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Pays-Bas : La poste épinglée pour ses livreurs “independants”

Sur le terrain | International | publié le : 28.06.2016 | Didier Burg

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Pays-Bas : La poste épinglée pour ses livreurs “independants”

Crédit photo Didier Burg

Outre les menaces de sanction de l’inspection du travail pour l’absence de respect des normes sectorielles de santé-sécurité au travail, un “trafic” de livreurs a été mis au jour chez PostNL. L’entreprise privilégie de nouveau les CDI.

Propre à figurer dans les annales de la gestion des RH, la politique de recrutement de travailleurs flexibles de PostNL est l’exemple à ne pas suivre. L’entreprise postale néerlandaise, désormais privatisée, est pointée du doigt pour avoir fait appel à des livreurs extérieurs sans contrat de travail, payés à la tâche, pour acheminer ses paquets à leurs destinataires, à la manière d’Amazon aux États-Unis, avec ses livreurs à la demande.

Symptomatiques de l’“ubérisation” du marché de l’emploi aux Pays-Bas, les méthodes de PostNL sont battues en brèche par l’inspection du travail et par les syndicats. Si, en France, l’Urssaf réclame des arriérés de cotisations sociales à Uber, PostNL est mis en cause à d’autres titres : non-respect des règles de sécurité, paiement inférieur au smic ; les griefs à l’encontre de ces emplois flexibles ont fini par s’accumuler sur le bureau de l’inspection du travail.

Pour commencer, l’administration estime que « ces livreurs ne sont pas des travailleurs indépendants, contrairement à ce que PostNL a longtemps prétendu ». Selon elle, il existe bien un lien de subordination entre l’entreprise et ces livreurs chargés d’acheminer les paquets qu’elle a elle-même reçus. « PostNL ne peut donc s’affranchir des règles en matière de sécurité », étaye l’inspection du travail, constatant que « les livreurs manipulent des objets d’un poids excédant les normes fixées pour les salariés de ce secteur ». Les menaces d’amendes ont fini par faire plier PostNL. Il n’a fallu que quelques mois à l’entreprise pour changer son fusil d’épaule après la divulgation de ces “bisbilles” avec l’inspection du travail. À l’avenir, tous ses livreurs disposeront d’un CDI.

Perte de contrôle

« Outre les problèmes juridiques, la direction de PostNL a pris conscience que cette situation lui faisait perdre le contrôle d’une partie de son réseau logistique », rapporte Reinier Stroo, représentant du syndicat FNV en charge de ce dossier. PostNL n’avait plus une connaissance parfaite des manutentionnaires venant charger des colis, ni de leurs trajets pour les acheminer.

« Les parcours ont fini par s’échanger sur Internet, ces travailleurs indépendants se les rétrocédant aux uns et aux autres », rapporte le représentant du FNV. Dans cette nébuleuse de livreurs, PostNL a eu affaire sans le savoir à des centaines de jeunes Turcs recourant tantôt à leurs frères, neveux ou oncles pour exécuter ses plannings de livraison. « L’entreprise ne savait plus qui se trouvait dans les camionnettes pour transporter les paquets de ses propres clients », précise Reinier Stroo.

De son côté, PostNL argue des nouvelles exigences des clients. pour justifier son revirement : « Les plages horaires de livraison doivent aujourd’hui être précises. Les livraisons durant les week-ends sont devenues monnaie courante. De plus, les clients attendent des services, comme par exemple l’installation d’un réfrigérateur lors de sa livraison », explique l’entreprise. Autant d’exigences que PostNL ne pouvait imposer à des entrepreneurs individuels ayant leur « propre manière de travailler ». « En tant qu’employeur direct de salariés ayant un CDI, PostNL dispose de davantage de liberté », souligne-t-on au siège de l’entreprise.

Reste qu’après une enquête de longue haleine, l’inspection du travail devrait rester intransigeante. « L’ensemble du secteur de la livraison a été l’objet de contrôles in situ. Les infractions et les manquements sont nombreux au sein de pratiquement chaque entreprise, qu’il s’agisse d’efforts physiques trop intenses vu l’augmentation du nombre de paquets à manipuler, de leur poids et l’absence d’équipements pour les déplacer. De plus, avec la hausse des volumes provenant des achats sur Internet, les horaires de travail ont augmenté », selon les constatations du responsable syndical. Avec la branche logistique, les secteurs de la construction, des transports et des soins à domicile sont ceux qui connaissent le plus grand nombre de travailleurs flexibles dits « indépendants » aux Pays-Bas.

Dans les médias

NRC HANDELSBLAD. Emploi en hausse

Quelque 200 000 nouveaux emplois sont attendus sur la période 2016-2017, selon les prévisions de l’UWV, l’équivalent de Pôle emploi aux Pays-Bas. La plupart d’entre eux seront créés dans les secteurs du travail temporaire, du bâtiment, des technologies de l’information, dans la restauration et le commerce de détail. À l’inverse, plus de 56 000 postes sont appelés à disparaître dans la branche des services financiers. Remis de la crise depuis 2015, le marché du travail néerlandais connaît aujourd’hui un nombre d’emplois supérieur à celui des années 2007-2008. 21 mai. NRC Handelsblad, quotidien.

FD. NL. De plus en plus d’emplois flexibles

Atteignant aujourd’hui 35 % du total des actifs, la part des emplois flexibles aux Pays-Bas a progressé de 6,25 % ces deux dernières années, indique le Bureau central des statistiques CBS. Celui-ci remarque que cette tendance provient entre autres de la préférence affichée des employeurs de recourir à des salariés temporaires. En regard, seul un actif sur cinq fait le choix délibéré de travailler hors CDI. Le pourcentage de travailleurs flexibles est le plus élevé parmi les jeunes actifs néerlandais âgés de moins de 25 ans. 17 juin. FD. nl, site Internet.

Auteur

  • Didier Burg