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Aidants salariés : UN NOUVEL ENJEU DE LA QUALITÉ DE VIE AU TRAVAIL

ZOOM | publié le : 21.10.2014 | Virginie Leblanc

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Aidants salariés : UN NOUVEL ENJEU DE LA QUALITÉ DE VIE AU TRAVAIL

Crédit photo Virginie Leblanc

Le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, actuellement en examen au Parlement, veut faciliter la vie des aidants familiaux. Parmi eux, 4 millions sont salariés, et les entreprises commencent à s’en préoccuper, selon l’Observatoire de la responsabilité sociétale des entreprises, qui publie un guide sur leurs pratiques.

Quelques mois après l’entrée en vigueur de la loi du 9 mai 2014 permettant le don de jours de repos à un parent d’un enfant gravement malade, le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, en discussion au Parlement, compte parmi ses objectifs l’aide à la conciliation entre vie professionnelle et rôle d’aidant. Il prévoit notamment une négociation entre partenaires sociaux pour assouplir le congé de soutien familial, et affiche le souhait de « faciliter l’aménagement du temps de travail en recensant les bonnes pratiques et en faisant la promotion des organisations les plus adaptées à la conciliation des vies ».

Quatre millions d’actifs

Près de la moitié des aidants sont aujourd’hui des salariés, soit 4 millions de personnes, en proie à des risques de stress et de gestion compliquée de leurs absences. Dans le dernier baromètre sur les préoccupations de vie quotidienne des Français, réalisé par l’institut BVA pour Domplus, paru le 14 octobre, 46 % des actifs interrogés citent comme causes de perturbation dans leur travail leurs difficultés de santé ou celles de leur proches, proportion qui s’élève à 71 % si l’on intègre la prise en charge d’un proche dépendant.

« En 2014, on assiste à une période clé, où les plus de 60 ans vont devenir proportionnellement plus nombreux que les moins de vingt ans, souligne Serge Guérin(1), sociologue. En outre, nous observons que, dans de plus en plus d’entreprises, l’absentéisme est lié au fait que le salarié doit prendre soin d’une personne âgée, et non plus d’un enfant. Que les entreprises le veuillent ou non, la question les touche. »

Marc Benoit, DGRH de Danone(1), l’a vite compris : « Année après année, ce sujet était de plus en plus présent dans notre baromètre sur le stress, affirme-t-il, on ne pouvait pas ne pas s’y intéresser. Ce sujet s’est révélé tellement important pour nous que nous avons décidé d’être client et actionnaire fondateur de la plate-forme Responsage. » Un service multimédia d’information et de conseil pour les salariés aidants de proches âgés en perte d’autonomie, déployé auprès des 700 salariés du siège de Danone en juin 2013, et en cours de déploiement auprès d’autres entités en 2014 : « 15 % de nos salariés sont potentiellement concernés, mais seulement un quart de cette cible a eu recours au service, ce qui nous incite à communiquer encore plus ! », ajoute Marc Benoit.

Et « l’entreprise a un rôle d’information à jouer », considère Lydie Recorbet(2), chargée de projets RH à l’Orse (Observatoire de la responsabilité sociétale des entreprises), qui a publié le 6 octobre avec l’Unaf un guide à destination des entreprises, à l’occasion de la Journée nationale des aidants (lire Entreprise & Carrières n° 1209) : « Un certain nombre de salariés aidants connaissent mal leurs droits, les trois types de congés – présence parentale, solidarité familiale et soutien familial – et les avantages propres que peut proposer leur entreprise. » Par exemple, les solutions offertes par des organismes de prévoyance et les compléments de congés.

Sensibilisation

Au groupe Macif, les 9 500 salariés disposent d’un service d’accompagnement social visant la conciliation vie privée-vie professionnelle, qui peut prendre en charge la recherche de dispositifs financiers et administratifs, avec sept collaborateurs rattachés à la DRH groupe. Dans le prolongement de ses actions de mécénat, Crédit Agricole Assurances, également client de Responsage, a déployé de multiples outils d’information à destination de ses salariés. « Il est difficile d’en parler dans l’entreprise, c’est pourquoi nous organisons aussi des sessions de sensibilisation sur le sujet », indique Brigitte Cachon(1), directrice communication corporate et RSE de Crédit Agricole Assurances.

Récemment, La Poste a expérimenté des formations pour les aidants familiaux. Quelques dizaines de salariés ont participé, à raison de quatre demi-journées destinées à les soutenir dans leur vie d’aidants, à leur délivrer des informations sur leurs droits et des conseils. « C’est un succès, et les personnes concernées ont évalué très favorablement la formation, commente Gérard Bellengier(2), directeur de la stratégie sociale et de la qualité de vie au travail à La Poste. Les aidants ont pu échanger entre eux et sortir de l’isolement. Nous travaillons avec eux pour identifier ce que nous pourrions faire de plus. »

Autre levier d’action à côté de l’information et de la formation, l’aménagement des horaires de l’aidant. Cela peut se traduire par le temps partiel ou par un aménagement ponctuel d’horaires au quotidien, où le rôle du manager est essentiel. La Poste essaie de le faire, « mais ce n’est pas toujours facile dans les services au contact des clients », souligne Gérard Bellengier.

Accords d’entreprise

François Fatoux, délégué général de l’Orse, a recensé 21 accords sur les dons de congés, dont certains formalisés avant la loi, et de nombreuses entreprises ont inscrit des dispositions dans divers accords, sur le handicap, le télétravail ou la qualité de vie au travail. À PSA Peugeot Citröen, l’accord autorisant le don de jours de repos à un collègue dont l’enfant est gravement malade est entré en vigueur le 1er octobre. Il a été signé par l’ensemble des organisations syndicales le 27 juin dernier. Plusieurs salariés se sont déjà manifestés pour réaliser des dons de journées.

« L’accord répondait à une demande des salariés relayée par les syndicats. Nous avons accepté d’ouvrir une négociation pour organiser la gestion du dispositif », relate Orianne Vidonne, responsable RH chargée du dialogue social du groupe(2). Avec des règles de fonctionnement définies : tous les salariés peuvent donner cinq jours par an maximum, sans condition d’ancienneté, mais seulement certains jours de repos – RTT, congés liés à l’ancienneté et réserves individuelles –, les jours issus de dispositifs collectifs comme les congés payés devant être préservés afin de garantir le repos des salariés. Le bénéficiaire, sous couvert de la délivrance d’un certificat médical, pourra obtenir jusqu’à 20 jours. Mais attention, prévient Orianne Vidonne, « le don de jours de congés n’a pas vocation à être un dispositif unique pour traiter du sujet, il s’inscrit dans notre politique RSE ».

Pierre-Yves Chanu, conseiller confédéral de la CGT, souligne également que, si son syndicat a signé des accords dans ce domaine en entreprise, « ce dispositif de solidarité ne doit pas exonérer l’entreprise de sa responsabilité sur ce sujet, qui est une dimension à part entière de la RSE ».

Propos recueillis le 3 octobre, à l’occasion d’une conférence de presse organisée par Responsage.

Propos recueillis le 6 octobre, à l’occasion d’un débat organisé par l’Orse.

Auteur

  • Virginie Leblanc