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Canada : Le gouvernement élargit le recours aux saisonniers étrangers

Sur le terrain | International | publié le : 26.04.2016 | Ludovic Hirtzmann

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Canada : Le gouvernement élargit le recours aux saisonniers étrangers

Crédit photo Ludovic Hirtzmann

Le nouveau gouvernement libéral de Justin Trudeau autorise les travailleurs étrangers temporaires saisonniers à venir en nombre illimité au Canada pour satisfaire aux besoins de certaines industries en manque de main-d’œuvre à bas salaires. Une rupture avec la politique des conservateurs.

Tout a commencé par le lobbying des dirigeants d’industries de transformation de produits de la mer auprès du libéral Justin Trudeau, élu en octobre dernier. C’est que les 32 députés élus par les populations des provinces atlantiques, où sont situées ces usines, sont tous libéraux. Dès lors, ces industriels ont plaidé à Ottawa en faveur d’un recours facilité à la main-d’œuvre étrangère saisonnière et à ses bas salaires, pour ne pas être contrainte de jeter des crustacés, faute de personnel pour les traiter. Les règles fédérales en limitaient le recours à 20 % des effectifs.

Changement de cap depuis la mi-février. Les industries saisonnières peuvent, en vertu du Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), faire venir ces derniers en nombre illimité. Les étrangers doivent travailler au moins 30 heures par semaine, pas plus de 180 jours, et leurs salaires doivent être inférieurs au salaire médian de la province où il se trouvent. La mesure ne s’applique que jusqu’à la fin 2016, avant d’être évaluée.

Des secteurs exclus

Si les industriels de la pêche ont été favorisés, d’autres industries le sont moins. Selon le ministère de l’Emploi et du Développement social du Canada, sont exclus « les secteurs des services d’hébergement, de restauration et du commerce de détail (dans les provinces) où le taux de chômage est supérieur à 6 % ». Le sujet des visas PTET est si délicat que le gouvernement n’a pas fait d’annonce officielle de sa décision prise à la mi-février, car d’autres industries qui emploient des étrangers à bas salaires, mais pas de manière saisonnière, demandent le même traitement.

Ottawa a longtemps préféré les candidats à l’immigration permanente, avant de s’intéresser à une main-d’œuvre étrangère flexible, avec des visas à court terme pour coller aux besoins des entreprises. Dans les dix dernières années, le nombre des travailleurs temporaires mexicains, philippins et jamaïcains – et aussi français, au huitième rang – a été multiplié par trois, dépassant celui des immigrants permanents.

En juin 2014, le gouvernement conservateur avait réformé le PTET pour favoriser les offres d’emploi aux Canadiens. Ce programme doit être l’exception « utilisée en dernier ressort par les employeurs en l’absence de Canadiens qualifiés pour occuper les postes vacants », avait alors déclaré le ministre de l’Emploi et du Développement social, Jason Kenney. Il répondait à la levée de boucliers de l’opposition et de travailleurs canadiens, qui se plaignaient d’être discriminés à l’embauche face à des travailleurs philippins payés parfois illégalement trois fois moins que le salaire minimum. McDonald’s, la Banque Royale du Canada ont été pointés du doigt pour recruter de préférence des travailleurs étrangers temporaires, y compris en licenciant des Canadiens à cet effet.

Pour cet employeur d’origine française d’une PME montréalaise de marketing d’une quinzaine de personnes, « les travailleurs étrangers temporaires sont une main-d’œuvre idéale. Avant la réforme de 2014, nous avions toujours quatre ou cinq jeunes employés français. Ils étaient heureux de leur sort, et nous, nous savions que c’était une main-d’œuvre temporaire, bien formée et flexible, ce qui n’est pas toujours le cas des Canadiens ».

Le président de l’Association des pêcheurs de l’île-du-Prince-Édouard, Craig Avery, va dans ce sens. « Il est difficile de faire bouger les gens jusqu’à l’île-du-Prince-Édouard pour 12 dollars de l’heure pendant 10 ou 12 semaines dans une usine de pêcheries », a-t-il confié récemment au quotidien The Globe and Mail. Faux, répond dans le quotidien Acadie Nouvelle le porte-parole du syndicat des métallos du Nouveau-Brunswick, Gary White, qui représente les travailleurs des usines de transformation : « [Les employeurs] doivent payer un billet d’avion aller-retour [aux travailleurs étrangers]. S’ils mettaient plutôt cet argent dans les salaires, ils n’auraient probablement pas de problème de manque de main-d’œuvre. » Il conclut : « Il n’y a pas une grande volonté d’améliorer le sort des travailleurs canadiens. »

Dans les médias

RADIO-CANADA. L’industrie pharmaceutique montréalaise s’étiole

Les laboratoires de recherche de l’industrie pharmaceutique montréalaise ont longtemps été l’un des pôles d’excellence du pays, avant de fortement décliner ces dix dernières années. Les investissements en recherche ont été divisés par deux. Les grandes entreprises pharmaceutiques ont licencié plus de 700 personnes ces dernières années pour délocaliser en Inde ou en Chine. Et ce, après avoir touché des subventions gouvernementales pendant longtemps. Radio-Canada, 18 avril 2016. Site web de la radio-télévision publique : www.radio-canada.ca

Auteur

  • Ludovic Hirtzmann