Dès 2001, dans son accord sur l’amélioration des conditions de travail, PSA spécifiait les ressources humaines qu’il entendait dédier à l’ergonomie : dès la conception, « des équipes pluridisciplinaires sont constituées sur les projets, associant l’ensemble des acteurs. Les ergonomes, les médecins du travail et les techniciens de sécurité sont intégrés aux équipes de développement produit-process pour orienter les prises de décision ». Reconduit en 2008, le texte a été repris fin 2013 et intégré dans le nouveau contrat social.

L’équipe d’ergonomes constituée en 2005 est aujourd’hui composée de 42 personnes, certains étant répartis sur les sites et d’autres attachés à des projets (nouveau véhicule, nouveau moteur…). Dans cette hypothèse, « les objectifs d’amélioration des conditions de travail sont contractualisés avec le chef de projet, explique Alexandre Morais, responsable de l’ergonomie industrielle. Le rôle de l’ergonome, membre à part entière du groupe projet, est de participer à la construction des postes et des situations de travail qui soient les plus acceptables possibles en performance et en santé, compte tenu des contraintes financières et techniques de l’entreprise. Par ailleurs, pour améliorer l’employabilité de nos usines, il participe à la conception de postes en tenant compte des caractéristiques des salariés – âge et restrictions physiques notamment ».

À titre d’exemple, le responsable cite la construction de véhicules hybrides, projet pour lequel s’est vite présenté un problème : le poids élevé des batteries. Il a fallu trouver un moyen technique pour soulager la manutention de celles-ci par les opérateurs.

Les ergonomes “vie série“ ou “vie courante”, selon les termes maison, affectés à chaque usine, interviennent pour maintenir la performance de celle-ci en même temps que la santé des opérateurs à l’occasion des changements inévitables des installations. Daniel Daranjo, qui occupe ce poste sur le site de Caen, explique qu’il intervient à la demande de différents services et qu’il peut aussi alerter sur certains sujets. Les ergonomes “métiers”, affectés aux métiers de l’automobile (montage, ferrage, etc.), intègrent dans leurs référentiels des éléments d’ergonomie normative afin de disposer de garde-fous.

Outre l’intervention des ergonomes eux-mêmes, des transferts de connaissances sont organisés vers tous les acteurs de conception-modification des postes et des situations de travail. « Par exemple, si un opérateur répète un geste les mains au-dessus du cœur, le premier niveau hiérarchique est capable de faire les aménagements pour que l’opérateur travaille avec les mains en dessous du cœur », illustre Alexandre Morais.

Autre spécificité de PSA, l’intégration des principes de l’ergonomie aux outils du lean manufacturing. « Dans la construction de notre standard de travail, nous partons du travail réel, et le standard défini doit donner la capacité à l’opérateur d’assurer sa performance, tout en lui préservant des marges de manœuvre, explique Alexandre Morais. Notre standard devient le “quoi faire”, et l’opérateur va réaliser le “comment”, nous lui faisons confiance. Et s’il existe un risque pour sa santé ou sa sécurité – qui n’a pas pu être résolu pendant la conception – une prescription spécifique du standard explique comment l’éviter. »

Le constructeur automobile a aussi utilisé, à Mulhouse, une technique dite de “l’autoconfrontation”. Le principe retenu a été de filmer plusieurs opérateurs occupant le même poste de travail puis de les faire discuter sur leurs pratiques pour aboutir à une façon de faire partagée. Alexandre Morais en est persuadé : « C’est l’avenir pour nous. Si l’entreprise s’appuie sur leur pratique, leur capacité d’innovation dès la conception des postes, cela contribue à sa performance. » À Mulhouse, le responsable explique avoir constaté une amélioration de la productivité et de la qualité des produits, ainsi qu’un meilleur engagement des opérateurs dans leur activité.

Pour mieux prévenir les TMS, PSA a mis en place depuis quelques années un système d’alertes liées au travail, présenté au congrès de la Self 2015 (Société d’ergonomie de langue française) à Paris, fin septembre(1). « Dès que quelque chose d’anormal se passe qui l’empêche de suivre le standard de travail ou encore lorsqu’il ressent une gêne, l’opérateur alerte sa hiérarchie. Le responsable de proximité va recueillir la plainte. Lorsqu’elle relève de la santé de l’opérateur, le hiérarchique transmet son recueil à l’équipe pluridisciplinaire constituée de l’ergonome, du médecin et du préventeur, qui vont instruire cette alerte et proposer les actions correctives. Nous savons, au regard des résultats des études épidémiologiques, que lorsqu’on agit sur les signaux faibles (les premières plaintes), il y a plus de chances de diminuer les risques d’apparition des TMS », souligne le responsable.

Christian Lafaye, délégué central syndical FO constate, alors qu’il a été pendant vingt-deux ans secrétaire de CHSCT, qu’aujourd’hui, il existe un “réflexe ergonomie”, et il perçoit un réel effet de leurs interventions : la forte diminution des postes lourds.

De son côté, Laurent Gautherat, responsable CFE-CGC et délégué syndical à Mulhouse, pointe une difficulté : « Nous n’embauchons plus, donc si un poste d’ergonome se libère, il sera pourvu en interne, avec des personnes forcément moins bien formées sur ces sujets. »

Activité

Constructeur automobile.

Effectif

189 800 salariés en 2014.

Chiffre d’affaires 2014

53,6 milliards d’euros.