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LA SEMAINE

De nouvelles règles POUR LES ENTREPRISES

LA SEMAINE | publié le : 24.02.2015 | Emmanuel Franck, Nicolas Lagrange, Hélène Truffaut

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De nouvelles règles POUR LES ENTREPRISES

Crédit photo Emmanuel Franck, Nicolas Lagrange, Hélène Truffaut

Le projet de loi Macron, imposé sans vote à l’Assemblée par l’article 49.3, avant d’être examiné par les sénateurs, comprend de nombreuses dispositions relatives aux relations du travail. Travail dominical, licenciements, épargne salariale, prud’hommes…Voici les principales mesures qui devraient concerner les entreprises et les DRH.

Extension du travail dominical

Le projet de loi prévoit de donner aux maires la possibilité d’autoriser 12 ouvertures dominicales par an pour les commerces de détail non alimentaires, contre 5 aujourd’hui. Si le doublement du salaire reste la règle, le texte impose désormais le volontariat du salarié, lequel devra être formalisé et sera réversible. Un principe applicable aussi, dorénavant, au travail dominical dans les zones touristiques.

Dans les zones touristiques existantes (plus de 600), où le travail du dimanche est généralisé, une majoration de salaire devra être négociée, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. En outre, des zones touristiques internationales (ZTI) permettant d’ouvrir tous les dimanches pourront être créées par décret, sans passer par les maires : à Paris notamment, sur le boulevard Haussmann ou avenue Montaigne (les Champs-Élysées sont déjà concernés), ainsi qu’à Nice, Cannes, Deauville et dans les gares de la capitale et de plusieurs grandes villes. L’ouverture de ces ZTI nécessitera un accord collectif, moyennant, là encore, une majoration de salaire, mais aussi une prise en charge des frais liés aux trajets et à la garde des enfants. Dans ces ZTI, les magasins pourront rester ouverts jusqu’à minuit, les heures entre 21 h 00 et 24 h 00 devant être payées double.

Par ailleurs, les 41 Puce (périmètres d’usage de consommation exceptionnelle) de Paris, Aix-Marseille et Lille, créés par la loi Maillé de 2009, deviendraient des “zones commerciales”. Le nouveau dispositif, plus large, permettrait d’intégrer Lyon et plusieurs zones frontalières. Un accord devra obligatoirement fixer la majoration de salaire. Les entreprises qui pratiquent aujourd’hui le doublement de la rémunération en l’absence d’accord collectif pourront continuer au maximum durant deux ans après la promulgation de la loi et devront ensuite négocier un accord.

Des PSE moins contraignants pour les employeurs

Dans sa version adoptée par les députés le 19 février, le projet de loi Macron prévoit qu’en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, le PSE doit être proportionné aux moyens dont dispose l’entreprise, et non plus le groupe, déconnectant ainsi le PSE d’une entreprise de la santé économique du groupe et facilitant l’homologation par la Direccte. En outre, pour tout PSE, l’entreprise ne sera plus tenue d’envoyer par courrier à chaque salarié concerné les offres d’emploi disponibles dans les autres entités du groupe ; elle devra simplement mettre à disposition la liste de ces offres. En matière de reclassement, le texte supprime aussi l’obligation formelle pour les entreprises de proposer aux salariés concernés un poste à l’étranger (même beaucoup moins bien rémunéré), le salarié pouvant toutefois demander la liste des emplois disponibles hors de France.

Autre changement important : la loi Macron établit qu’en l’absence d’accord collectif, les critères d’ordre des licenciements devront être appréciés à l’échelle de la zone d’emploi et non plus au niveau de l’entreprise. Enfin, la peine d’emprisonnement est supprimée en cas de délit d’entrave avéré, tout comme le contrôle a priori de la Direccte (issu de la LSE de juin 2013) lorsqu’une entreprise de plus de 50 salariés procède à moins de dix licenciements économiques sur une période de 30 jours.

Un barème pour les indemnités de licenciement

Le projet de loi instaure un référentiel pour fixer le montant de l’indemnité susceptible d’être allouée au salarié en cas licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’utilisation de ce référentiel sera laissée à l’appréciation du juge. Sans préjudice des indemnités légales, l’indemnité est fonction notamment de l’ancienneté, de l’âge et de la situation du demandeur par rapport à l’emploi.

