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Les clés

AU SECOURS, la génération Z débarque !

Les clés | publié le : 23.06.2015 | Marie-Madeleine Sève

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AU SECOURS, la génération Z débarque !

Crédit photo Marie-Madeleine Sève

relations interpersonnelles. Ces “gamins” âgés d’à peine 20 ans ont le numérique codé dans leur ADN. Pragmatiques, impatients et résilients, ils vivent sur un rythme trépidant. Pour les gérer, leurs managers vont devoir se placer à côté d’eux et non au-dessus. Et répondre à leurs exigences de proximité humaine.

« Mes stagiaires réclament d’être “challengés” en permanence, sinon ils s’ennuient ; alors je leur confie des tâches annexes en plus de leur mission : selon leurs envies, des micro-analyses de marché ou des manipulations informatiques, explique Marie Bonvallet, responsable du département marketplace chez Spartoo, société d’e-commerce dans la mode (Grenoble, 200 salariés). Ils ont soif de variété, de voir et d’apprendre plein de choses. » C’est bien l’une des caractéristiques de la génération Z que relève cette manager de 38 ans, qui accueille sept étudiants d’école de commerce, en stage ou en année de césure, pour l’aider à développer des partenariats.

connectée, créative et communicante

Après les Y, arrivent aux portes de l’entreprise les Z, nés dans le milieu des années 1990 et dont les plus âgés ont aujourd’hui 20-22 ans. Appelés aussi génération C, pour connectée, créative, communicante, collaborative, ces juniors biberonnés aux technologies digitales et aux réseaux sociaux (alors que les Y ont vécu la révolution numérique), vont bousculer en profondeur les modes de management, prédisent les experts. « Ce sont les managers qui vont devoir s’adapter à eux et non l’inverse, observe Benoît Meyronin, fondateur de la chaire digital natives Orange-GEM (lire ci-contre). Ils seront poussés à s’alléger du reporting qui leur mange 70 % du temps pour revenir à une gestion physique de leurs équi pes. » Un constat corroboré par l’enquête de BNP-Paribas/The Boson Project (“La Grande invaZion”) réalisée fin 2014 auprès de 3 200 étudiants et lycéens français âgés de 15 à 20 ans. Elle souligne le poids que cette génération accorde à la capacité du manager à faire confiance à ses troupes (67 %) et à écouter (62 %). « Selon eux, le bon patron doit être accessible, responsabilisant et entreprenant ; il ne tirera sa légitimité ni de son autorité (seulement 22 %) ni de ses diplômes (3 %). Définitivement, le respect n’est plus fonction du nombre de barrettes sur l’épaule ou des années d’ancienneté, précise Marianne Urmès, chez The Boson Project. Il est l’heure de repenser le leadership et de le fonder sur davantage d’humanité. »

réactivité managériale

L’une des clés de cette mutation qui s’annonce est l’organisation des connaissances. Car la vérité ne sort plus seulement de la bouche de celui qui sait, les e-jeunes vont tout de suite vérifier les propos sur les wikis et forums sur le Web. « C’est cet aspect qui les démarque des Y, souligne André Perret, directeur du pôle formation et conseil de DPM & Associés et coauteur de Travailler avec les nouvelles générations Y et Z*. Baignant dans des informations qui prolifèrent sur la Toile, les Z ont conscience qu’ils ne pourront pas tout savoir. Dès lors, stocker dans leur tête des données brutes leur paraît inutile, sans intérêt. Refusant l’intellectualisation des savoirs, ils ont besoin, à côté de la théorie, de mises en situation pour apprendre. » D’où la remise en question par les entreprises de leurs méthodes de formation. La RATP, par exemple, repense ses modules destinés aux apprentis et aux contrats de professionnalisation pour y intégrer plus de séquences pratiques en atelier et de diversité. Toutefois, les “Z” respectent l’autorité du manager-coach ou du tuteur. Ils acceptent la notion de chef le temps d’être accompagnés. L’instant d’après, c’est fini.

