Le chômage est une plaie des sociétés modernes et, à défaut de savoir le résorber, la tentation est grande de choisir des boucs émissaires. Les chômeurs eux-mêmes tiennent souvent ce rôle, notamment aux yeux de ceux qui travaillent. On les accuse de ne pas chercher sérieusement un travail, de profiter des allocations chômage comme d’une rente, et l’on évoque aussitôt la double nécessité de les contraindre à retourner au labeur à n’importe quelle condition et, au moindre prétexte, de leur restreindre ou de leur supprimer lesdites allocations. Pôle emploi est aussi incriminé : on estime l’agence pour l’emploi tour à tour – voire en même temps – incompétente ou laxiste, car ne contrôlant pas suffisamment la situation des demandeurs d’emploi.

Au-delà des polémiques, l’auteure, sociologue, a cherché à comprendre les transformations de la perception du chômage dans la société française et l’évolution d’une logique d’assurance vers une logique d’aide, voire d’injonction au retour à l’emploi. Ce que l’on appelle « l’activation » des dépenses. Ce faisant, elle interroge les notions même de service, d’emploi, d’employabilité. Elle interroge aussi la nature du professionnalisme des conseillers à l’emploi, dont l’activité est toujours en tension entre les logiques économique et sociale. Elle questionne leur rôle dans la diffusion des normes de comportement, de recrutement, voire des normes morales.