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L’enquête

La qualité de l’offre : « Une suspicion illégitime »

L’enquête | publié le : 31.05.2016 | L. G.

Perte de chiffre d’affaires en 2015, application du décret qualité par les Opca attendu au 1er janvier 2017 : les prestataires de formation n’ont pas la vie facile.

« De nombreux prestataires de formation sont sortis exsangues de 2015, et leurs banques analysent cette activité comme un marché à risque, affirme Didier Cozin, gérant de l’organisme AFTLV. Réduire le nombre d’organismes et en liquider 90 % pour ne garder que les plus gros est une erreur : il faut au contraire beaucoup d’intervenants pour assurer la proximité et former dans les millions de TPE françaises. » Pour lui, le décret qualité qui s’appliquera dès le 1er janvier 2017 n’est que l’expression d’une défiance infondée et généralisée envers les acteurs privés de la formation.

Une bureaucratie renforcée

Jean-Pierre Willems, spécialiste du droit de la formation, partage l’analyse : « Le marché de la formation subit toujours une suspicion illégitime, alors qu’il a connu une année très difficile : fermetures, rachats, baisse de chiffres d’affaires, réduction de périmètres d’activité, les indicateurs sont au rouge. Mais cet état de fait n’émeut guère les décideurs : État et partenaires sociaux notamment. Dès lors, la situation du marché est très peu prise en compte par les financeurs pour la gestion de leur relation. »

Et Jean-Pierre Willems de s’interroger sur la notion de « faire du ménage : on ne sait jamais lequel, ni comment ou pourquoi. Le marché demeure très méconnu par ces mêmes décideurs ou financeurs. La formation a besoin d’avoir un nombre élevé d’organismes, avec des capacités importantes d’investissement et d’innovation. Les dossiers à soumettre à la CNCP (Commission nationale de la certification professionnelle) pour créer des certifications et les procédures de contrôle accrues sous couvert de qualité ne font que renforcer la bureaucratie. Il faut distinguer dans la réglementation ce qui relève de la qualité et ce qui relève du contrôle, et éviter la confusion des deux notions et des deux missions des financeurs : la qualité est un objectif commun et non un outil de fermeture d’un marché très mobile. Le risque de centralisme bureaucratique est très élevé ».

Un avis partagé par Philippe Joffre, directeur général du cabinet Paradoxes : « Faire passer les Opca d’un rôle de financeur à un rôle d’acheteur ou de contrôle qualité, l’initiative est louable sur le papier. Mais il faut s’attendre à un déploiement dont la complexité fait craindre le pire. »

Face à cette question, Christophe Chollet, responsable des politiques de financement de la formation à Orange, reste serein : « Les obligations du décret qualité ne sont pas un sujet pour nous. Depuis très longtemps, nous achetons environ 45 millions d’euros sur le marché avec des systèmes qualité poussés : appels d’offres, cahiers des charges, RSE, lutte contre le travail dissimulé, évaluation à chaud et à froid… Tout ce qui est déjà dans le décret. »

Cette question du contrôle de la qualité devrait se préciser en juin avec une publication définitive des travaux des Opca.

Auteur

  • L. G.