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Sur le terrain

Retour sur… L’accès de travailleurs handicapés à des postes de production à ArcelorMittal Méditerranée

Sur le terrain | publié le : 01.03.2016 | Nicolas Lagrange

Depuis septembre 2015, le site du sidérurgiste de Fos-sur-Mer forme neuf travailleurs handicapés en alternance sur des postes d’opérateurs de production. Une initiative atypique, rendue possible grâce à une forte implication en interne et à des partenariats multiples.

En avril 2015, l’usine d’ArcelorMittal de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) organise une réunion d’information collective sur une formation en alternance destinée à un public de demandeurs d’emploi en situation de handicap. L’objectif du site est défini selon sa capacité à accueillir en poste de production des personnes handicapées. Le but de l’entreprise est donc d’identifier neuf candidats qui pourront suivre un contrat de professionnalisation intérimaire durant quinze mois, avec l’objectif de tenter de décrocher un certificat de qualification paritaire de la métallurgie (CQPM) de conducteur d’équipements industriels. L’opération prévoit un montage avec un contrat de professionnalisation porté par Manpower, cofinancé par l’Agefiph et l’Opca FAF-TT (Fonds d’assurance formation du travail temporaire). « C’était un défi ambitieux pour l’établissement, souligne Richard Pagnon, DRH d’ArcelorMittal Méditerranée, car il s’agit de postes de production dans un site gigantesque de 1 600 hectares, dont le processus de fabrication est technique et complexe, et qui regroupe près de 2 500 collaborateurs. »

Près de 260 personnes assistent à la journée d’information, montée en collaboration avec Pôle emploi et Cap emploi. « Lors de la séquence de questions avec la salle, certains candidats nous ont dit que ce n’était pas pour eux, puisqu’ils n’avaient jamais travaillé dans notre secteur, raconte Richard Pagnon. Nous leur avons expliqué que ce n’était pas nécessaire, et nous avons prolongé la discussion par des entretiens individuels avec ceux qui le souhaitaient. »

Neuf candidats retenus

Près de 230 CV sont finalement recueillis et confiés à Manpower, qui a la charge d’effectuer une première sélection et qui présente à ArcelorMittal plusieurs dizaines de candidats. Puis le service RH de l’entreprise, assisté de son service médical, opère un second tri, pour faire coïncider les postes disponibles avec les profils proposés. Au final, l’entreprise retient bien neuf candidats (sept hommes et deux femmes), âgés de 30 à 55 ans, souffrant majoritairement de handicaps dorsaux ou cervicaux ou de problèmes circulatoires aux jambes, et contraints pour certains de ne pas porter de charges lourdes de plus de 10 kg.

Début septembre, tous suivent une remise à niveau en savoirs fondamentaux et participent à des sessions sur le travail en équipe et la confiance en soi, avant d’alterner les périodes en entreprise (trois à six semaines consécutives) et la formation au métier de conducteur d’équipements industriels, à Istres, assurée par l’Afpi (cinq jours d’affilée).

Les neuf salariés en cours de formation ont-ils vocation à être embauchés à l’issue de leur parcours ? « Nous n’avons pas donné de garantie, répond le DRH, car cela dépendra des postes à pourvoir à ce moment-là… Mais ils feront naturellement partie de notre vivier, dès lors qu’ils auront réussi leur parcours et que des postes correspondants seront disponibles. »

Quoi qu’il en soit, au-delà de la question de l’embauche future ou pas de ces neuf personnes, le DRH estime que le pli est pris et que « la mise en place de notre cursus en alternance a déjà permis de faire tomber certains a priori. Ainsi, un de nos managers jugeait impossible d’accueillir des salariés ayant des limitations d’aptitude ; il a changé d’avis après s’être entretenu avec plusieurs candidats, proposant finalement trois postes sur les neuf ouverts à la préparation du CQPM ! »

Par ailleurs, Richard Pagnon assure que la procédure d’appels à candidatures pour ce cursus en alternance a permis à l’entreprise de recruter trois stagiaires, deux apprentis et trois personnes en CDI parmi les demandeurs d’emploi en situation de handicap.

Enfin, ArcelorMittal Méditerranée, qui comptait 3 % de salariés handicapés fin 2014, a intégré la problématique du handicap lors d’une journée de formation intitulée “Manager sans discriminer” dispensée à ses 500 managers, du directeur de l’usine à l’encadrement de proximité, mais également déclinée auprès de ses IRP. « Nous voulons faire évoluer la culture managériale, conclut Richard Pagnon. Sans l’ensemble des partenariats et l’équipe projet, nous nous serions mis nous-mêmes des freins, et les salariés handicapés n’auraient pas pensé à nous », estime-t-il.

Un diagnostic financé par l’Agefiph

Pour organiser cette formation, ArcelorMittal Méditerranée s’est appuyé en amont sur l’Agefiph. L’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (dans les entreprises privées) a financé 75 % d’un diagnostic conseil approfondi chez ArcelorMittal, lui permettant de réfléchir à une politique d’emploi de personnes handicapées. Ce diagnostic a été réalisé par un prestataire externe durant une vingtaine de jours et assorti de préconisations. « Nous avons aidé l’entreprise à construire son plan d’actions, explique Sylvie Bec, référente de l’Agefiph sur ce projet. À la suite de ce diagnostic, nous avons signé une convention bisannuelle, en janvier 2015, comportant plusieurs engagements sur ce recrutement en alternance et sur d’autres initiatives, en matière de pilotage, de communication ou de sensibilisation. Le défi est de parvenir à intégrer ces mesures à la politique RH, en évitant d’en faire une politique spécifique supplémentaire. »

Auteur

  • Nicolas Lagrange