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Sur le terrain

RETOUR SUR… Les embauches en contrat d’avenir chez Sitel

Sur le terrain | Pratiques | publié le : 03.03.2015 | Mélanie Mermoz

En octobre 2013, 15 jeunes ont été recrutés en emploi d’avenir par la société Sitel sur son site de Troyes. Une expérimentation réussie, qui a nécessité un investissement important en termes d’encadrement.

« Notre entreprise est soucieuse de son implication sociétale. Quand les emplois d’avenir ont été lancés, nous avons souhaité nous inscrire dans ce dispositif et voir comment il pouvait fonctionner chez nous », relate Alexandra Bierry, responsable RH des sites de Troyes et de Montrouge chez Sitel. Sur les 15 jeunes accueillis en emploi d’avenir, 11 sont allés au bout de leur contrat dans le centre d’appels de Troyes : 8 ont décroché leur diplôme, un certificat de qualification professionnelle (CQP) relation clients. Trois ont même prolongé leur contrat d’un an, deux autres ont signé avec Sitel des CDD (de six mois et trois mois). Les trois derniers ont préféré entamer une nouvelle formation (commercial, secrétaire médical). « À un an, le ratio est le même que pour nos autres recrutements », poursuit-elle.

Sans le bac

Le pari était audacieux. Dans ce centre d’appels entrants, qui compte 570 salariés, dont 223 CDD, et propose une assistance technique informatique, les embauches s’effectuent au minimum au niveau bac et fréquemment bac + 2. Or le public cible des emplois d’avenir est sans diplôme. Le recrutement a été effectué par l’intermédiaire de Pôle emploi et de la mission locale de Troyes ; 45 candidats ont été reçus par le centre d’appels. « Sitel a joué le jeu du dispositif : nous n’avons pas eu besoin de demander de dérogations, car aucun candidat retenu par la société n’avait le bac, certains avaient un CAP ou un BEP, d’autres seulement le brevet des collèges », souligne Patrice Franchi, directeur de la mission locale de Troyes.

L’intégration de ces jeunes recrues, réparties en trois groupes de cinq, a été particulièrement accompagnée. Comme tous les nouveaux embauchés, ils ont d’abord suivi une formation théorique interne d’un mois, avant, pendant une semaine, de bénéficier d’un “cocon” (un manager pour six salariés au lieu de quinze habituellement) pour commencer à prendre des appels. Tout au long de leur emploi, ils ont été suivis par un tuteur. Chaque semaine, ils ont pu échanger avec ce professionnel sur les difficultés rencontrées. Celui-ci a été formé au management et travaille dans une autre équipe. Tous les deux mois, un point d’étape réunissait la RRH, le manager et le jeune.

L’implication des chefs d’équipe a été déterminante. Vilayvanh Traymany a ainsi supervisé cinq jeunes : « Certains étaient très stressés et avaient du mal à gérer les appels de professionnels énervés. N’ayant pas les compétences techniques, ils devaient en plus faire face à l’agressivité des personnes en ligne. Ils étaient parfois en pleurs », se souvient-elle.

Échanges hebdomadaires

Toutes les semaines, les jeunes sortaient une demi-journée de la production pour échanger sur la relation client : « Individuellement, nous débriefions un appel. Lors de cercle qualité, après autorisation du jeune, nous nous livrions en groupe au même exercice. Au début, c’était très difficile pour eux de supporter les remarques des autres. »

Confrontés au manque d’assiduité et aux retards, les chefs d’équipe ont aussi appris à faire preuve de pédagogie : « Pour nombre d’entre eux, c’était la première expérience professionnelle. Certains oubliaient de prévenir quand ils ne venaient pas ou d’envoyer leur arrêt maladie. Autant de comportements qui, pour des salariés ordinaires, donnent lieu à des sanctions… », continue Vilayvanh Traymany.

Des problèmes d’assiduité

Le manque d’assiduité a constitué le problème majeur, particulièrement après le début de la formation à l’Afpa. Pour des raisons de calendrier propre à l’organisme, elle n’a débuté qu’après quatre mois. Les jeunes ont alors alterné trois semaines en entreprise et une semaine en cours. C’est pendant ces semaines de cours que les absences ont été les plus fréquentes. « Certains ne voyaient pas l’intérêt de l’enseignement de l’Afpa. Ils avaient l’impression de perdre du temps à revoir en cours des choses qu’ils avaient déjà apprises sur le terrain », explique Alexandra Bierry. Une intervention conjointe a été réalisée par le directeur de la mission locale, un représentant de l’Afpa et elle : « Nous leur avons rappelé que la formation faisait partie intégrante du contrat, et également insisté sur la chance de pouvoir obtenir un diplôme de niveau bac. »

Six mois après la fin de l’expérience, la responsable des RH estime que le bilan est « très positif » au regard du parcours réussi de la plupart des jeunes. Mais elle ne sous-estime pas non plus les difficultés : « Accompagner correctement ces emplois d’avenir nécessite un véritable investissement en temps, et une bonne préparation des managers. » Elle convient que c’est un point à améliorer et, si elle n’envisage pas de relancer une telle opération de recrutement en 2015, elle ne l’écarte pas pour 2016.

Les chiffres clés de l’opération

Les emplois d’avenir prévoient un accompagnement renforcé et l’accès à une formation qualifiante. Chez Sitel, c’est l’Agefos-PME qui a financé pour chaque emploi d’avenir les 2 000 euros facturés par l’Afpa pour 225 heures de formation.

Les jeunes qui signent ce contrat sont embauchés pendant un an à temps plein au salaire minimum de référence de l’entreprise, soit, chez Sitel, 1 540 euros de salaire net, bonus compris. L’entreprise reçoit, elle, une subvention d’État (512 euros par mois) pour un total de 3 000 euros mensuels (salaires et cotisations sociales).

Auteur

  • Mélanie Mermoz