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QUALITÉ DE VIE AU TRAVAIL : L’ATOUT DES SERVICES aux salariés

L’enquête | publié le : 14.07.2015 | Virginie Leblanc

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QUALITÉ DE VIE AU TRAVAIL : L’ATOUT DES SERVICES aux salariés

Crédit photo Virginie Leblanc

Constatant l’affaiblissement des frontières entre vie privée et vie professionnelle, les entreprises n’hésitent plus à proposer une multitude de services visant à alléger le quotidien de leurs salariés. Autant pour les fidéliser, en se montrant soucieuses de l’équilibre des temps, que pour accroître leur performance.

L’idée que des entreprises (en l’occurrence Facebook et Apple, les deux géants de la Silicon Valley) puissent subventionner la congélation d’ovocytes pour leurs employées afin que celles-ci privilégient leur carrière avant de devenir mères a suscité un débat passionné en France en octobre dernier. Sans aller jusqu’à cet extrême, les entreprises hexagonales misent de plus en plus sur les services et avantages qu’elles peuvent apporter à leurs salariés pour les aider dans leur quotidien ou à plus long terme. Objectifs : préserver leur attractivité, fidéliser et réduire l’absentéisme. Mais aussi répondre à la forte attente des salariés dans ce domaine. Selon le baromètre de l’Observatoire de l’équilibre des temps et de la parentalité en entreprise (OPE) publié le 2 juin dernier, 93 % des salariés considèrent que l’équilibre des temps de vie est un sujet de préoccupation important, voire très important. Et 89 % des sondés estiment qu’une aide leur permettant de mieux équilibrer leurs temps de vie pourrait avoir un impact important sur la performance économique de l’entreprise et sur le climat social (95 %). Par ailleurs, 71 % affirment « manquer de temps au quotidien ».

« Les jeunes salariés sont très friands de ce type de services. Lorsqu’ils ont la possibilité de choisir entre une entreprise qui montre une attention spécifique au bien-être de ses collaborateurs, et une autre qui serait passive sur ces sujets, ils n’hésitent pas à opter pour celle qui leur offre de multiples agréments, quitte à perdre en salaire », affirme Jean-Christophe Procot, senior manager RH chez Kurt Salmon.

SOULAGER LE QUOTIDIEN

Les frontières entre vie privée et vie professionnelle étant de plus en plus poreuses, l’entreprise apparaît légitime à intervenir pour soulager ses collaborateurs dans leur quotidien. « De nombreux salariés appellent des institutions publiques pendant leurs heures de travail et, inversement, ils rapportent du travail chez eux le week-end. Certains soucis personnels parasitent leur sommeil, ce qui a une incidence sur la disponibilité et la concentration au travail. Les entreprises et les branches professionnelles ont de plus en plus intérêt à réfléchir à ces sujets », affirme Arnaud Vallin, directeur usages sociaux-marketing social de la société d’intermédiation Domplus. Celle-ci (8 millions de bénéficiaires) travaille essentiellement pour le compte d’institutions de prévoyance mais aussi en direct avec des entreprises comme Lafarge, par exemple.

Depuis plusieurs années déjà, les entreprises offrent des services de crèche et de conciergerie, même si le taux de pénétration en France de la conciergerie d’entreprise n’est que de 1 %, selon l’Arseg, l’association des professionnels de l’environnement de travail. Mais ces solutions évoluent pour coller davantage aux besoins des salariés et accompagner les parents à différents moments de la vie. En juin dernier, BBbook, un service de Crèche Attitude (Sodexo), qui proposait déjà depuis 2013 un service d’accueil d’urgence en crèche, a élargi son offre aux enfants de 3 à 12 ans en nouant un partenariat avec Kangourou Kids pour un service de garde d’urgence à domicile. « Les entreprises qui ont des problématiques d’absentéisme sont intéressées par la mise en place de solutions de garde d’urgence. C’est un vrai atout. Les parents peuvent appeler la veille et disposer soit d’une place en crèche, soit d’une nounou à domicile, illustre ainsi Sylvain Forestier, Président de La Maison Bleue, entreprise de crèche spécialisée dans la gestion et la création de crèches pour les entreprises et les collectivités. Et, pour répondre aux problématiques des enfants âgés de 4 à 11 ans, nous proposons d’aller les chercher à l’école, nous organisons des activités périscolaires, et nous donnons accès à des services de conciergerie et à des cours sur Internet. Sur ces sujets, nous avons notamment un partenariat exclusif avec l’entreprise de services à domicile O2. »

DAVANTAGE D’OFFRES EN LIGNE

Les offres de services en ligne se développent non seulement en matière de soutien, mais aussi pour les gardes d’enfants. La start-up française Yoopies, qui se définit comme le « Facebook du baby-sitting », a fait entrer le groupe Babilou dans son capital et a lancé une plate-forme d’intermédiation pour rechercher une baby-sitter, une nounou ou une assistante maternelle et vérifier ses diplômes afin de s’adresser à elle en confiance. Cinq grands groupes l’ont expérimentée auparavant : SNCF (Transilien), Société Générale (lire p. 24), le groupe Casino, France Télévisions et le CE d’Amundi.