Dans ce droit fil, ces jeunes, dits aussi “émos” tant ils sont à fleur de peau, ont une attitude de consommateurs ultra-avertis, au point de considérer le travail comme un rayon de supermarché plutôt que comme un tout mêlant le piquant et le fastidieux. Ils vont faire de leur poste non pas une fiche de fonction bien délimitée mais « une playlist dans laquelle piocher les meilleurs morceaux » notait sur son blog en 2010 le consultant RH-innovation Benjamin Chaminade. Et puis, ils aiment que ça aille vite. Du coup, l’unité de temps et de lieu – la norme en entreprise – ne leur convient pas. « Il va falloir dépoussiérer les règlements intérieurs, analyse André Perret. À Gameloft, fabricant de jeux vidéos pour mobiles, l’horaire officiel démarre à 8 h 30, mais de fait il n’y a personne avant 10 heures. En revanche, il y a du monde à minuit. Et ça ne gêne pas les jeunes ! » Par ailleurs, la réactivité managériale est très attendue.

revenir aux fondamentaux

« Pour ma part, je provoque des feedbacks rapides sur la production des juniors, explique Marie Bonvallet, de Spartoo. En plus des points tous les quinze jours, je vais les voir dans la journée pour les féliciter d’un mail bien tourné ou d’un contrat bien engagé. Ca fonctionne ! » Une excellente façon d’encadrer sans imposer tout en misant sur le management par objectifs qui est focalisé sur les résultats. Le mieux, face aux “Z”, conseille André Perret, consiste à revenir aux fondamentaux du management : exemplarité (ils ne passent rien), assertivité et empathie (ils sont désinhibés et susceptibles), équité (ils comparent tout) et congruence (ils pointent les contradictions). À bon entendeur…

* Ed. Studyrama, 2012.

LES CONSEILS DU COACH

BENOÎT MEYRONIN

Fondateur en 2012 de la chaire Digital Natives-Orange au sein de Grenoble École de Management*

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Rester pédagogue et parler vrai

Le manager doit conquérir sa légitimité, qui n’est jamais acquise aux yeux des “Z”. Il fera donc preuve d’une forte exemplarité, sera direct dans son discours tout en se montrant convaincant. Si l’un ou l’autre patine, il abordera illico le sujet avec naturel : « Je t’ai observé, voilà ce qui est positif, voilà l’axe de progrès. Raconte-moi… ». Le but est d’obtenir en douceur un OK sur la méthode à adopter. Par ailleurs, si le n + 1 peut faire des concessions (tenue, casque sur les oreilles en open space), pas question qu’il transige sur les règles intangibles – sécurité, confidentialité des projets, sens du client – avec, toujours, de solides arguments.

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Leur laisser un espace créatif

L’innovation participative – facilitée par le digital – va favoriser leur créativité, ce qui les poussera à s’impliquer dans l’équipe tout en leur donnant l’impression que beaucoup vient d’eux. Le manager a intérêt à leur demander ensuite de décliner leurs idées foisonnantes en actions opérationnelles, car ce sont eux qui les mettront en œuvre. Les “e-jeunes” sont dans la culture de l’astuce, de la débrouillardise, il s’agit de les canaliser avec exigence.

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Jouer le coopératif

Inutile de diviser pour mieux régner ! Les “Z” sont tout à la fois individualistes et collectifs. En connexion perpétuelle avec leurs communautés, ils savent coopérer sans perdre leur personnalité. Ils sont à l’aise dans la transversalité, l’horizontalité, l’échange entre pairs et amis. Ils partagent en ligne l’information utile au-dedans et au-dehors afin de dénicher les solutions ad hoc. Autant ne pas proscrire l’utilisation des réseaux sociaux au bureau, ce serait peine et… bénéfices perdus !

* Il est aussi directeur recherche et développement de la société de conseil en marketing des services-clients “Académie du Service”.

Auteur

  • Marie-Madeleine Sève