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En entreprise aussi, le sport c’est la sante

ZOOM | publié le : 20.10.2015 | Laurent Poillot, Virginie Leblanc

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En entreprise aussi, le sport c’est la sante

Crédit photo Laurent Poillot, Virginie Leblanc

De plus en plus d’entreprises font la promotion du sport auprès de leurs collaborateurs. Et plus seulement dans l’objectif de stimuler l’appartenance collective. L’avenir est désormais aux activités adaptées, qui développent le bien-être des salariés et donc la performance des entreprises.

Malgré le succès populaire des grandes courses à pied d’automne, moins d’un Français sur deux pratique un sport de manière régulière (48 %, selon Eurobaromètre). Pourtant, de nombreuses entreprises ne valorisent plus uniquement le sport corporatif, basé sur la compétition et l’objectif de victoire. Le sport, c’est aussi la santé. Celle des salariés, qui conditionnent la forme économique de leur entreprise.

Voilà le message qu’ont voulu porter, début septembre, le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), le Medef et AG2R-La Mondiale, en confiant au cabinet Goodwill Management une étude sur la performance économique générée par la pratique d’une activité physique, réalisé à partir de plus de 150 publications internationales traitant de l’effet du sport sur la santé humaine. « Son impact économique n’avait jamais été démontré. Notre modèle le fait en opérant un enchaînement d’équations, issu de ces travaux », raconte Alan Fustec, le Pdg de Goodwill Management.

Il affirme qu’un salarié sédentaire consacrant au moins une heure par semaine à une activité augmente sa productivité de 5,7 % à 8,6 %, suivant l’intensité de la séance et l’engagement de l’entreprise.

Quant à l’entreprise, sa rentabilité nette serait améliorée de 14 % si l’employeur permettait l’activité d’au moins 30 % des salariés. Comment ? Par une communication interne et des conférences animées par des sportifs de haut niveau. En prenant en charge une licence en club, en subventionnant l’association sportive de l’entreprise. En ouvrant le choix des activités pour toucher le public le plus large. Et en aménageant des plages horaires adaptées, sur le lieu de travail.

Developpement des politiques RSE

L’enjeu est de s’adresser à tous, même aux non-sportifs. C’est le sens de l’Histoire, estime Marie-Cécile Naves, sociologue, auteure en 2012 d’une note du Centre d’analyse stratégique : « En France, la sensibilité du monde du travail à l’importance d’une activité physique régulière remonte à près de quatre ans, estime cette sociologue. Elle marque progressivement les esprits, sous l’impulsion de l’Union européenne, du rapprochement entre le Medef et le CNOSF et du développement des politiques de RSE. » Ces politiques, selon elle, suggèrent que l’activité physique est contributive du bien-être au travail.

Attirer les non-sportifs

Dans cet esprit, et dans le cadre d’un plan de Qualité de vie au travail, Philippe Gerbet, DRH de la MGEN, a initié en 2014 la création d’une salle de sport dans les locaux de l’entreprise à destination des 520 collaborateurs du siège, « afin d’attirer surtout les salariés éloignés de la pratique sportive ». En interne, la MGEN a associé son CHSCT et mené une enquête pour cerner les attentes des salariés. « Nous avons fait le choix d’un accompagnement personnalisé par un coach sportif », précise le DRH. Programme assuré par une société, Mon Stade, spécialisée dans le développement de solutions dans le domaine du sport et de la santé. À la date du 8 septembre 2015, plus de 40 % des salariés s’étaient inscrits.

Solocal Group (ex-Pages Jaunes, 4 800 personnes) est l’un des plus avancés dans ce domaine. Il a mis en place cinq actions : dès 2013, une sensibilisation avec des vidéos sur le sommeil et les habitudes de vie diffusées sur l’intranet. Les 1 400 salariés du siège, proche du parc de Saint-Cloud, ont accès à des ateliers de sophrologie, de yoga, de Pilates et de renforcement musculaire ainsi qu’à des entraînements à la marche nordique et à la course à pied. Les séances se déroulent à la pause déjeuner ou après 18 heures. La plupart peuvent être développées en région, sur demande des managers. Et en juin, un événement de courses de relais réunit les entités du groupe installées en Ile-de-France.

