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Sur le terrain

Réorganisation : RENAULT TRUCKS FLEXIBILISE le temps de travail

Sur le terrain | Pratiques | publié le : 28.04.2015 | Laurent Poillot

Présenté en CCE extraordinaire en décembre 2014, le projet unilatéral de réorganisation du temps de travail vient d’entrer en application. Il donne à l’entreprise davantage de souplesse dans l’organisation de l’activité.

Depuis le 1er avril 2015, Renault Trucks SAS est la seule grande entreprise de la métallurgie à ne pas avoir d’accord sur les horaires de travail pour ses 9000 salariés. La direction souhaitait adapter aux évolutions issues de la jurisprudence le dispositif issu de son accord ARTT de 1999 et s’assurer une plus gran ? de flexibilité en cas de variation de l’activité. C’est désormais un projet unilatéral qui est entré en vigueur, qu’Olivier Barde, le directeur des relations sociales, définit comme « un patchwork de mesures issues des modifications successives de la loi sur l’aménagement du temps de travail et de la convention de l’UIMM ».

Des périodes plutôt que des cycles

Les modifications touchent surtout la population industrielle. Renault Trucks abandonne la référence aux cycles de production pour parler de périodes – d’une durée de trois semaines, comme précédemment. « Ce changement de dénomination nous autorise à décaler, en cas de besoin, un jour de repos (on ne parle plus de JRTT) à l’intérieur d’une période de quatre semaines. Nous ne pouvions pas le faire dans le cadre des cycles de production, qui obligent à déterminer ce jour de manière fixe », indique-t-il.

Autre changement : l’entreprise supprime la référence à la « réserve collective » alimentée par le système de modulation. Elle s’adapte à la jurisprudence, qui a déterminé que les réserves devaient être relevées tous les ans et que leur solde ne pouvait pas être négatif. Autrement dit, que les salariés ne pouvaient pas avoir de dettes de temps de travail envers l’employeur d’une année sur l’autre. Renault en avait fait les frais devant les tribunaux. Renault Trucks aussi, alors que ses cycles industriels sont pluriannuels.

À la place, l’employeur crée un compte épargne-temps collectif, qui sera alimenté à hauteur de deux jours maximum par an et plafonné à quatre jours. « Nous l’utiliserons à l’occasion des fermetures d’usine en semaine 52 », précise Olivier Barde. Ce compte est distinct du CET individuel, limité à 50 jours. Dans les surcroîts d’activité, la direction aura le choix de payer toutes les heures supplémentaires ou bien d’en verser une partie (jusqu’à 50 %) dans ce compte, qui ne pourra jamais être en négatif.

Dans les périodes de pic ou de baisse d’activité, l’employeur pourra faire varier le temps de travail de plus ou moins 45 minutes, en annonçant cette modulation avec un délai de prévenance de sept jours. Il était de dix jours auparavant.

Des forfaits mensualisés

S’agissant des managers d’unités industrielles de production et des techniciens, leur forfait en heures n’est plus annualisé mais mensualisé. Leur contrat prévoit à présent un dépassement forfaitaire de 11 heures et 26 minutes par mois, que ces heures soient effectuées ou pas. Ils perdent, selon les syndicats, une marge de manœuvre pour organiser leurs temps de récupération.

« Nous avons retrouvé une véritable assise juridique et davantage de flexibilité pour répondre aux besoins de l’entreprise, commente Olivier Barde. Ce dispositif va aussi dans le sens des attentes des salariés qui, durant les pics d’activité, préfèrent être payés en plus. »

Les syndicats font une autre analyse. Selon Éric Freyburger, secrétaire CFE-CGC du CCE, « la direction a obtenu moins de flexibilité qu’elle ne le souhaitait initialement en ne voulant pas négocier de compensations ». Il était question d’augmenter le temps de travail d’une demi-heure par jour, sans délai de prévenance, pour terminer une production.

Alexandre Chavet, délégué CFDT, pointe quant à lui « un recul social » pour la population tertiaire de l’entreprise, passée « d’un nombre de jours de repos déterminé de 10,5 jours par an, à un nombre de jours dépendant du calendrier, de 8 à 12 jours selon les années ».

Les syndicats regrettent surtout que deux sujets aient été laissés de côté : le travail à distance et les déplacements pour les salariés « grands voyageurs », qui se déplacent en Suède, en Chine ou en Inde. Dans les deux cas, ces temps de travail ne sont toujours pas officiellement encadrés.

Auteur

  • Laurent Poillot