurent Delorme, secrétaire du CHSCT du site de Nozay : « Des mesures ont en effet été obtenues par la négociation. Mais les syndicats n’ont pas vraiment été associés aux groupes de discussion. Le climat social sur le site d’Ormes était assez tendu entre la direction et les élus du personnel. Nous avions déjà mandaté un expert, qui avait analysé le projet de réorganisation, nous ne voyions pas l’intérêt de créer ces groupes en plus. Nous avons donc refusé d’y participer. »

Six semaines de réflexion

En juillet 2014, les salariés concernés se sont vu officiellement proposer la mobilité ; ils avaient alors six semaines pour l’accepter ou la refuser. Sur la centaine de salariés concernés, seuls une dizaine, qui pour la plupart avaient des projets externes, ont décidé de refuser cette mobilité.

En septembre-octobre, « nous avons ouvert les tiers lieux de travail et de coworking, prévus pour une période définie afin de permettre une transition en douceur », indique Pierre Touchet. Les salariés avaient la possibilité de travailler une journée sur le site de Nozay-Paris-Saclay, deux jours en télétravail et deux jours en tiers-lieu à Orléans. Cette solution transitoire a fonctionné de décembre 2014 jusqu’au 1er octobre 2015. Les salariés sont ensuite passés à trois jours de télétravail et deux jours sur le nouveau site, entre le 1er octobre 2015 et le 1er avril 2016. Depuis, ils sont passés à deux jours de télétravail et trois jours sur site, comme l’ensemble des salariés français.

Appréhender les espaces de travail

« Pendant toute cette période, les managers ont également été accompagnés pour qu’ils puissent mieux appréhender les nouveaux espaces de travail collaboratifs et la gestion d’équipe à distance. Ils ont notamment bénéficié du support d’un ergonome », indique Peggy Morel.

L’expérience est-elle duplicable ? « Les grands principes comme les espaces de discussion et les méthodes d’accompagnement le sont, répond la chef de projet. Pour autant, chaque projet est unique, et il est donc essentiel d’être à l’écoute des salariés pour pouvoir les accompagner efficacement dans la transformation. »

En 2016, à la suite du rachat d’Alcatel-Lucent par Nokia, « une nouvelle procédure de PSE a été enclenchée et les mobilités imposées vont continuer, regrette Laurent Delorme. L’information-consultation sera close début septembre. Et la clôture du plan, qui concerne 411 salariés, est prévue fin 2017. »

* Le groupe avait annoncé fin 2013 plusieurs fermetures de sites et un plan de restructuration entraînant 900 suppressions de postes, réduites à 595 en 2014.

Auteur

  • Virginie Leblanc