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Chronique

DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Chronique | publié le : 31.03.2015 | DENIS MONNEUSE

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DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Crédit photo DENIS MONNEUSE

LE POIDS DE LA TAILLE, LE CHOC DE L’IMAGE

Le célèbre slogan de Paris Match, « Le poids des mots, le choc des photos », pourrait se décliner sous la forme « Le poids de la taille, le choc de l’image » appliqué aux cabinets de chasseurs de têtes, si l’on en croit les travaux de Moni ka Hamori, professeur de ressources humaines à l’IE Business School, l’école de commerce de Madrid(1).

Cette chercheuse s’est demandé qui est “chassé” en priorité par les cabinets de recrutement. À partir de 2 000 cas étudiés, elle conclut que sont particulièrement recherchés les cadres travaillant dans une grande entreprise qui a une bonne réputation et qui est en bonne santé financière. Autrement dit, les recruteurs sollicitent plutôt un directeur marketing chez L’Oréal qu’un directeur marketing dans une PME industrielle au bord de la faillite.

Cet effet de taille et d’image n’est guère surprenant. Par suite, les salariés les plus recherchés sont ceux dont l’employeur est classé par le magazine Fortune comme une des entreprises américaines ou internationales les plus admirées (Apple, Google, Amazon, Starbucks, Walt Disney…).

Deuxième élément fort qui ressort de l’enquête : il n’y a rien de mieux qu’un gros titre ronflant pour être contacté par un chasseur de têtes. Car les cabinets de recrutement y sont plus attentifs qu’au travail réellement accompli par le salarié contacté ! Le titre inscrit sur sa carte de visite ne sert donc pas qu’à “se faire mousser” : il a aussi une véritable utilité.

Ce qui est encore plus étonnant, c’est que les salariés présents dans le classement des entreprises où il fait bon travailler ne sont guère recherchés : ils ne représentent que 6 % des personnes contactées par les chasseurs de tête, soit 5,5 fois moins que ceux des entreprises les plus admirées(2) ! Autrement dit, mieux vaut être admiré qu’exemplaire !

Comment expliquer cet écart Il est possible que les cabinets de recrutement anticipent que ces salariés sont plus heureux que la moyenne et qu’ainsi, peu d’entre eux seront candidats au départ. Il peut aussi s’agir d’une sorte de complexe d’infériorité de la part de leurs entreprises clientes : celles-ci anticiperaient le choc négatif ressenti par un nouvel employé provenant d’une entreprise où il fait bon travailler. Surpris par de moins bonnes conditions de travail que celles connues précédemment, il pourrait être tenté de donner sa démission illico !

On note par conséquent en creux que les chasseurs de têtes n’envisagent pas que les cadres qu’ils tentent d’attirer puissent eux-mêmes être à l’origine du bon climat social de leur entreprise, ni qu’ils pourraient être désireux de reproduire le modèle qu’ils ont connu dans une nouvelle entreprise

Bref, il n’est pas toujours facile de se revendre ailleurs quand on vient d’une entreprise où prime la qualité de vie au travail. Conclusion : paradoxalement, il n’y a pas que des avantages à œuvrer là où il fait bon travailler !

1) Voir notamment : Monika Hamori, Who Gets Headhunted – and Who Gets Ahead ?, Academy of Management, vol. 24, n° 4, 2010.

2) Peter Cappelli et Monika Hamori, Understanding Executive Job Search, Organization Science, vol. 25, n° 5, 2014.

Auteur

  • DENIS MONNEUSE