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Sur le terrain

Retour sur… Le déménagement de Prisma Media à Gennevilliers

Sur le terrain | publié le : 20.10.2015 | Rozenn Le Saint

FIN 2010, le millier de salariés du groupe de médias allemand réparti sur cinq sites parisiens ou en proche banlieue a été regroupé à Gennevilliers, dans les Hauts-de-Seine. Près de cinq ans plus tard, le sentiment d’isolement ou d’insécurité et les conditions dégradées de transport poussent la direction à envisager un retour dans la capitale d’ici à 2018.

Mission accomplie. La direction a économisé 3 millions d’euros de loyer et autres coûts d’infrastructure par an en rassemblant en un site unique les cinq locaux dispersés entre Paris et la cossue Neuilly-sur-Seine (92). Mais, si Prisma Media souhaite conserver un seul lieu de travail pour tout le groupe, il envisage aujourd’hui un retour à la capitale d’ici à 2018.

Cinq ans après, la pilule du déménagement a encore du mal à passer. D’autant plus que les promesses faites à l’époque pour la rendre moins amère n’ont pas toutes été tenues. Si la direction met en avant les 150 adhérents à la salle de sport, en fait « il ne s’agit pas d’une infrastructure de Prisma Media, mais d’un lieu interentreprises qui existait déjà et que nous avons ouvert au personnel grâce au CE, qui finance la moitié de l’inscription, avec une participation de l’entreprise de l’ordre de 20 000 euros par an », rappelle Emmanuel Vire, délégué syndical SNJ-CGT.

Concernant les transports, les salariés y passent en moyenne 26 minutes par jour en plus. « Ce n’est pas tant le temps mais les conditions de transport qui pèsent, avec cette ligne 13 archi-bondée », admet la DRH, Isabelle Narbéburu. Conséquence : près de la moitié du personnel a opté pour la voiture (400 bénéficient d’une place de parking), soit environ le double par rapport à la situation d’avant déménagement, selon le SNJ-CGT.

Des avancées sur le télétravail

Côté transports donc, les craintes étaient anticipées et se sont avérées. Pour autant, le télétravail n’est toujours pas généralisé. Cette année, la direction n’a pas eu le choix. En mettant en place une boîte à idées Eureka, celle qui est revenue le plus souvent était justement le développement du travail à distance. Prisma Media a donc dû avancer sur la question, même si c’est à petits pas. Depuis octobre 2015 et jusqu’en janvier 2016, un test est lancé avec 20 salariés autorisés à travailler chez eux, avant d’envisager une négociation. Les managers ont tout de même été sensibilisés à l’importance de se montrer souples sur les horaires d’arrivée, compte tenu du temps de transport allongé.

S’agissant de l’insécurité évoquée par les salariés, les craintes persistent, même si elles sont davantage fantasmées que réelles. Au final, “seulement” une dizaine d’agressions sont venues noircir le tableau depuis 2010, dont la plupart dans le métro. Afin de rassurer son staff, la direction a toutefois mis en place une escorte entre les bureaux et le métro… soit 250 mètres traversant Gennevilliers. Après avoir stoppé ce service, puis repris, le bodyguard – comme les salariés ont coutume de l’appeler – est finalement maintenu, seulement l’hiver, quand la nuit tombe, de 17 h à 20 h. Mais il est peu sollicité.

Par ailleurs, les syndicats avaient réclamé une crèche. « La démographie de nos salariés ne le justifie pas », argue quant à elle la DRH. Alors, certains salariés déposent leur enfant dans une crèche interentreprises voisine, à laquelle leur propre employeur a refusé d’adhérer.

En revanche, même si les syndicats n’y étaient pas particulièrement favorables, les services de conciergerie mis en place lors du déménagement sont appréciés des salariés. Le pressing et le salon de coiffure et manucure tournent à plein régime. Toutefois, « le manque d’implantation d’entreprises dans la zone empêche les synergies de ces services », nuance la DRH.

Climatisation défaillante

Autre promesse de Prisma, un bâtiment haute qualité environnementale (HQE) signé de l’architecte de renom Jean-Paul Viguier, qui a coûté 30,5 millions d’euros hors taxes. Pourtant, « il arrive tuile sur tuile : notamment, la climatisation ne fonctionne pas », dénonce le représentant du SNJ. D’ailleurs, Prisma Media est en procès avec l’ancien propriétaire des lieux, Hines, pour ces vices dans le bâtiment. « Hines a acheté le bâtiment pour le revendre peu de temps après, ce qu’il a fait. Il a, dès le début, refusé de prendre en compte les problèmes constatés », déplore Thierry Cadiot, ancien directeur des services généraux et de l’environnement de travail du groupe. Si la terrasse et la cantine sont appréciées, le manque de commerces dans le quartier fait perdurer le sentiment d’isolement. « Les gens avaient pris l’habitude de déjeuner en dehors des locaux, de faire leurs courses dans Paris pendant leur pause déjeuner et d’avoir une vie sociale », se souvient Emmanuel Vire, non sans nostalgie. À titre professionnel aussi, la localisation pose problème, comme à la rédaction de Capital : « Quand il s’agit d’interviewer les dirigeants d’entreprise, par exemple, tous situés au centre de Paris, », reconnaît un ancien dirigeant.

« L’intégration n’est toujours pas réalisée pour une bonne partie des salariés », résume la DRH. À tel point qu’elle planche à présent sur un projet de retour à Paris à la fin du bail, dans trois ans, « dans la capitale, dans un lieu mieux desservi et plus sûr », avance-t-elle. Toutefois, une rumeur évoque un déménagement aux portes de Paris, mais dans un bâtiment prévu pour 700 ou 800 salariés… « Quid des 200 autres ? Retourner à Paris, d’accord, mais pas au prix de postes supprimés, s’inquiète Emmanuel Vire. Nous sommes un des seuls groupes de presse à avoir échappé à un plan social ces dernières années en France, nous voulons que ça dure. » « Ce n’est pas à l’ordre du jour, dément la DRH. Cela ne guide pas notre choix. Néanmoins le taux d’occupation actuel du bâtiment est de l’ordre de 70 %, le nouveau bâtiment sera mieux dimensionné. » Et de l’autre côté du périphérique.

Auteur

  • Rozenn Le Saint