L’entreprise propose aussi d’inscrire gratuitement ses salariés aux courses à pied franciliennes (Odysséa, 10 km de Paris) et organise un challenge de football interagences. Solocal s’appuie enfin sur d’anciens champions olympiques pour relayer des messages positifs sur la performance. Pour ces actions, Christian Leguédois, le responsable qualité de vie et santé au travail, dit disposer d’un budget de 95 000 euros : « Lorsque nous avons lancé le programme sport en entreprise, en février 2013, nous comptions 400 participants. Fin 2015, ils seront 750 à avoir pratiqué une activité offerte par l’entreprise. »

Effet net sur les TMS

Le Medef a recensé d’autres expériences dans un guide pratique du sport en entreprise, qui concerne surtout les sièges sociaux, à l’exception d’industriels qui utilisent le sport pour prévenir les risques professionnels. Près de Valenciennes, l’usine Toyota d’Onnaing (3 850 salariés) s’inscrit dans cette logique. Elle s’est dotée d’une école du dos (avec kiné et préparateur physique) préventive et curative. Tous les salariés nouvellement embauchés suivent obligatoirement deux semaines de formation avant leur prise de poste. Dont 10 heures d’activités encadrées. « J’adapte leur programme à partir de tests d’endurance, de force et de souplesse », raconte Claire Plouvier, professeure d’activité physique adaptée, salariée de l’entreprise. Outre ces recrues, elle coache environ 1 500 personnes chaque année. « La société civile est de plus en plus sédentaire, tandis que nos métiers sont physiques, observe le responsable santé et sécurité de l’usine, Georges Collado. Si vous n’accompagnez pas les salariés, ils auront de plus en plus de mal à s’intégrer dans l’entreprise. »

Les séances d’entraînement ont eu un effet détonnant sur les TMS, selon lui : « En production, les problématiques de dos ont chuté de 80 % entre 2006 et 2014. Les arrêts sont devenus moins nombreux et plus courts. » Une porte-parole de la direction ajoute : « Donner aux salariés le goût de se mettre en condition change leur vision du monde du travail. Ils sont mieux dans leur peau. L’activité physique développe la confiance en soi. »

Organisation mutualisée pour les PME

Peu de PME, à l’inverse, ont des programmes d’incitation au sport. « Moins pour des questions de coût que par manque de temps », estime Laura Milstajn, responsable marketing de Sportonus, organisme de formation spécialisé dans l’accompagnement au sport santé en entreprise. Sauf si cette organisation est mutualisée. L’agence de développement économique de la Communauté d’agglomération de Caen-la-Mer (Calvados) propose depuis six ans, pour ses pépinières d’entreprises, un coaching hebdomadaire en course à pied et préparation physique pendant la pause déjeuner. Elle est confiée à un athlète olympique devenu entrepreneur, lui-même issu de l’une de ces pépinières. Une trentaine d’inscrits vont courir avec lui sur le campus technologique. Le groupe s’agrandit chaque année. « Notre seule limite, c’est le nombre de douches », plaisante Nicolas Géray, le directeur des pépinières.

Ailleurs, certains assureurs publics et privés font parfois cause commune pour mobiliser les PME. À Lyon, début octobre, la Carsat Rhône-Alpes et AG2R-La Mondiale ont invité 300 chefs d’entreprise à des rencontres sur la forme. « Nous faisons valoir que la notion de santé est un levier de performance », explique Marie-Claire Minola, directrice adjointe à la Carsat Rhône-Alpes. Mais elle précise aussitôt : « La promotion du sport ne fait pas tout. Notre propos est tout de même de rappeler que le travail ne doit pas détériorer l’état de santé des salariés. »

Auteur

  • Laurent Poillot, Virginie Leblanc