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DRH DE TRANSITION, UN POSITIONNEMENT EN PLEIN ESSOR

ZOOM | publié le : 25.08.2015 | Nicolas Lagrange

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DRH DE TRANSITION, UN POSITIONNEMENT EN PLEIN ESSOR

Crédit photo Nicolas Lagrange

À la faveur de la crise, de l’accélération des prises de décision et de la banalisation du mode projet, les entreprises ont de plus en plus recours aux DRH de transition.Des praticiens expérimentés pour des missions ponctuelles de haut vol, qui exigent une posture bien spécifique.

« Nous sommes des DRH urgentistes, nous fonctionnons en mode gestion de crise, pour répondre aux attentes des clients et formuler rapidement des propositions de plans d’actions. » Régine Pailhès-Roset vient de gérer le transfert de 350 salariés d’un site industriel à un autre nouvellement créé, situé à une dizaine de kilomètres. « J’ai notamment préparé les recrutements et les mobilités internes pour la nouvelle usine, en lien avec le DRH groupe et les équipes RH », précise la DRH de transition, qui a passé quatorze ans chez Danone à divers postes, sept ans à l’international avec Aventis, avant de devenir cadre dirigeante chez Temex. Depuis 2007, elle enchaîne des missions de natures très différentes, le plus souvent durant six à douze mois : accompagnement de projets de développement et de réorganisation, maintien de la continuité d’un service, renouvellement du dialogue social, régionalisation de la fonction RH…

« Le recours au management de transition croît sans discontinuer depuis plusieurs années en France, toutes fonctions confondues : DG, DAF, DRH, DSI… », assure Frédéric Ripart, directeur associé chez Valtus. Le leader français affiche près de 180 missions par an, dont une quarantaine sur les RH, dans un marché éclaté et concurrentiel, mais porteur (lire l’encadré p. 7). « Les DRH de transition sont de plus en plus prisés pour de multiples raisons, souligne-t-il. Les entreprises veulent avoir des réponses rapides, pour gérer une restructuration, voire une fermeture de site, mais aussi pour mettre en place un projet… Soit elles n’ont pas les ressources en interne, parfois parce qu’elles ont réduit leurs fonctions support, soit elles recherchent un regard neuf, en dehors des jeux d’alliances, pour une durée déterminée. Elles font toujours face à un enjeu majeur, car le DRH de transition, un senior le plus souvent, est surdimensionné pour le poste et a un coût substantiel. Un surdimensionnement qui génère un surplus de rémunération avoisinant 25 % pour le DRH de transition, hors marge du cabinet. »

CHEF DE PROJET

« Même si la gestion des réorganisations reste la principale demande dans le contexte économique actuel, de plus en plus d’entreprises, y compris des grosses PME, font appel à des DRH ou RRH de transition pour des projets de développement, par exemple sur la gestion des compétences ou la performance managériale », indique François Catta, président du directoire de Links Consultants. Cette filiale du groupe d’intérim Actual compte une vingtaine de managers RH de transition actifs, ainsi que plusieurs dizaines d’experts davantage positionnés sur du consulting et du middle management, éventuellement en temps partagé. En fait, de nombreux DRH de transition sont référencés dans plusieurs cabinets, spécialisés ou généralistes, possèdent parfois leur propre structure et peuvent également se retrouver dans des associations. C’est le cas de Bruno de Montalivet, ancien président de l’A2MT, l’Association des managers et du management de transition. « La recherche de missions prend du temps et repose essentiellement sur la force du réseau et sur l’expérience acquise », souligne l’intéressé, ancien DRH de division et directeur opérationnel au sein du groupe Accor, positionné comme DRH de transition depuis 2008. Récemment, il a joué un rôle de premier plan dans la reconstruction d’un département RH d’une ETI de 3 000 salariés répartis dans 250 magasins : création d’une école de formation, de fiches de poste, animation du recrutement en interne et en externe… Il effectue actuellement une mission pour www.louerunmanager.com, un pool de 45 managers de transition indépendants.

UNE POSTURE D’ÉCOUTE

« Quand je démarre une mission, le cadre doit être clair, explique Régine Pailhès-Roset, élue DRH de l’année par Valtus. Je me place d’abord dans une posture d’écoute, je m’imprègne de la culture d’entreprise pour établir rapidement un diagnostic détaillé et identifier les signaux faibles, qui ne figurent pas toujours dans le cahier des charges initial. Ensuite, je fais un point avec le directeur associé du cabinet de management de transition afin de partager le diagnostic et les pistes d’action envisagées, avant de les présenter à l’entreprise. » Une prise de recul avec un tiers essentielle, surtout lorsque la pression est forte, ce qui est fréquent. « Je consacre la moitié de mon temps à l’accompagnement de mes managers, avec un suivi hebdomadaire pour chacun d’eux », affirme Frédéric Ripart, de Valtus.

Au-delà de ce suivi, loin d’être la règle partout, le DRH de transition est aidé par son positionnement. « Il peut réussir plus rapidement son immersion qu’un DRH classique, parce que les autres managers ne le voient pas comme un concurrent mais comme un chef de projet, avec un côté moins politique et plus opérationnel, avec un périmètre et une durée délimités », affirme Bruno Planchais, DRH groupe d’Actual. « On n’a pas de passé dans l’entreprise et on nous attend sur un résultat, ce qui est un atout, mais cela implique aussi de convaincre les équipes, de les former, de travailler avec elles de manière collaborative, sans s’appuyer sur une légitimité hiérarchique, ajoute Bruno de Montalivet. Avec deux avantages supplémentaires par rapport à des consultants externes : on met en œuvre les mesures que l’on préconise et on ne cherche pas à pérenniser la relation de travail, ce qui confère une grande liberté de ton. »

Cette capacité à challenger les équipes de direction, à avoir la main sur le cours des événements RH est un puissant facteur de motivation, selon Régine Pailhès-Roset :« Les missions sont denses, chronophages et nécessitent un gros investissement personnel », reconnaît-elle. Mais elles sont bien rémunérées et permettent d’exercer différemment ses compétences. Installée dans le Sud-Est, la DRH de transition se déplace en effet un peu partout en France en fonction des projets, durant quelques mois. Si elle ne compte pas ses heures, elle se fait un devoir de rentrer chez elle tous les week-ends. Avec, parfois, des refus de missions (rares) qu’elle ne « sent pas », et des périodes de pause (intermissions) pouvant aller de 48 heures à plusieurs mois.

DIVERSES FORMES CONTRACTUELLES

« Pour que le management de transition devienne un métier et pas seulement une activité, il faudrait aller vers la création d’un statut, tout en gardant la souplesse dans la relation de travail recherchée par les entreprises clientes », estime Bruno de Montalivet. Car les formes contractuelles sont aujourd’hui très diverses, du portage salarial (majoritaire) au contrat de prestations, en passant par le CDD et l’intérim. Et le management de transition reste encore peu connu et peu reconnu, souffrant d’une représentation disputée par deux syndicats patronaux et plusieurs associations et de l’absence d’une connaissance fine du marché et de ses acteurs…

Auteur

  • Nicolas Lagrange