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L’INTERVIEW : JÉRÔME BONIZEC DIRECTEUR GÉNÉRAL D’ADÉIS

L’enquête | L’INTERVIEW | publié le : 09.06.2015 | V.L.

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L’INTERVIEW : JÉRÔME BONIZEC DIRECTEUR GÉNÉRAL D’ADÉIS

Crédit photo V.L.

« Le rôle des assureurs va évoluer pour prévenir la réalisation des risques »

Pensez-vous que le décret relatif au haut degré de solidarité dans le cadre des régimes de branches avec recommandations va favoriser le développement de mesures de prévention auprès des entreprises des branches professionnelles couvertes par un accord ?

Avant ce décret, seules quelques branches avaient réfléchi à la question d’une prévention spécifique portée par le régime de protection sociale de la profession, par exemple en raison d’une dérive des arrêts de travail. Selon moi, ce texte est structurant car il solvabilise les mesures de prévention en instaurant ce minimum de 2 % des cotisations du régime. Dans 80 % à 85 % des appels à concurrence actuels, nous observons d’ailleurs que les branches prévoient ce type d’actions ou questionnent les assureurs sur le champ des possibles.

Mise à part la prévention, le texte évoque aussi les sujets de l’action sociale et de la prise en charge, totale ou partielle, de la cotisation pour certaines populations de salariés. Comment travaillez-vous sur ces trois volets ?

Nous avons identifié avec nos membres* trois types de cibles pour construire une offre de services adaptée aux régimes conventionnels : la branche, pour accompagner les partenaires sociaux dans l’identification des risques professionnels spécifiques et dans la gestion et le pilotage du fonds social dédié. Nous avons notamment lancé un baromètre “Santé au travail” avec le cabinet Technologia, dont les premiers résultats ont été publiés en novembre dernier. Deuxième cible : les entreprises. Elles peuvent être accompagnées par exemple sur la prévention des risques psychosociaux et les risques physiques. Mais attention, l’enveloppe de 2 % ne pourra financer qu’une partie des actions qui relèveraient de la responsabilité directe de l’employeur en matière de prévention et de gestion des risques professionnels. À titre d’exemple, on peut imaginer des actions d’accompagnement poussées par la branche sur la mise en œuvre du document unique des risques et la déclinaison d’un plan d’actions.

Et votre troisième cible ?

Ce sont les salariés. On peut prévoir par exemple des prestations du type « aide aux aidants ». Un salarié sur cinq est concerné et donc affecté dans sa vie professionnelle par ce sujet préoccupant et sensible d’un point de vue humain. On peut aussi aider les salariés à s’inscrire dans des démarches de prévention des addictions, de dépistage de certaines maladies, d’incitation au sport, leur donner des conseils sur le sommeil et la nutrition… Tous ces sujets relèvent de la sphère privée. Certains organismes assureurs imaginent aussi, moyennant des engagements du salarié, de pouvoir impacter le coût des surcomplémentaires individuelles. Il y a une réflexion en cours dans le secteur de l’assurance sur le lien entre comportement vertueux et coûts des garanties, afin de motiver les salariés qui y trouveraient un « retour sur investissement », même si, juridiquement et du point de vue éthique, des questions importantes sont posées afin d’éviter toute dérive d’un tel modèle. Ces formules pourraient notamment être en lien avec le développement des objets connectés. D’autres imaginent aussi de subventionner l’abonnement à un club de sport : on est alors à la limite des œuvres sociales… On le voit bien, une question importante doit être posée au préalable : quelles actions peuvent relever du domaine collectif encadré par un accord de branche, sans tomber dans la sphère des contrats individuels ?

Justement, comment déterminer une limite d’intervention ?

Au-delà de mon dernier propos, il ne s’agit pas de limite d’intervention mais plutôt d’évolution. Le rôle des assureurs tend vers un modèle où, non seulement ils couvriront les risques, mais aussi dans lequel ils déploieront des mesures de prévention et d’accompagnement pour éviter qu’ils se réalisent. Le métier d’assureur collectif intègre alors une dimension “Risk Management Social”. Nos membres sont en train d’industrialiser et de structurer leurs offres de services et de prévention tout en visant une adaptation profession par profession, métier par métier. À moyen terme, cela devrait valoriser les régimes de branches qui auront su, avec le concours d’Adéis, instaurer une véritable politique de prévention adaptée et pilotée par les partenaires sociaux.

* Les institutions membres d’Adéis : Apicil Prévoyance, Ciprev, Ipsec et Humanis Prévoyance.

Auteur

  • V.L.