logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Sur le terrain

Santé au travail : La mission locale de Reims associe ses salariés à la lutte contre les RPS

Sur le terrain | Pratique | publié le : 06.10.2015 | Catherine Sanson-Stern

Après avoir mis en place un CHSCT volontaire en 2005 et mené une étude sur le stress dès 2009, la mission locale de Reims a créé en 2014 un groupe de prévention des RPS formé par l’Aract. Avec à la clé des solutions coconstruites pour réduire la pression au quotidien.

Accompagner les 16-25 ans sortis du système scolaire dans leurs démarches d’insertion professionnelle et sociale n’est pas une tâche aisée, surtout en contexte de crise économique. Entre 2008 et 2015, la mission locale de Reims a accueilli 42 % de jeunes en plus, sans hausse d’effectifs – chaque conseiller devant suivre 230 jeunes en moyenne au lieu de 160 –, sur fond de complexification des dispositifs d’accompagnement. Depuis le début de l’année, la mission a dû mettre en place 600 contrats d’avenir pour des jeunes de quartiers prioritaires et devra en faire autant d’ici à la fin de l’année.

Mais le stress vécu par les salariés n’est pas nouveau. « À mon arrivée en 2003, un audit court de l’Aract(1) Champagne-Ardenne témoignait déjà d’un mal-être au niveau de l’entreprise », se souvient Joachim Appert, DP Synami-CFDT(2) et secrétaire du CHSCT. L’agression d’un conseiller a poussé les partenaires sociaux à créer en 2005 un CHSCT, non obligatoire pour une structure de 42 employés. « Progressivement, nous nous y sommes questionnés sur les risques psychosociaux, raconte-t-il. En 2008, une enquête a fait apparaître que de nombreux salariés étaient en souffrance. Fin 2011, un collègue s’est suicidé. Même si ça n’a jamais été reconnu, on savait que c’était lié au travail. »

Alerte au CHSCT

Après une alerte au CHSCT en 2012, un recueil de paroles de salariés a confirmé fin 2013 « l’existence d’une souffrance réelle ». Un autre diagnostic de l’Aract semblait une réponse inadaptée, d’où l’idée, début 2014, de proposer une démarche participative : une formation-action à l’analyse des situations problématiques. Les salariés n’ont pas adhéré immédiatement. « Ils n’avaient pas confiance dans le fait d’y trouver des solutions, explique Jean-Charles L’Huillier, conseiller en insertion et membre du groupe. On pensait que c’était technique, éloigné de notre vécu. »

Pendant six mois, huit personnes issues de différentes fonctions ont été formées, ont recueilli les situations-problèmes auprès de leurs collègues, les ont analysées en groupe, puis ont élaboré des fiches de propositions soumises à la direction et aux DP en CHSCT. « La démarche a permis que tout le monde soit sensibilisé, se félicite Christine Béguinot, la directrice. Ça a libéré la parole. Désormais, une personne en difficulté a une dizaine de collègues à qui s’adresser. » Finalement, Jean-Charles L’Huillier a apprécié l’exercice : « C’est stimulant de poser un problème avec des collègues d’autres services et de réfléchir à comment faire pour qu’il ne se reproduise pas. On ne s’intéresse pas aux cas personnels mais aux méthodes de travail, aux procédures, à l’organisation, à la hiérarchie… »

123 fiches progrès déposées

Plusieurs améliorations ont permis de lutter contre le stress au quotidien(3). Par exemple, une période tampon au retour de congés, afin que chacun puisse traiter ses e-mails en retard en étant dispensé de réunion, un système de réservation des véhicules de fonction, une meilleure gestion du parking, l’aménagement d’espaces de pause plus conviviaux, des réunions de tout le personnel plusieurs fois par an, le renforcement de l’accès au tutorat, y compris en cours de carrière, une meilleure anticipation des pics d’activité, des remplacements en trinômes… En 2014, 123 fiches progrès ont été déposées.

« Le dialogue vit dans l’entreprise, ce qui n’était pas le cas il y a une dizaine d’années », se félicite Joachim Appert. Mais aujourd’hui, l’enjeu est de faire perdurer la dynamique. Le groupe RPS peine à trouver le temps de se réunir régulièrement. Une personne s’est retirée et n’a pas été remplacée. « Il faut préserver le fait que les salariés viennent nous voir, souligne Jean-Charles L’Huillier. C’est une masse de travail importante : il ne suffit pas d’avoir des idées,; il faut aussi vérifier avec tout le groupe qu’elles soient applicables. La méthodologie est assez lourde, les documents de recueil et de traitement compliqués. Or, plus on se perd en formalisation et méthodologie, moins les gens se rendent compte de ce qui a été mis en place… »

Mais la prévention des RPS passe aussi par des choses simples. « Cet été, l’équipe a adopté un chat dans notre jardin, raconte le secrétaire du CHSCT. Pendant que les gens s’occupaient de lui, ils décrochaient de leurs dossiers. »

1) Association régionale pour l’amélioration des conditions de travail.

2) Syndicat national des métiers de l’insertion.

3) Une démarche récompensée par un prix pour l’emploi de qualité en 2015.

Auteur

  • Catherine Sanson-Stern