L’épargne salariale et l’actionnariat salarié encouragés

C’est dans le titre II “Investir” du projet de loi (articles 34 à 40) que sont insérées les dispositions concernant l’épargne salariale et l’actionnariat salarié. Concernant ce dernier point, le texte vise à renforcer l’attractivité des attributions gratuites d’actions (AGA). Le taux de la contribution patronale baisserait de 30 % à 20 % (elle serait calculée et exigible au moment de l’acquisition et non plus au moment de l’attribution), les PME n’ayant jamais versé de dividendes en seraient pour partie exonérées. Pour les bénéficiaires, la fiscalité des gains d’acquisition, soumis jusqu’alors à l’impôt sur le revenu selon les règles applicables aux traitements et salaires, serait alignée sur celles des plus-values mobilières, avec une possibilité d’abattement de 50 % si les actions sont conservées au moins deux ans. La contribution salariale de 10 % serait supprimée, le gain étant désormais soumis aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine (comme la plus-value de cession). Des mesures qui suscitent quelques polémiques : « Certains ont, sur le sujet, des positions dogmatiques, considère Jean-Baptiste Allanic, avocat associé au cabinet Fromont Briens. Ils voient, dans ces mesures, un cadeau fiscal et social fait aux top managers et aux entreprises du CAC 40. Or les AGA ne leur sont pas exclusivement réservées. Et il s’agit avant tout d’un outil de fidélisation des salariés. Beaucoup d’entreprises attendent d’ailleurs la publication de la loi pour relancer un plan d’AGA. »

Le texte simplifie aussi les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE), afin que les start-up puissent en attribuer sur leurs titres aux salariés de leur filiale et que les entreprises issues de la fusion de deux start-up puissent continuer à les utiliser.

En ce qui concerne l’épargne salariale, « on tend à harmoniser les dispositifs d’intéressement et de participation », constate Jean-Baptiste Allanic. Il est ainsi prévu une date limite unique pour le versement des primes d’intéressement et de participation, à savoir le premier jour du 6e mois suivant la clôture de l’exercice, ainsi que le même taux d’intérêts de retard. En outre, en l’absence de choix du salarié, une partie de la prime d’intéressement pourrait être affectée par défaut au plan d’épargne entreprise (PEE), tout comme 50 % de la participation est déjà fléchée par défaut vers le Perco.

Pour favoriser le développement de l’épargne salariale dans les PME, le forfait social appliqué au premier accord de participation ou d’intéressement conclu au sein d’entreprises de moins de 50 salariés serait abaissé à 8 % pendant six ans, « même si le seuil des 50 salariés est franchi durant cette période », précise Jean-Baptiste Allanic. Il est également prévu un forfait social à 16 % pour les Perco prévoyant une gestion pilotée par défaut investie sur un fonds comportant au moins 7 % de titre éligibles au PEA-PME. Par ailleurs, la contribution spécifique de 8,2 % sur l’abondement au Perco excédant 2 300 euros serait supprimée. Et l’employeur pourrait effectuer des versements périodiques dans le Perco, indépendamment des versements des bénéficiaires, sous réserve d’une attribution uniforme à l’ensemble des salariés (même régime fiscal et social que l’abondement d’amorçage).

En l’absence de CET, les salariés pourraient désormais verser, dans le Perco, jusqu’à 10 jours de repos non pris (au lieu de 5 actuellement), « sans que soit précisé ce qu’est un “jour de repos non pris” », ajoute Jean-Baptiste Allanic. Enfin, le projet améliore la représentation des salariés dans les conseils de surveillance des FPCE, qui passerait de la moitié aux deux tiers des membres.

Les prud’hommes réformés

L’article 83 du projet de loi pour la croissance s’attaque aux délais de traitement des dossiers prud’homaux : presque 20 mois en 2014, quatre mois de plus qu’en 2013. Afin de les réduire, le texte encourage le passage en bureau de jugement restreint (deux juges) et devant le juge départiteur (juge professionnel). Le bureau de conciliation (“et d’orientation”, selon la nouvelle dénomination) reste le point d’entrée. Il est chargé de constituer le dossier (rassemblement des pièces, motivation…). Ensuite, il oriente les parties soit vers le bureau de jugement dans sa composition restreinte – qui doit alors statuer en trois mois –, soit vers le juge départiteur, soit, « à défaut », vers la formation de jugement classique (4 conseillers). Les parties ont le choix de la voie qu’elles veulent emprunter.

Nouveauté importante qui nécessite la vigilance des entreprises : en cas de non-comparution d’une des parties, et sauf motif légitime, le bureau de conciliation peut juger l’affaire. « Après qu’une des parties aura envoyé les pièces du dossier à l’autre partie, et pour peu que cette dernière ne donne pas de motif légitime à sa non-comparution, il pourra y avoir un jugement sur le fond », explique Yves Tallendier, avocat chez Capstan à Marseille.

Un statut du défenseur syndical

Le défenseur syndical, qui assiste le salarié devant les conseils de prud’hommes et les cours d’appel, bénéficierait de la protection contre le licenciement et de la rémunération des heures de délégation (actuellement : dix heures d’absence autorisées).

Auteur

  • Emmanuel Franck, Nicolas Lagrange, Hélène Truffaut