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DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Chronique | publié le : 11.11.2014 | DENIS MONNEUSE

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DU CÔTÉ DE LA RECHERCHE

Crédit photo DENIS MONNEUSE

Pourquoi financer un char à la Gay Pride est rentable

« Ce n’est pas marqué sur le front des salariés s’ils sont homos ou hétéros ! », s’était exclamé le DRH d’un groupe industriel, il y a quelques années, face à des collaborateurs demandant à leur employeur de financer leur char à la Gay Pride. Il affirmait en creux qu’il ne pouvait y avoir de discrimination suivant l’orientation sexuelle dans l’entreprise, puisque personne ne savait qui était homosexuel ou hétérosexuel ! Ce DRH avait à la fois tort et raison.

Il avait tout d’abord tort sur les discriminations au travail dont sont victimes les gays et les lesbiennes. Par rapport à la moyenne, ils sont plus stigmatisés, moins bien rémunérés, plus victimes de harcèlement moral et plus vulnérables au licenciement.

Notre DRH avait en revanche raison sur leur invisibilité relative : autant, pour reprendre quelques autres facteurs de discrimination, il est difficile de cacher que l’on est une femme noire obèse âgée de plus de 50 ans, autant il est possible de dissimuler sa gay attitude.

Cette dissimulation a cependant un coût. Il faut renoncer à poser la photo de son conjoint sur son bureau, éviter les conversations à la machine à café sur la vie privée, feindre l’indifférence devant des comportements homophobes, réfréner toute attirance pour un collègue du même sexe, se méfier de coups de fil personnels qui pourraient vous trahir, trouver des excuses pour ne pas venir accompagné lors de la fête de Noël de l’entreprise, etc. C’est pourquoi les homosexuels cachés ont un niveau de stress supérieur à la moyenne.

Cette dissimulation a aussi un impact sur les choix de carrière. C’est ce que montre David Kaplan, chercheur à l’université Saint Louis aux États-Unis. Pour rester cachés, les homosexuels développent des relations interpersonnelles plus faibles avec leurs collègues ; ils préfèrent développer leur réseau social hors du travail. De plus, si leur entreprise ne lutte pas contre l’homophobie, leur niveau de confiance est limité.

Ils ont alors tendance à peu s’impliquer pour se tenir prêts à changer d’employeur si leur orientation sexuelle venait à être découverte. Leur productivité est aussi affaiblie par l’énergie dépensée pour se cacher, voire feindre leur hétérosexualité.

Les homosexuels qui ont fait leur coming out, eux, adoptent une posture opposée. La mobilité externe aurait un coût psychique important puisqu’ils devraient à nouveau révéler leur orientation sexuelle et risquer les sarcasmes. Quand ils ont trouvé une entreprise au sein de laquelle ils ne se sentent pas discriminés, ils restent alors fidèles à celle-ci, s’impliquent et présentent une satisfaction au travail élevée.

La conclusion est double. D’une part, l’orientation sexuelle, qu’elle soit masquée ou non, joue sur l’orientation professionnelle. D’autre part, les employeurs gay friendly limitent le turnover et accroissent l’implication au travail de leurs salariés homosexuels.

Par conséquent, financer un char à la Gay Pride est sans doute l’un des investissements les plus rentables que puisse faire un DRH !

Quand les homosexuels ont trouvé une entreprise au sein de laquelle ils ne se sentent pas discriminés, ils restent alors fidèles à celle-ci, s’impliquent et présentent une satisfaction au travail élevée.

Auteur

  • DENIS MONNEUSE