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LA SEMAINE

Philippe Zawieja CHERCHEUR ASSOCIÉ AU CENTRE DE RECHERCHE SUR LES RISQUES ET LES CRISES (CRC), MINES PARIS TECH(1)

LA SEMAINE | l’interview | publié le : 07.04.2015 | Pauline Rabilloux

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Philippe Zawieja CHERCHEUR ASSOCIÉ AU CENTRE DE RECHERCHE SUR LES RISQUES ET LES CRISES (CRC), MINES PARIS TECH(1)

Crédit photo Pauline Rabilloux

« Le burn-out n’a rien d’une maladie »

Vous publiez un Que sais-je ?(2) sur le burn-out. Qu’y avait-il à dire qu’on ne sache déjà à ce sujet ?

Le discours des experts et le discours profane fortement médiatisé ne se rencontrent plus sur le burn-out. Il convenait de faire une mise au point pour éviter l’inflation d’un vocable fourre-tout, qui s’inscrit dans la tendance à la mode à dénoncer pêle-mêle les méfaits du travail, le néolibéralisme, la mondialisation, et à présenter les salariés comme des victimes de l’entreprise. Si les conditions de travail peuvent favoriser le burn-out, elles n’en sont pas seules responsables, ce qui veut dire que le burn-out n’est pas une maladie professionnelle. Primo, la symptomatologie est imprécise, peu spécifique. Secundo, ses formes, ses durées d’évolution et ses phases ne présentent pas de régularité d’une personne à l’autre. Enfin, il n’existe pas de traitement psychothérapique ou pharmaceutique du burn-out.

Pourriez-vous distinguer le burn-out de la dépression ?

Beaucoup de plaintes de burn-out relèvent, de fait, de la dépression, avec les symptômes associés à cette pathologie : ralentissement, tristesse, agressivité, insomnie, dévalorisation de soi, risque suicidaire, etc. Le burn-out est une fatigue civilisationnelle spécifique à notre époque. Elle se manifeste par un épuisement émotionnel, un comportement déshumanisé, cynique, dans la relation à autrui et à soi-même, et la perte du sentiment d’accomplissement au travail. Elle est liée à des facteurs de civilisation, dont certains sont spécifiques au travail, mais d’autres aux modes de vie des individus concernés : vie familiale, nombre d’enfants, activités extra-professionnelles, environnement amical et social, etc.

Que faire au plan de l’entreprise pour le prévenir ?

La charge de travail n’étant pas l’unique cause d’un burn-out, c’est l’organisation du travail dans son ensemble qui doit parfois être remise en cause. L’entreprise doit être attentive à ce que le sens du travail ne se perde pas dans des activités administratives ou de reporting, qui, pour le salarié, ne font pas partie de sa mission. Par ailleurs, les organisations matricielles tendent à soumettre le salarié à des demandes contradictoires perturbantes quand une hiérarchie verticale simple est rassurante. L’open space est source de fatigue et de malaise, lui donnant le sentiment d’être en permanence sous contrôle. L’évaluation, enfin, décourage souvent le salarié, car elle est perçue comme une sanction plutôt qu’une reconnaissance et un appui.

(1) Coordonnateur de la cellule recherche et du comité scientifique et éthique international, groupe Orpea.

(2) Le burn-out, Philippe Zawieja, Que sais-je ? PUF, 128 pages, 9 euros.

Auteur

  • Pauline Rabilloux