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Les clés

Conduire un entretien professionnel

Les clés | publié le : 29.09.2015 | Nicolas Lagrange

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Conduire un entretien professionnel

Crédit photo Nicolas Lagrange

Développement professionnel. Le nouvel entretien professionnel, qui échoit essentiellement aux n + 1, accroît la dimension RH de leur poste. Il nécessite davantage de visibilité sur la stratégie, les évolutions métiers et les outils de la formation, une posture d’écoute et de soutien plus que d’autorité, et une coordination forte avec les RH.

« Inspirer confiance à ses collaborateurs est un travail de longue haleine mais indispensable afin qu’ils expriment le plus librement possible leurs desiderata professionnels. Tout se joue sur la proximité entre le manager et le salarié. » Stéphane Saint-Alme, responsable architecture et socles à la DSI d’AG2R La Mondiale, résume le défi des encadrants lorsqu’ils abordent les perspectives d’évolution de carrière et les besoins en formation. Une discussion que le groupe de prévoyance a réalisée jusqu’ici au sein de l’entretien annuel d’évaluation, mais qui constituera une séquence spécifique dans quelques semaines, en application de la loi du 5 mars 2014 créant l’entretien professionnel.

« Au total, l’entretien d’évaluation dure en moyenne deux heures, précise Stéphane Saint-Alme, à la tête d’une équipe d’une vingtaine de salariés. Après une première partie sur l’évaluation des objectifs passés, je suis à l’écoute des projets professionnels et je m’efforce de challenger le collaborateur : est-ce qu’il n’idéalise pas ? A-t-il envisagé toutes les facettes de son projet ? Qu’est-ce que cela implique en termes de formations et quels sont les moyens mobilisables ? » La posture ne repose pas sur la légitimité hiérarchique, mais « sur la qualité de la relation manager-managé, assure Gilda Jantzen, directrice associée d’Agissens, formatrice pour Elegia. Le manager doit se situer dans l’empathie, l’accompagnement et le soutien, aider les salariés à cadrer le projet et à trouver des solutions. Ce qui n’a rien d’évident, parce qu’il peut craindre de perdre son autorité ou de ne pas savoir faire ».

Identifier les difficultés

« Pour éviter une discussion trop théorique sur l’avenir, il est important d’avoir d’abord un exercice d’évaluation classique, pour identifier les difficultés ou les aspirations par rapport au poste actuel, estime Nathalie Duchevet, directrice d’un centre régional de Veolia Eau (340 collaborateurs). Ensuite, on peut plus facilement faire le lien avec les compétences à développer et les souhaits éventuels de changements. » Là encore, pas de dissociation entre entretien d’évaluation et entretien professionnel. « Nous souhaitons conserver ces deux temps d’échanges l’un après l’autre, explique Isabelle Quainon, directrice formation du groupe Veolia. Notre nouvelle approche One Form, systématisée fin 2014, permet d’intégrer davantage la logique d’anticipation des carrières, en renforçant la dimension RH de l’entretien annuel autour de la mobilité et des besoins de compétences. »

Quel que soit le calendrier choisi pour l’entretien professionnel, le manager doit éviter de se mettre à la place du salarié, conseille Gilda Jantzen, qui a animé près de 50 sessions managériales sur ce nouveau dispositif depuis un an. « Au lieu de lui donner des conseils directs, mieux vaut fournir au collaborateur des repères pour l’aider à se projeter. » Un exercice compliqué, qui nécessite d’accompagner fortement les managers. « Avec des outils digitaux, nous voulons leur donner plus de visibilité sur la cartographie des métiers, les passerelles, les écarts de compétences et les formations, expose Alexandra Lange, directrice formation et accompagnement du changement RH à AG2R La Mondiale. Ce qui implique de vulgariser la GPEC, de communiquer individuellement et pas seulement collectivement sur les transformations prévisibles, les métiers en perte de vitesse et ceux qui recrutent. En nous appuyant sur les managers, avec une information claire et accessible sur les outils et dispositifs de la formation et sur les interlocuteurs référents. »

Classiquement, à Veolia, l’entretien finalisé est cosigné par le manager et le salarié, remis au collaborateur et transmis aux RH. « Le suivi est primordial, si l’on veut que l’exercice garde sa crédibilité, juge Nathalie Duchevet. Nous réfléchissons avec les RH aux formations adéquates qui peuvent être proposées aux salariés une fois les priorités définies et les arbitrages budgétaires effectués. » Un suivi dans lequel les managers doivent vraiment s’impliquer, comme le souligne Stéphane Saint-Alme : « J’échange souvent avec mon n + 1 ; nous revoyons parfois ensemble les collaborateurs, nous les aiguillons, mais nous pouvons aussi leur demander de préciser par écrit leurs aspirations, voire de prendre contact avec un manager du service convoité, afin qu’ils prennent en main leur démarche. »

« Préparé, mené et suivi sérieusement, l’entretien professionnel peut devenir un outil de développement des compétences et donc de performance pour l’entreprise, la contrainte légale se transformant en opportunité stratégique », conclut Gilda Jantzen.

LES CONSEILS DU COACH

Virginie Loye

Responsable des offres de formations RH et compétences de Cegos

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Bien préparer l’entretien professionnel

Il est judicieux d’expliquer au salarié l’objectif de l’entretien et ce qu’il peut en retirer, en lui remettant un support qui lui permette une préparation sérieuse. Le manager, lui, se sentira plus prêt s’il s’est approprié les orientations stratégiques et s’il a une connaissance minimale des outils de formation et de qualification, d’éventuels accords mobilité ou GPEC. Il peut être utile de réfléchir avec les RH sur les messages clés à délivrer au salarié selon son profil et les évolutions possibles.

– 2 –

Adopter une posture de coach

L’entretien professionnel requiert une posture différente de celui d’évaluation : le manager doit être davantage dans le questionnement et l’écoute. Il peut porter un regard valorisant sur des compétences jusque-là non identifiées ou sur des souhaits nouveaux. Ce qui ne l’empêche pas de délivrer des éléments de cadrage. Il peut aider le salarié à clarifier ses projets, à comprendre les écarts avec son poste actuel et lui fournir des informations sur les passerelles, les étapes intermédiaires, les actions de développement de compétences envisageables.

– 3 –

Mettre en place des plans d’action

Les managers craignent souvent de générer de la frustration chez leurs collaborateurs, compte tenu de possibilités d’évolution limitées dans leur entreprise. Or ils peuvent tout d’abord leur donner de la visibilité sur les transformations prévisibles des métiers à moyen terme et les accompagner dans leur réflexion sur les moyens de maintenir leur employabilité. Pour répondre à leurs aspirations de progression à plus court terme, ils peuvent entre autres leur proposer de nouvelles responsabilités, des projets transverses, une polyvalence accrue, des missions de capitalisation ou encore du tutorat. Tout en veillant à assurer un suivi dans le temps des actions.

Auteur

  • Nicolas Lagrange