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PHILIPPE DÉTRIE LA MAISON DU MANAGEMENT

La chronique | publié le : 27.10.2015 |

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PHILIPPE DÉTRIE LA MAISON DU MANAGEMENT

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Agir en pragmatique

La décision est prise.

Parfait. Mais elle ne va malheureusement pas se mettre en place toute seule. Même une loi a besoin de décrets d’application, et encore, nous savons bien que les mises en œuvre sont quelquefois tardives, voire inexistantes. Si action sans vision n’est qu’agitation voire gesticulation, vision sans action n’est qu’élucubration.

Il faut agir.

Comment ? Deux grands penseurs nous proposent leur point de vue :

– Penser en homme d’action, agir en homme de pensée (Bergson).

– Penser en stratège, agir en primitif (René Char).

Essayons modestement une troisième voie : penser en visionnaire, agir en pragmatique. Il s’agit bien là d’être opérationnel, d’être concret, de travailler sur le réel.

Deux difficultés pour un manager

Un manager est évalué pour une bonne part sur sa capacité à atteindre les objectifs attendus. Il n’aura pas fait son travail s’il ne s’assure pas de “l’implémentation” de sa décision. Son job est de la mettre en œuvre. Mais deux obstacles surgissent souvent : la décision elle-même ou la capacité à la mettre en œuvre.

1. Nombre de ces décisions restent lettre morte car elles sont IN.

INutiles : redondantes ou déjà mises en pratique, ou obsolètes avant même leur publication ;

INefficaces : inopérantes parce qu’incomplètes, injustes ;

INapplicables : trop éloignées des réalités du terrain ;

INcompréhensibles : se heurtant à des injonctions paradoxales ;

INopportunes : excellentes sur le papier, mais pas du tout au bon moment.

Le conseil est ici de prévenir immédiatement l’auteur de la décision jugée inappropriée. Et de proposer d’autres solutions qui répondent aux raisons originelles de la décision. Si l’auteur est sourd, moyens et calendrier, au moins, pourront être sans doute négociés.

2. De nombreux facteurs peuvent aussi freiner le passage à l’action du côté des opérationnels : manque de temps, manque d’information, manque de compétences, manque d’organisation, manque de moyens ou trop de priorités, trop de chantiers ouverts simultanément, trop de réticences, trop de stress devant l’inconnu… La liste est longue et oblige le manager à préparer et à planifier le passage à l’action. La recommandation est simple : hiérarchiser l’impact de chaque facteur sur la mise en œuvre de la décision et s’attaquer en priorité à celui qui freine le plus.

Quelques atouts pour réussir

Agir demande des qualités : le courage pour changer une situation établie, la capacité à accompagner son équipe et à la mettre en mouvement (on dirait aujourd’hui à embarquer), le pragmatisme et la ténacité pour garder l’envie de résoudre des difficultés inévitables.

Trois bonnes pratiques :

– planifier, car cela réduit grandement le risque de dispersion ;

– découper l’objectif principal en tâches plus simples pour éviter l’indécision ;

– maintenir une dynamique positive en valorisant chaque avancée réussie, même petite.

La noblesse de l’action

Il est vrai, enfin, que l’action est quelquefois perçue comme une sous-fonction par rapport à la réflexion. L’action serait le fait d’hommes de main ; traduisez : de personnes incapables de réflexion ou de conception. La pensée l’emporterait sur l’action, jugée banale et peu stimulante. Et si vous proposez à de brillants esprits de passer à l’action, ils adopteront la confortable procrastination pour remettre les choses au lendemain. Faites-leur lire ce que le philosophe grec Isocrate écrivait à Demonicos il y a 2 400 ans : « Réfléchis avec lenteur, mais exécute rapidement ce que tu auras arrêté. »

L’action concrétise et valide la pensée. Et cela serait méconnaître l’art et l’intelligence de l’action ! L’actualité de la Coupe du monde de rugby nous en offre une démonstration. Toutes les stratégies et tactiques sont connues, c’est sur le terrain que se fait la différence. Ce ne sont pas les idées qui changent le monde, ce sont les caractères !