Se défendant de faire partie de ces nouveaux pères qu’il considère comme des asexués béats, l’auteur a pourtant saisi l’occasion d’un revirement professionnel, coïncidant avec la réalisation par sa femme de son “executive potential”, pour expérimenter une de ces permutations de rôle dont la vie détient le secret: surdiplômé, cadre en entreprise, il a décidé de se consacrer pendant un an à la tâche ardue de “gérer” un foyer et trois enfants. Le regard d’un homme sur ce qui fait d’ordinaire le quotidien des femmes n’est pas seulement amusant, il est instructif. Si les femmes au foyer ne créent pas de valeur au sens économique du terme et sont classées dans la catégorie des inactifs d’un point de vue statistique, les compétences qu’elles mettent en œuvre sont très proches de celles d’un manager : planning, contrôle, négociation, création de lien, motivation… Leur temps est fragmenté et doit donc être géré avec beaucoup de rigueur. Dans un monde où règne le culte de la performance et de l’efficience, leur travail pourrait largement servir de modèle au monde professionnel.

Selon l’auteur, la maison est le lieu où l’organisation est la plus rigoureuse, où la division du travail est la plus précise et où toutes les méthodes de management modernes auraient pu être inventées. Le management pourrait utilement se ressourcer à son sens originel de “ménagement”, science du ménage. Dans le même temps, les recruteurs auraient tout intérêt à moins se préoccuper de la capacité des cadres à réciter des lieux communs qu’à leur attention aux conditions et à la qualité de la collaboration au travail qui est, en somme, l’objectif numéro 1 du parent au foyer.

Une année au foyer

Nathanaël Dupré La Tour, Le Félin, 144 pages, 10 euros.