logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les clés

Gérer des collaborateurs proches de la retraite

Les clés | publié le : 22.03.2016 | Éric Delon

Image

Gérer des collaborateurs proches de la retraite

Crédit photo Éric Delon

Motivation. Pour éviter des phénomènes de démotivation préjudiciables à l’ensemble des équipes, il est nécessaire d’accompagner les salariés concernés par un départ à la retraite, en rassurant, en motivant et en capitalisant sur leur savoir-faire. Beaucoup dépend de l’entreprise, mais le manager a un rôle non négligeable.

Florissante SSII (2 000 collaborateurs) basée à Levallois-Perret (92), le groupe Umanis a signé en septembre 2015 un contrat de génération. L’entreprise s’engage ainsi à mener des actions spécifiques pour l’insertion des jeunes en CDI, l’embauche et le maintien des salariés âgés et le transfert des compétences. « Nous souhaitons, par ce biais, maintenir la flamme de nos collaborateurs proches de la retraite, explique Jennifer Punda, directrice des projets RH et responsable du développement des talents de l’entreprise. Nous avons pour objectif de les faire évoluer en leur confiant des responsabilités en phase avec leurs compétences, que ce soit en termes de savoir-faire ou de savoir-être. » Outre des entretiens de seconde partie de carrière (dès 45 ans) pour sonder leurs envies, l’entreprise propose également des bilans de compétences, des bilans retraite (reconstitution des parcours et carrières, information sur l’évolution de la législation) ainsi que des formations “préparation retraite”.

Binômes

Par ailleurs, sur la base du volontariat, l’entreprise a mis en place des binômes jeunes/collaborateurs expérimentés afin qu’ils partagent leurs compétences. « Nos collaborateurs seniors transmettent leurs compétences acquises au cours de leurs diverses expériences, alors que les jeunes arrivés partagent des connaissances obtenues lors de leurs études : nouvelles technologies, nouvelles pratiques, nouveaux apports théoriques », note Jennifer Punda. Benoit Corneillet, directeur énergie-industrie de l’entreprise, est un manager convaincu : « Gérer des collaborateurs proches de la retraite nécessite une attention toute particulière pour rassurer, informer, motiver et capitaliser sur les savoir-faire. Cela n’est possible qu’à travers un management de proximité et le développement d’une relation de confiance. »

Si la loi de mai 2009 rend obligatoire la mise en place d’un “plan seniors” (pour les entreprises de plus de 50 salariés), certaines entreprises, au-delà de cette obligation, se rapprochent de leurs collaborateurs proches de la retraite afin de connaître précisément les dates de départ de ces derniers pour mieux organiser l’avenir, grâce, notamment, à la mise en place d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC).

Autre dispositif utilisé : la préparation à la retraite. Selon le sociologue Serge Guérin, professeur à l’Inseec, cet accompagnement permet aux salariés de faire face à tous les bouleversements que va entraîner la retraite (financier, relationnel, psychologique) et évite ainsi une sorte de fracture sociale liée au départ. « Il s’agit d’un signal adressé aux autres salariés de l’entreprise : montrer que le management est humain. Un collaborateur retraité heureux représente un bon vecteur de l’image de l’entreprise », explique-t-il.

Temps partiel et mobilité interne

Au sein de l’équipementier allemand Mann+Hummel, basé à Laval (600 salariés), dont 8 % de l’effectif a plus de 55 ans, outre la mise en place de temps partiels (80 %, payé 100 %) pour les salariés proches de la retraite, les managers sont invités, dans le cadre du plan seniors, à favoriser la mobilité interne pour les plus de 55 ans. « Nous n’avons pas la possibilité d’accéder aux demandes de promotion de chacun, d’autant que l’entreprise connaît peu de turnover. En revanche, nous avons prévu une clause dans leur contrat pour qu’ils puissent retrouver leur poste précédent s’ils échouent dans leurs nouvelles missions », explique Bruno Langer, le directeur général France.

Par ailleurs, pour faire face à la pénurie de certains métiers dans la plasturgie, comme celui de régleurs par exemple, les salariés de l’entreprise proches de la retraite sont incités à transmettre leurs savoir-faire aux jeunes recrues. « Il n’est pas rare que certains de nos salariés qui travaillent depuis de nombreuses années dans l’entreprise viennent nous voir pour négocier un départ anticipé. Nous y accédons au cas par cas, explique Bruno Langer. Par ailleurs, l’entreprise prend en charge systématiquement le pot de départ du collaborateur qui part à la retraite. Nous avons instauré un jubilé pour les gens qui ont 40 ans de présence dans l’entreprise. Ces derniers touchent une prime, et nous organisons un déjeuner avec l’intéressé. C’est très apprécié. »

« Si les enjeux de carrière et de rémunération des collaborateurs proches de la retraite sont derrière lui, ce n’est pas le cas de ses réalisations, analyse la coach Isabelle Rey-Millet. La motivation peut être trouvée par le sens, l’utilité. C’est de savoir qu’il contribue à un projet bénéficiant à tous, que le rôle du collaborateur est majeur, que son expertise et son expérience seront reconnues. D’où la pertinence de programmes de capitalisation du savoir, de partage de bonnes pratiques et de modélisation des méthodes. »

Les conseils du coach

Mickaël Hoffmann-Herve

Président de HR Consultancy Partners (Randstad)

1

Identifier en amont le degré de motivation des collaborateurs

Parmi les collaborateurs proches de la retraite, les motivations sont loin de se ressembler. Ceux qui ont commencé tôt leur carrière ou ont effectué des tâches pénibles comptent souvent les jours qui les rapprochent de leur retraite. Certains ne s’en sont pas préoccupés, même s’ils ont reçu, à 55 ans, un récapitulatif de leur carrière par l’organisme compétent. Ils ne sont pas dans le déni, mais ne s’en préoccupent pas plus que cela. D’autres, enfin, sont anxieux, angoissés à l’idée de quitter une vie professionnelle qui a largement structuré leur existence. Un dialogue franc et serein avec eux est indispensable pour jauger leur motivation.

2

Dresser un bilan avec le collaborateur

Avec l’aide de la DRH, réalisez un bilan avec le collaborateur en récoltant un maximum de données pour savoir quand ce dernier doit partir, s’il possède ses trimestres. Aidez-le à reconstituer sa carrière en faisant appel, le cas échéant, à un consultant extérieur.

3

Proposer une formation de départ à la retraite

Il s’agit d’une action très simple à mettre en place et peu coûteuse. Proposer ce type de formation permet d’apaiser le climat dans l’entreprise, dans la mesure où le futur retraité se sentira respecté et considéré par son ancienne organisation. Ce type de formation permet d’appréhender dans les meilleures conditions le « dossier retraite » (fonctionnement, interlocuteurs à contacter, démarches à effectuer…). Les futurs “ex-collaborateurs” se sentent moins seuls, car ils peuvent échanger et partager avec des homologues qui connaissent la même situation.

Auteur

  • Éric Delon