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Sur le terrain

RETOUR SUR… Le home office 4 jours sur 5 chez BCD Travel

Sur le terrain | Pratiques | publié le : 24.03.2015 | Catherine Sanson-Stern

Depuis décembre 2014, la moitié des salariés parisiens de BCD Travel, groupe international spécialisé dans le voyage d’affaires, travaillent en home office quatre jours sur cinq. L’expérience satisfait les collaborateurs et l’entreprise, qui a pu réduire son loyer et gagner en flexibilité.

Habitant Sevran (93), Zoja Marjanovic, agent de voyages chez BCD Travel et mère de deux enfants de 4 et 7 ans, explique qu’il lui faut théoriquement 45 minutes pour aller travailler dans le centre de Paris. « Mais ma ligne de RER est tellement catastrophique que je ne savais jamais combien de temps le trajet allait durer. C’était devenu si invivable que j’ai pensé à démissionner. » Alors, quand son employeur a demandé aux 57 salariés opérationnels (agents de voyages) de son site parisien s’ils étaient intéressés par le télétravail, la jeune femme a répondu « oui » avec enthousiasme. Comme sa collègue Stéphanie Miagat, qui subit depuis quinze ans trois heures de transport par jour entre son domicile de Melun (77) et son bureau.

Pour BCD Travel France, l’enjeu était de profiter d’un déménagement pour réduire les frais de loyer, tout en restant dans le centre de Paris. « Depuis le début, nous avions des cadres et des commerciaux qui travaillaient à domicile car intervenant à l’international, avec des équipes sur plusieurs pays, raconte Jean-François Lahitte, le directeur des ressources humaines. Aux États-Unis, 30 % des 2 000 salariés de notre groupe fonctionnent en home office. Ce n’était pas encore possible pour nos agents de voyages qui utilisent des terminaux, mais le changement de notre système téléphonique et l’installation de notre nouveau plateau opérationnel nous en ont donné l’opportunité. »

Lors du premier sondage réalisé en 2013, 50 % des opérationnels du site parisien s’étaient dits intéressés par les quatre jours de home office hebdomadaires proposés par la direction. Mi-2014, une deuxième enquête a permis de confirmer 23 candidatures de salariés disposant d’un espace dédié à leur domicile et ayant reçu l’accord de leur manager. Des femmes à 100 %, bien qu’elles ne représentent que 78 % des opérationnels. « Nous n’avons exclu que trois profils, trop juniors et pas assez autonomes, précise Laurent Tebbi, responsable adjoint des opérations. Ceux qui ont refusé le home office l’ont fait par manque de place ou par envie de continuer à voir du monde – c’est le cas de 100 % des hommes. »

Questions pratiques

Le CE et le CHSCT ont donné leur accord, en pointant l’importance du volontariat et d’un matériel adapté. Aucun accord d’entreprise n’a été négocié, chaque salarié signant individuellement un avenant à son contrat de travail. « Nous avons aussi insisté pour expliquer aux gens le risque d’isolement et la nécessité de venir au moins une journée au bureau », témoigne Édith Louvet, agent de réservation élue au CHSCT, non syndiquée. Plusieurs réunions ont été organisées pour répondre aux questions pratiques des futurs télétravailleurs. De leur côté, les managers ont reçu en novembre deux jours de formation sur le management à distance, complétés par un module sur le management d’équipe à l’international.

72 salariés sur 154

Zoja Marjanovic, qui assure les remplacements au sein des quatre équipes opérationnelles, a testé le matériel et les différentes configurations à partir de novembre, suivie en décembre par l’ensemble des télétravailleuses, après l’installation des lignes sécurisées à haut débit. Coût par poste (installation, licence, ordinateur équipé d’un double écran et boîtier téléphonique): 400 à 600 euros, plus 100 euros mensuels de frais versés à chaque télétravailleur. 49 autres salariés (développeurs d’outils technologiques, chargés de projet…) sont passés en même temps au télétravail, mais sans que ce choix ne nécessite d’installation spécifique. Au total, il y a donc 72 télétravailleurs sur 154 salariés du site parisien.

L’économie de loyer permise par la réduction des locaux de 1 750 m2 à 1 250 m2 lors du déménagement de décembre 2014, notamment grâce à la mise en place du télétravail et à la rationalisation des espaces, est de 16 %.

À l’issue de la période d’essai de deux mois, personne n’a souhaité revenir au bureau à plein temps (mais cela sera toujours possible, moyennant un délai de prévenance). « Pour l’instant, je ne vois que des gens heureux de travailler chez eux, affirme Laurent Tebbi. Les entretiens réalisés fin janvier montrent que tout le monde est content d’avoir moins de transport, plus de temps libre, moins de bruit, mais aussi de revenir une fois par semaine et d’appartenir quand même à l’équipe. »

Stéphanie Miagat se réjouit d’avoir gagné en qualité de vie et en sérénité. Travailler seule à la maison ne lui pèse-t-il pas « C’est reposant, au contraire. On est plus concentré et on peut prendre plus de mails et d’appels, affirme-t-elle. Le négatif est qu’on a moins de discussions avec les collègues, mais on utilise le chat. » Ce qui permet de correspondre à tout moment individuellement ou en groupe. La journée hebdomadaire au bureau offre la possibilité de retrouver les collègues physiquement (sauf ceux qui sont en télétravail et viennent un jour différent).

souplesse accrue

La productivité s’est améliorée et les équipes ont gagné en souplesse : alors que les plannings sont organisés sur plusieurs horaires avec une prise de poste entre 8 h et 10 h et une fin entre 17 h et 20 h, les télétravailleuses peuvent remplacer au pied levé une collègue coincée dans les transports. Le DRH s’attend à une réduction du taux d’arrêts maladie (4,5 % en 2014).

À l’issue d’une année d’expérimentation, le home office pourrait être proposé aux opérationnels des autres bureaux français, à Lille et Montpellier. La possibilité n’a pas encore été ouverte aux managers (alors que deux salariés s’étaient portés candidats), mais cela pourrait venir. Les autres filiales européennes regardent l’expérience avec intérêt. « En Europe, nous sommes le premier pays à développer le home office aussi fortement, se félicite Jean-François Lahitte. Le Benelux, les pays nordiques et l’Allemagne pourraient suivre. Un groupe de travail avec une personne des RH se penche dessus en s’appuyant sur notre exemple. »

Auteur

  • Catherine Sanson-Stern