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L’enquête

Les limites de l’anticipation

L’enquête | publié le : 10.11.2015 | Manuel Sanson

À deux mois de la fusion, les régions Haute et Basse-Normandie ont établi un état des lieux comparé des situations sociales et planchent sur des outils communs. Mais le chantier est générateur d’inquiétudes.

Une collectivité unifiée en matière de gestion des RH… voici l’objectif. Au 1er janvier 2016, les régions Haute et Basse-Normandie auront disparu, laissant place à une nouvelle entité. D’ici là, il faut préparer le rapprochement. Sans maîtriser les orientations stratégiques ni connaître le nom du prochain président. Comment avancer dans ces conditions ? Sollicité à l’été, le cabinet de conseil Kurt Salmon a d’abord été chargé d’établir un diagnostic des situations dans trois domaines : carrières et rémunérations ; organisation et temps de travail ; politique sociale. Au grand dam des syndicats, leur proposition d’intégrer les risques psychosociaux n’a pas été retenue. « Il est encore trop tôt », estime France Burgy, directrice générales des services (DGS) de Haute-Normandie.

Sur les thématiques précitées, les situations apparaissent disparates. Malgré un premier rattrapage intervenu en juin dernier via le vote d’une délibération au conseil régional de Basse-Normandie, le régime indemnitaire demeure plus favorable en Haute-Normandie. « Entre 200 et 300 euros brut mensuel pour un attaché territorial », indique Subayi Subayi de la CFDT. D’autres différences concernent le déroulement de carrière ou le système de prime. « Le fonctionnement bas-normand est moins rigide », observe France Burgy. La plupart des postes sont ouverts à deux grades lorsqu’ils le sont pour un seul dans l’autre collectivité. En matière de primes, la Basse-Normandie applique une procédure basée, en partie, sur l’évaluation individuelle. En Haute-Normandie, les primes sont fixées en fonction de l’échelon occupé. Les deux collectivités divergent aussi sur le temps de travail hebdomadaire – 37,30 heures contre 39 heures avec plus ou moins de RTT –, et les heures supplémentaires pour les agents de catégorie C sont rémunérées dans un cas et récupérées dans l’autre.

Après la tenue de plusieurs ateliers collectifs avec les partenaires sociaux, le cabinet aura la lourde tâche de proposer des pistes de convergences, avec avantages et inconvénients : « Nous écrivons différents scénarios. Aux élus de trancher après l’élection », explique la DGS. De quoi irriter la CGT en Haute-Normandie. À plusieurs reprises, elle a demandé – en vain – d’anticiper les négociations sur le régime indemnitaire ou le temps de travail.

Du coup, les partenaires sociaux restent sur leur faim : « C’est un simulacre de dialogue social, les questions de fond ne sont pas abordées », rapporte Stéphane Godefroy, de la CGT Haute-Normandie. Et notamment l’une des plus sensibles : la mobilité. « Aucune réflexion n’a été menée en amont sur la future organisation territoriale des services publics », regrette Subayi Subayi. Pour le moment, c’est le flou. « La majorité des agents qui travaillent dans les lycées ne connaîtront pas de changements majeurs », anticipe néanmoins France Burgy.

Repositionnement de carrière

Reste les salariés des deux sièges, soit tout de même plus de 1 000 personnes, qui sont sur « des métiers identiques ». Les éventuelles mobilités dépendront surtout de l’implantation du siège du conseil régional. Elles seront beaucoup plus importantes si celui-ci s’installe dans un seul et même lieu, comme l’envisage aujourd’hui Hervé Morin, candidat de la droite et du centre. L’actuel président candidat Nicolas Mayer-Rossignol (PS) souhaite quant à lui conserver les deux sites en les spécialisant. Seule certitude pour Bruno Thenail, de la CFDT Haute-Normandie : « Il faudra accompagner au mieux les personnes qui devront se repositionner dans leur carrière, au risque, si tel n’était pas le cas, de générer de fortes tensions individuelles et collectives. »

Dans l’attente des arbitrages, les deux services RH œuvrent à l’élaboration d’une GPEC. Elle devrait être finalisée avant la fin de l’année et permettra d’avoir une meilleure visibilité des besoins et des opportunités de carrière offertes aux agents dans le cadre de la fusion. Depuis février dernier, les DRH et leurs équipes travaillent également sur des procédures harmonisées en termes de recrutement ou encore de gestion des paies. « On avance sur les sujets qui ne nécessitent ni négociation sociale ni le vote d’une délibération », résume France Burgy. Pour le reste, les 4 000 agents vont devoir attendre le verdict des urnes.

REPÈRES

Effectif

4 150 agents territoriaux.

Population

3,3 millions d’habitants.

Auteur

  • Manuel Sanson