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L’INTERVIEW : LAURENT VILBOEUF DIRECTEUR RÉGIONAL DES ENTREPRISES, DE LA CONCURRENCE, DE LA CONSOMMATION, DU TRAVAIL ET DE L’EMPLOI (DIRECCTE) D’ILE-DE-FRANCE

L’enquête | L’INTERVIEW | publié le : 24.03.2015 | É. S.

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L’INTERVIEW : LAURENT VILBOEUF DIRECTEUR RÉGIONAL DES ENTREPRISES, DE LA CONCURRENCE, DE LA CONSOMMATION, DU TRAVAIL ET DE L’EMPLOI (DIRECCTE) D’ILE-DE-FRANCE

Crédit photo É. S.

« Il s’agit de tout mettre en œuvre pour favoriser le reclassement effectif des salariés les plus fragiles »

Quel bilan tirez-vous de l’application de la réforme des procédures de PSE sur l’activité de la Direccte Île-de-France ?

Depuis la loi de sécurisation de l’emploi, 40 % des procédures menées au niveau national ont été suivies en Île-de-France. Nous avons rendu 400 décisions, dont plus de 95 % ont été motivées et rendues dans les délais prévus par la loi, soit 15 jours pour une validation d’accord collectif ou 21 jours pour une homologation de plan unilatéral. En outre, 60 % des PSE prennent la forme d’un accord majoritaire validé, si l’on excepte les cas d’entreprises en redressement ou liquidation judiciaires (35 % des dossiers). Enfin, seules 32 décisions ont fait l’objet d’un contentieux devant le juge administratif ; 26 ont été confirmées.

On peut donc dire que plusieurs des défis posés par la loi de sécurisation de l’emploi ont été relevés : le contentieux est très limité – il ne concerne que 8 % des cas –, l’accord collectif majoritaire est privilégié, et l’Administration est en capacité de rendre des décisions explicites, grâce à une intervention en amont de la procédure, et à un large savoir-faire déjà acquis dans l’analyse des PSE, puisque nous pouvions déjà dresser, par exemple, des constats de carence.

Un autre enjeu est de s’assurer de la cohérence des décisions rendues, au sein de la Direccte et avec les autres régions. Comment garantir cette homogénéité ?

Dès lors que les dossiers sont suivis de manière décentralisée, par les services mutations économiques de nos 8 unités territoriales (UT), il faut en effet pouvoir donner de la lisibilité sur la doctrine administrative, et traiter toutes les entreprises de manière équivalente, même si chaque cas est particulier et doit être apprécié in concreto. Pour cela, nous disposions déjà d’une organisation en réseau que nous avons renforcée : les interventions des UT sont suivies et mises en cohérence au niveau régional de la Direccte qui pilote le réseau, assure une fonction de coordination, d’animation, d’appui et de veille juridique. Ce fonctionnement en réseau existe également au niveau national, sous l’égide de la DGEFP (Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle). Nous échangeons régulièrement pour forger des positions communes, partager des éléments de doctrine, de méthodologie, de pratique. Par ailleurs, le contenu des formations est revisité régulièrement, pour tenir compte de la jurisprudence, proposer des outils modélisés (motivation type…), et le ministère met à disposition des fiches d’information auxquelles peuvent se référer les agents.

Sur quels éléments vous fondez-vous pour évaluer si le PSE est proportionnel aux moyens du groupe ou de l’entreprise ?

Cette évaluation, réalisée dans le seul cadre des demandes d’homologation et nécessairement empirique, ne vise pas à mener un simple contrôle de proportionnalité, mais avant tout à permettre la meilleure adéquation possible entre les mesures d’accompagnement et les caractéristiques socioprofessionnelles des personnes. Pour cela, dès les premiers échanges, nous examinons d’une part les documents comptables remis aux représentants du personnel et les analyses des experts, afin d’identifier précisément le périmètre du groupe à retenir et de repérer ses capacités de financement, d’autre part, les diagnostics sociaux et les budgets alloués aux mesures d’accompagnement. De cette manière, nous orientons les discussions sur la nécessaire augmentation de certains budgets, ou sur la possibilité de prévoir de nouvelles mesures permettant de répondre à certaines problématiques. Il ne s’agit en aucun cas de valider des chèques de départ, mais de tout mettre en œuvre pour favoriser le reclassement effectif des salariés, en particulier, les plus fragiles. Nous pouvons demander, notamment, aux entreprises de prévoir la mutualisation des budgets, de renforcer le rôle des comités de sélection pour les dossiers de création d’entreprise, d’être exigeantes et d’associer les représentants du personnel dans l’élaboration du cahier des charges applicable aux cabinets de reclassement… Il est fréquent que l’on arrive à améliorer sensiblement les mesures d’accompagnement contenues dans les documents unilatéraux. Et si la négociation aboutit, il n’est pas rare de retrouver, intégrées dans les accords, des suggestions formulées dans nos lettres d’observations.

De quelle façon l’Administration prend-elle en compte la question de la santé des salariés dans ce processus ?

Elle est garante du respect des procédures, et notamment, le cas échéant, de l’information consultation du CHSCT. Outre la présentation détaillée du projet et de ses conséquences sur les conditions de travail des salariés, il s’agit aussi de vérifier l’existence d’une évaluation des risques et d’un plan d’action précis quant à leur prévention. En outre, la question des risques psychosociaux se pose également s’agissant des salariés potentiellement concernés par un licenciement, et nous pouvons être amenés à demander à l’employeur de mettre en place des dispositifs d’accompagnement spécifiques, comme des cellules d’écoute.

Auteur

  • É. S.