Plus de mille contributions récoltées en deux mois : la démarche d’innovation collaborative que Kiabi a lancée à l’automne 2015 a porté ses fruits. « Le succès de l’opération tient à la libération de l’entreprise entamée depuis quelques années, qui vise à mettre le niveau d’initiative et de responsabilisation au plus près de l’action, analyse Anne Herlax, responsable de la communication interne et corporate, rattachée aux services RH du fabricant et distributeur de produits textiles.

« Il y a cinq ans, cela n’aurait pas été possible, poursuit-elle. Notre organisation était trop en silos, chacun restait sur son périmètre. Depuis, nous avons appris à travailler en mode projet avec des équipes transversales. Et nous nous sommes aperçus que les collaborateurs avaient beaucoup d’appétence pour l’innovation. » Ainsi a vu le jour un concours interne invitant les 8 200 collaborateurs de la firme nordiste à déposer leurs idées sur une plate-forme digitale baptisée Innovation Play, un outil conçu par l’équipe chargée de l’innovation avec la solution IDhall de l’éditeur Humanperf.

Proposées par un seul salarié ou par une équipe, les suggestions devaient obligatoirement concerner un produit innovant, ou bien des services aux clients ou aux collaborateurs. Pour favoriser l’émulation et susciter la créativité, des sessions de brainstorming étaient également organisées partout dans l’entreprise, aussi bien au siège que dans les 455 magasins.

Au-delà de la récompense promise à l’idée jugée la plus pertinente (un voyage), l’employeur s’engageait surtout à structurer les principales propositions collectées et à accompagner les collaborateurs dans la formalisation et le prototypage de leurs projets. « Il faut plusieurs têtes et de nombreuses compétences pour passer de la simple idée au projet », souligne Jean-Michel Gosselin, en charge des équipes projet de Kiabi. Chaque idée tenait en quelques lignes. L’une d’elle proposait de remplacer les mannequins en magasin par des hologrammes, une autre proposait d’utiliser la puce RFID des étiquettes comme GPS de rangement en magasin, une troisième proposait des tee-shirts aux motifs changeant selon l’humeur…

Un jury pluridisciplinaire composé de onze salariés, issus de différents pays et représentant les différents métiers de l’entreprise, a présélectionné 40 idées pour finalement en retenir 6, qui ont fait l’objet d’une véritable phase d’incubation : réunis trois jours durant à l’espace dédié à l’innovation de l’Université catholique de Lille, les promoteurs des idées retenues ont été guidés par des experts internes (par exemple des ingénieurs textile) et des universitaires pour affiner leur projet et son degré de faisabilité technique et économique.

Au total, chaque projet a bénéficié de vingt jours d’accompagnement pour son prototypage. Deux idées ont finalement été récompensées, qui seront prochainement mises en œuvre par l’entreprise.

Cette volonté de libérer les énergies créatrices n’a pas pour autant fait rentrer l’innovation dans les critères d’évaluation des salariés ni dans les objectifs des managers. Dans le cadre d’Innovation Play, chacun devait gérer ses priorités et plancher sur ses idées une fois son travail fait… « Certains ont renoncé, car ils estimaient que cela leur prenait trop de temps. Mais d’autres ont été invités à poursuivre leur démarche par leur manager qui leur a libéré du temps ou réorganisé leur travail », détaille Anne Herlax.

Reste à pérenniser la démarche. « Ce concours nous a aussi permis d’apprendre en construisant de nouveaux outils et en bâtissant notre logique de gouvernance et d’accompagnement de l’innovation, indique Jean-Michel Gosselin. Désormais, nous travaillons à l’installation durable de cette plate-forme pour que la démarche d’innovation collaborative devienne permanente. »