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Sur le terrain

Retour sur… L’accord-cadre mondial de Solvay

Sur le terrain | publié le : 08.12.2015 | Hubert Heulot

En décembre 2013, en signant un accord sur la responsabilité sociale avec la confédération mondiale de l’industrie IndustriALL, le groupe chimique belge a ajouté un “étage” planétaire à son dialogue social et a amélioré la sécurité des salariés.

Classiquement, l’accord mondial sur la responsabilité sociale, signé en décembre 2013, engage Solvay sur les droits sociaux et syndicaux fondamentaux : liberté syndicale ; refus du travail forcé ou obligatoire et de celui des enfants ; égalité des hommes et des femmes selon les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) ; promotion des droits de l’homme selon le pacte mondial de l’Organisation des nations unies (ONU) ; non-discrimination, précautions vis-à-vis de l’environnement et lutte contre la corruption. Ses sous-traitants doivent respecter ces règles.

Plus original, le groupe chimique s’engage également sur la santé et la sécurité de ses salariés. Il reprend le Recueil de directives pratiques du bureau international du travail (BIT) sur le sida et le monde du travail. Et il entend que ses salariés bénéficient d’un système de protection sociale (maladie, maternité, retraite) incluant des assurances complémentaires de groupe.

Surtout, de façon très concrète, les signataires prévoient que des missions conjointes sont envoyées à travers le monde afin de vérifier l’application de l’accord. La composition de ces délégations est, selon Jean-Christophe Sciberras, DRH France et directeur des relations sociales monde, une première : trois représentants de la direction du groupe, deux d’IndustriALL, un représentant choisi par IndustriALL parmi les syndicalistes de Solvay pour chaque grande zone géographique (Amérique du Nord, Amérique latine, Europe, Asie). « Même les Allemands ne font pas voyager ainsi leurs représentants syndicaux autour de la planète », souligne Jean-Christophe Sciberras.

Cette délégation effectue deux missions par an. L’endroit est choisi en principe conjointement, mais, dans les faits, par IndustriALL. Un voyage par an a pour objet la sécurité. L’an dernier, ce fut en Bulgarie. Un conducteur de camion y était mort dans une mine où Solvay produit du carbonate de soude. « Nous, syndicalistes, avons demandé expressément à la direction locale d’évoluer et d’instaurer une véritable culture de la sécurité, qui n’existait pas », raconte Albert Kruft, représentant pour l’Europe en tant que secrétaire du comité européen de groupe. « La sécurité, c’est le domaine où l’accord mondial a eu le plus d’efficacité », relève Jean-Christophe Sciberras, après deux ans d’application du texte. Le nombre d’accidents du travail a diminué : « De 1,8 à moins de 1 par million d’heures de travail, souligne Albert Kruft. Un bon résultat obtenu par la diffusion de la culture de la sécurité, plus importante que les règles. »

Respect du droit syndical

L’autre mission annuelle examine, plus largement, la bonne application de l’accord mondial. Le respect du droit syndical y tient une bonne part. Kemal Özkan, secrétaire général adjoint d’IndustriALL, raconte comment progresse cette conception quelque peu européenne du dialogue social dans le groupe. « L’accord de 2013 s’inscrit dans une histoire vieille de dix ans, puisque c’est avec le même management, à l’époque celui de Rhodia, qui dirige aujourd’hui Solvay, que nous avons signé le premier du genre en 2005. En 2007, nous avions effectué une première mission en Chine. Localement, pas de syndicats, pas d’élus du personnel. Quand nous y sommes retournés, non seulement ils avaient des élus, mais ils avaient également négocié des accords d’entreprise. Solvay a une parole forte en faveur des droits des salariés, inscrite dans un accord mondial. C’est, pour nous, une base de développement syndical. »

Des syndicalistes plus critiques, au sein des structures internes du groupe, comme Sébastien Léonard, élu de la CGT au secrétariat du comité européen, reconnaissent cet apport de l’accord mondial : « Le dialogue social percole tout doucement. »

Pour Jean-Christophe Sciberras, l’accord a eu le mérite d’apaiser les relations sociales dans le groupe : « Plus besoin d’aller réexpliquer aux directions locales que, si elles ont des soucis avec les syndicats, la seule question qui vaille est de savoir si ces derniers ont raison. D’une manière ou d’une autre, elles devront s’entendre avec eux. » L’affaire n’est pas toujours aisée. En Italie, un refus, par Solvay, de nettoyer les vêtements de travail de salariés s’est réglé devant le tribunal. Mais, en général, les choses se traitent en interne.

L’accord mondial a aussi engendré un nouveau type de dialogue social. En mars 2015 s’est réuni le premier “forum global” du groupe. Les salariés y étaient représentés par des membres d’IndustriALL et des représentants syndicaux de Solvay choisis par IndustriALL. La direction, pendant trois jours, a répondu à leurs questions.

C’est devant cette délégation estampillée IndustriALL que Solvay a signé son premier accord mondial d’intéressement. « Cet accord reprend une proposition de la direction, sans négociation ni proposition syndicale, relativise Sébastien Léonard. Mais c’est ainsi qu’a débuté le comité de groupe européen, devenu un vrai lieu de dialogue social. »

L’année prochaine, alors que l’accord global de 2013 valable pour trois ans sera renégocié, Kemal Özkan réclamera que le “forum global” y soit inclus.

Auteur

  • Hubert Heulot