Selon Jérôme Ballarin, président de 1762 Consultants et de l’OPE, et promoteur du « management par les équilibres », d’autres prestations se développent, comme les ateliers de formation pour les parents d’adolescents difficiles : « Des spécialistes de l’adolescence leur apportent des clés de compréhension concrètes, et ces modules leur permettent aussi d’échanger avec d’autres parents. »

4 MILLIONS D’AIDANTS FAMILIAUX

Dans leurs démarches, les entreprises doivent tenir compte des évolutions sociétales. Ainsi, dans son nouvel accord femmes-hommes, Randstad a intégré plusieurs mesures en faveur des familles monoparentales (lire p. 25). Autre évolution majeure, démographie oblige, une forte préoccupation émerge pour soutenir les salariés aidants dans leurs démarches. Plus de 4 millions de Français seraient aidants familiaux. Ce n’est pas un hasard si la plate-forme Responsage (80 000 salariés ayants droit en 2015) est rejointe par de plus en plus d’entreprises (lire Entreprise et Carrières n° 1211). Bayard et Danone font partie des actionnaires, et le service est aujourd’hui disponible notamment chez L’Oréal, GDF Suez, Crédit Agricole Assurances, LVMH. Les appelants bénéficient d’un conseil personnalisé et d’une réponse écrite très détaillée sur des questions variées : les aides au financement des séjours en maison de retraite, l’accompagnement d’un proche souffrant de la maladie d’Alzheimer, etc.

D’autres organismes apportent une offre globale, qui intègre cet accompagnement aux aidants familiaux. C’est le cas à Domplus, où, au-delà des problématiques de dépendance, de handicap, de veuvage et de passage à la retraite, les situations d’aidants sont prises en compte. « Nous nous sommes rendu compte qu’il fallait aussi aider les salariés à anticiper ces situations difficiles par des modules de prévention », souligne Arnaud Vallin.

De son côté, April a testé en interne un service d’assistance médico-social “April for me”, qu’elle va proposer aux entreprises (lire p. 24). Ces services sont encouragés par la généralisation de la complémentaire santé, car les organismes recommandés doivent proposer des prestations à haut degré de solidarité (lire Entreprises & Carrières n° 1244). « Les services proposés dans le cadre de l’action sociale ont été intégrés dans la démarche globale Entreprise territoire de santé, pour répondre aux besoins spécifiques des entreprises et des branches professionnelles, témoigne Pascal Andrieux, directeur de l’action sociale de Malakoff Médéric. Demain, nous mettrons l’accent sur l’accompagnement des salariés seniors, la préparation à la retraite, et nous souhaitons répondre à une forte demande sur l’accompagnement en cas de décès d’un proche. » En outre, parmi les services disponibles, Malakoff-Médéric inclut dans ses offres d’assurance les prestations de la conciergerie “Bien-être à la carte” et un service à la limite des problématiques de prévention : l’accompagnement-reprise des salariés en arrêt maladie de longue durée.

AIDES FINANCIÈRES

Autres tendances qui émergent de l’observatoire de Domplus : de fortes demandes sur les problèmes financiers liés aux factures de chauffage, au paiement de loyers, à l’équilibre budgétaire dans son ensemble. Selon le DRH de Phone Régie, Emmanuel Gautret, les offres des partenaires 1 % logement ne suffisant pas toujours à couvrir toutes les demandes des salariés, l’entreprise a mis en place un système maison d’aide financière au logement. Le premier type d’aide a trait à l’attribution d’une avance sur salaire (sans intérêt) que le salarié rembourse par mensualités sur douze mois maximum. Le deuxième volet permet à l’entreprise de se porter caution solidaire auprès du bailleur pour les salariés qui ne peuvent pas avoir recours à leur famille ou à leur entourage. Seuls les salariés ayant au moins un an d’ancienneté peuvent en bénéficier.

Autre service développé en Grande-Bretagne : la société Squirrel a expérimenté avec neuf entreprises un outil de gestion de budget (lire l’encadré p. 21).

Existe-t-il une limite aux interventions des employeurs pour soulager leurs salariés de leurs soucis quotidiens ? « Le problème est qu’il ne faut pas en arriver à ce que, in fine, l’entreprise donne les moyens au salarié de se surengager dans le travail », alerte Damien Richard, enseignant chercheur à l’Inseec Business School. En outre – les salariés eux-mêmes le disent –, leur premier sujet de préoccupation concerne les questions d’organisation du travail. Selon le baromètre de l’OPE, les mesures les plus demandées pour respecter les temps de vie tournent autour de la souplesse ponctuelle des horaires de travail, d’horaires et de charge de travail raisonnables, de la mise en place du télétravail. Econocom, à l’instar d’autres entreprises, a d’ailleurs commencé par là avant de déployer un programme plus vaste d’amélioration de la qualité de vie au travail (lire ci-dessous).

V. L.

Chorum Facilit’, un service d’accompagnement social pour l’économie sociale et solidaire

En avril 2015, Chorum, la mutuelle dédiée aux acteurs de l’économie sociale et solidaire, a annoncé le lancement d’un guichet unique de l’accompagnement social, Chorum Facilit’, via un site Internet et un suivi téléphonique. L’objectif ? Informer et orienter les salariés de ce secteur pour leur simplifier la vie, tant sur des sujets de vie familiale, de santé, de vie professionnelle que de logement. Catherine Sergent, directrice de la MJC de La Celle-Saint-Cloud (37 salariés, 10 ETP) se réjouit de l’initiative : « Une petite structure comme la nôtre ne peut pas développer de services RH annexes pour accompagner les salariés dans les situations difficiles qu’ils rencontrent. Et chacun est indispensable à la bonne organisation de l’entreprise. Chorum Facilit’ est un vrai outil de management pour nous. J’y ai eu recours en octobre 2014 pour une de mes salariées qui avait perdu son fils. » La salariée a été notamment conseillée sur les dispositifs d’aide sociale.

Auteur

  • Virginie Leblanc