logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les clés

Impulser une démarche “lean”

Les clés | publié le : 20.10.2015 | Véronique Vigne-Lepage

Image

Impulser une démarche “lean”

Crédit photo Véronique Vigne-Lepage

Organisation du travail. Qu’une entreprise s’engage dans une demarche lean, et c’est la culture de tous qui doit changer. dans des relations hierarchiques – voire dans une organisation – bouleversees, le manager devient formateur, animateur, coach et, comme chaque membre de l’organisation, agent de l’amelioration continue.

« Nous souffrions d’une surcharge des fonctions supports et de l’encadrement. Aussi, pour accroître notre performance, nous nous sommes lancés dans une démarche structurée d’amélioration continue. » En clair, Guillaume Pain, directeur général de Le Joint Technique, PME de 90 personnes (Rhône), a fait le choix du lean.

Seulement voilà, cela ne se décrète pas : « C’est à la fois des outils, des principes de gestion industrielle, un système de management, mais surtout une culture », détaille Jean-Louis Arosio, expert lean à l’Écam Lyon. Outre un accompagnement par le centre de ressources Thésame, Guillaume Pain est allé se former dans cette école et y a fait former son responsable qualité, des chefs d’équipe, des techniciens qualité produit, etc. « Pour pérenniser la démarche, assure-t-il, il faut que tout le monde ait la même culture. Rien que pour les encadrants, cela prend bien un an. Quant à l’ensemble de l’entreprise, nous y parvenons actuellement, au bout de trois ans. »

Le changement de culture repose sur le fait que « l’essence du lean, selon Richard Kaminski, directeur du relais de la région Centre de l’Institut Lean France, est le développement des hommes. Cela modifie le rôle du management ». Il a accompagné en ce sens Thierry Chambolle, directeur technique de Proludic, fabricant d’espaces de jeux d’extérieur (135 personnes), qui avait, de son propre aveu, « fait quelques bêtises, au début, en partant des outils et sans voir ce cœur de la démarche ».

Une fois celui-ci compris, chaque société trouve sa propre solution organisationnelle. Le Joint Technique a « réactivé un fonctionnement en unités autonomes de production (UAP) ayant une cohérence métier ou technique ». Monin Mécanique, PME d’usinage de haute précision de 40 salariés (Rhône), a, elle, « retourné la pyramide » : « Ce sont les producteurs qui créent de la valeur, assure le jeune DG, ingénieur titulaire du master spécialisé de l’Écam Lyon, comme son responsable production et logistique. Cela induit que les contremaîtres n’imposent rien, mais ont un rôle de formation et d’accompagnement. Les opérateurs de chaque UAP mettent en place leurs propres standards de travail, élaborent les documents de qualité, et leur manager ou le responsable qualité ne viennent qu’en support et pour valider la cohérence avec les process globaux. « Ce qui est compliqué, témoigne Thierry Chambolle, c’est de se poser pour traiter les problèmes de manière fondamentale au lieu de passer son temps à éteindre des incendies. »

Ces problèmes de tous ordres sont plutôt résolus en équipe, à tous les niveaux et avec les outils du lean. « Auparavant, nous lancions uniquement des chantiers longs pour des problèmes complexes, explique Christelle Thieffinne, responsable lean à Thales Avionics (Loir-et-Cher). À présent, nous faisons des “kaizen” pour tous les grains de sable gênant le quotidien. » Si les problèmes moyens et gros sont toujours pris en charge par les encadrants et par la direction, ces petits sujets techniques ou “irritants” (défaut de pièce, poste de travail mal agencé, manque de lumière…) sont étudiés entre collaborateurs, avec l’animation du chef de l’équipe. Chez Proludic, six opérateurs ont aussi été volontaires pour être animateurs, fonction valorisée 100 euros net supplémentaires par mois.

« Le premier but à atteindre est d’amener les managers à être davantage sur le terrain, commente Christelle Thieffinne. Notamment pour instaurer la confiance indispensable au partage des problèmes. »

Réunions quotidiennes

Thales Avionics, par exemple, a mis en place des animations à intervalles courts (AIC), c’est-à-dire des réunions quotidiennes d’un quart d’heure qui permettent de faire le point, à différentes échelles, sur la situation de production et les difficultés rencontrées : les producteurs et leur responsable d’îlot, ces derniers et des représentants de fonctions support avec le chef de chaque ligne de production, et tous ceux-ci avec la direction du site. « Au début, cela paraissait impossible à certains en termes d’agenda, rapporte la responsable lean. Aussi le directeur a-t-il interdit toute autre réunion entre 9 heures et 10 heures. » Pour instaurer la confiance, chaque manager fait aussi chaque jour un “dojo” avec l’un de ses collaborateurs, hors de toute problématique : une séance d’observation et de dialogue sur son travail, toujours en vue d’une amélioration. De son côté, Guillaume Pain constate l’effet majeur, en termes de confiance des équipes, de la communication interne valorisant les « bonnes pratiques » comme les apports de la démarche.

Les conseils du coach

Jean-Jacques Montlahuc

Coach, team builder et conférencier

1

Viser un enjeu stratégique de l’entreprise

Pour qu’une démarche lean fonctionne, il faut qu’elle réponde à un enjeu stratégique de l’entreprise. En ce sens, elle doit absolument être portée par la direction. Il ne s’agit pas de faire de l’amélioration pour de l’amélioration, mais de donner du sens à la démarche, et que ce sens soit partagé par tous.

2

Adopter un management de la transparence

Pour pouvoir regarder ce qui ne va pas (retours clients, réclamations, nombre d’arrêts maladie, etc.), il faut créer les conditions permettant de se confronter à la réalité et à la brutalité des faits. C’est-à-dire adopter un management grâce auquel il n’y a pas de risque, pour les managers intermédiaires ou pour les collaborateurs, à dire la vérité sur un dysfonctionnement, une non-qualité… C’est un management par la transparence, la confiance et le soutien.

3

Insuffler un esprit de coopération

Au lieu de “mettre la pression” sur les salariés pour qu’ils accroissent leur performance, mieux vaut créer des collectifs de travail portant le processus d’amélioration, et faire vivre la coopération en leur sein. Pour cela, nommer des animateurs lean ne suffit pas : il faut organiser des réunions qui aient du sens, être dans l’écoute et le soutien. L’intervention d’un coach peut alors être utile pour aider à créer des équipes qui fonctionnent.

Auteur

  • Véronique Vigne-Lepage