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La chronique juridique d’avosial

Chronique | publié le : 08.12.2015 | Caroline André-Hesse, Justine Coret, Counsel

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La chronique juridique d’avosial

Crédit photo Caroline André-Hesse, Justine Coret, Counsel

Inaptitude et recherche de reclassementEn cas d’inaptitude, les recherches de reclassement avant la seconde visite médicale sont inopérantes.

Lorsqu’un de ses salariés est en situation d’inaptitude, qui peut avoir une origine professionnelle ou non professionnelle, l’employeur doit chercher à le reclasser sur un poste aussi comparable que possible à l’emploi qu’il occupait précédemment à celle-ci, correspondant à ses capacités et prenant en compte les préconisations du médecin du travail (Cass. Soc. 7 juillet 2004, n° 02-47686, articles L. 1226-2 et L. 1226-10 du Code du travail).

Le licenciement d’un salarié inapte prononcé par l’employeur au mépris de son obligation de reclassement est dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 30 avril 2009, n° 07-43219).

Dans un arrêt du 4 novembre 2015, la Cour de cassation est venue confirmer que seules les recherches de reclassement effectuées à l’issue du second examen médical – c’est-à-dire une fois l’avis définitif du médecin du travail rendu quant à l’inaptitude du salarié – peuvent être prises en compte pour déterminer si l’employeur a satisfait ou non à son obligation de reclassement.

En l’espèce, une salariée, déclarée inapte au terme de deux examens médicaux ayant eu lieu les 1er et 15 avril 2010, a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement le jour de l’avis définitif d’inaptitude du médecin du travail (le 15 avril 2010). Son licenciement est intervenu une semaine après, en conséquence de l’impossibilité pour son employeur de procéder à son reclassement.

La salariée, considérant que l’employeur avait manqué à l’obligation de reclassement à son égard, a saisi la juridiction prud’homale pour obtenir réparation d’une rupture qu’elle estimait abusive.

Si la cour d’appel a débouté la salariée de sa demande, estimant qu’il n’était pas démontré que l’employeur avait manqué à son obligation de reclassement, la Cour de cassation a sanctionné le raisonnement des juges d’appel en rappelant que « seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite de reprise peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l’employeur de son obligation de reclassement ».

L’engagement de la procédure de licenciement le jour du prononcé de l’inaptitude définitive de la salariée suffisait ainsi à démontrer qu’aucune recherche sérieuse n’avait été menée postérieurement à la seconde visite médicale et, de ce fait, que l’employeur avait manqué à son obligation de reclassement.

Est-ce à dire que l’employeur ne peut amorcer ses recherches de reclassement avant que l’avis définitif du médecin du travail soit rendu ?

La Haute Cour n’érige aucune interdiction à ce titre, mais en souligne le caractère inopérant dès lors qu’elles ne peuvent pas, par définition, être adaptées à l’avis rendu à l’issue du second examen médical.

Rien n’interdit donc à l’employeur de commencer ses recherches en amont du verdict définitif du médecin du travail, mais il devra tout de même poursuivre ses recherches postérieurement à ce dernier. À défaut, il pourra se voir reprocher d’avoir manqué à son obligation de reclassement.

Une telle solution est cohérente avec l’exigence posée par le Code du travail quant à la tenue de deux examens médicaux successifs espacés de deux semaines avant que l’inaptitude ne soit acquise. Elle est toutefois particulièrement sévère, en l’espèce, au regard de l’effectif limité de la société (7 salariés) et du libellé du second avis médical, rédigé en des termes strictement identiques au premier, qui pouvaient laisser penser que les recherches de reclassement menées après l’avis provisoire du médecin du travail étaient suffisantes…

Reste à savoir comment la jurisprudence va articuler ce principe avec les dispositions législatives issues de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, dite “loi Rebsamen”, qui autorise l’employeur à procéder au licenciement d’un salarié dont l’inaptitude est d’origine professionnelle sans effectuer de recherche de reclassement préalable, dès lors que l’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail mentionne expressément que « tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ».

Quid si le médecin du travail fait état de cette mention au terme de son premier avis uniquement ? L’employeur sera-t-il pour autant dispensé de son obligation de recherche de reclassement au terme du second avis, si ce dernier n’en reproduit pas exactement les termes ? La Cour de cassation aura sans nul doute à se prononcer en la matière…

Auteur

  • Caroline André-Hesse, Justine Coret, Counsel