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Enquête

LES SALARIÉS SE MOBILISENT COLLECTIVEMENT

Enquête | publié le : 17.06.2014 | NICOLAS LAGRANGE

Nouvel emploi, formation longue, création d’entreprise… 87 % des 517 salariés de Texas Instruments ont une solution de reclassement un an après leur licenciement. Un résultat obtenu grâce à leur forte implication collective.

Un bilan inespéré : douze mois après l’envoi des lettres de licenciement, 13 % seulement des salariés du centre de R & D de Texas Instruments (TI) France, à Villeneuve-Loubet (06), sont en recherche d’emploi.

Le 18 décembre 2012, lorsque TI annonce 517 suppressions de postes, soit la quasi-totalité de l’effectif, c’est un choc pour les salariés et pour la technopole de Sophia Antipolis où l’entreprise est implantée. Mais plusieurs dispositifs atypiques se mettent en place rapidement, à commencer par une dispense d’activité, avant même la négociation du PSE. Plusieurs dizaines de salariés disposant d’une promesse d’embauche partent ainsi travailler dans une autre entreprise, tout en conservant le bénéfice des futures mesures d’accompagnement social (lire Entreprise & Carrières du 19 février 2013).

Simultanément, pour faciliter le reclassement des salariés, quelques managers locaux créent le boost program. « Notre groupe de travail, coordonné par le responsable du site et qui associait les représentants syndicaux FO et CFDT, a bénéficié de la bienveillance et du soutien logistique de la direction générale », raconte Alain Château, ingénieur en systèmes intégrés. La petite équipe épluche les effectifs très qualifiés de la R & D (les trois quarts du personnel) et regroupe les salariés par domaine d’activité. « Nous avons demandé à chacun d’établir un mini-CV pour disposer d’un journal des compétences et composer ainsi des équipes virtuelles. Environ 95 % des salariés nous ont suivis, expose Alain Château. Nous avons ensuite mobilisé nos réseaux pour contacter les entreprises intéressées, déjà présentes sur le bassin ou tentées par une implantation. »

Rencontres avec les entreprises

Plusieurs sociétés se rendent sur le site de Villeneuve-Loubet pour présenter leurs besoins et découvrir les équipes de TI. Certains salariés vont en Chine pour solliciter les dirigeants de Huawei (télécoms), d’autres démarchent le Coréen Samsung. Parallèlement, alors que le PSE est toujours en négociation, une dizai­ne de consultants d’Altedia, mandatés par la direction, arrivent fin janvier à Villeneuve-Loubet pour accompagner les salariés. Le cabinet délivre 33 informations collectives en trois mois, anime 245 ateliers et conduit 2 300 entretiens individuels. Les mesures sociales négociées vont aussi faciliter les transitions. « Nous avons notamment obtenu, en cas de nouvel emploi moins rémunéré, le versement d’un différentiel salarial pendant deux ans pouvant atteindre 1 000 euros par mois », souligne le représentant FO. Contactée, la direction n’a pas souhaité nous répondre.

Une mission réussie

Autres clés du succès : l’implication de la Direccte et la nomination, en mai 2013, par la préfecture et la communauté d’agglomération de Sophia Antipolis, d’un chargé de mission permanent. Alain Château est détaché à ce poste pendant un an. Il poursuit les actions du boost program, informe les nombreux acteurs du dossier et coordonne les différentes initiatives. Aujourd’hui, 87 % des salariés ont une solution de reclassement : un contrat de travail (66 %), une formation longue (5 %), une création d’entreprise (9 %)…

Parmi les nouveaux salariés, le tiers ont été embauchés par de nouvelles entreprises, comme Huawei, Samsung (lequel a repris 71 personnes pour s’implanter à Sophia Antipolis) ou NXP et Freescale, qui ont bénéficié d’une partie de l’enveloppe de 3 millions d’euros versée par TI pour la revitalisation. Un bilan provisoire, puisque la feuille de route d’Altedia est de reclasser tous les salariés.

Deux bémols toutefois, selon un délégué syndical : « Il faudra attendre pour dresser le bilan des formations longues et des créations d’entreprise. Par ailleurs, nous n’avons aucune information sur le sort des salariés de la sous-traitance, pour lesquels aucun engagement n’avait été pris. » Le reclassement n’en est pas moins une réussite, avec la conviction, pour Alain Château comme pour les représentants du personnel, que l’implication collective des salariés de TI est tout à fait transposable à d’autres entreprises.

TEXAS INSTRUMENTS

• Activité : fabricant de semi-conducteurs.

• Effectifs : 600 en France début 2013, moins de 100 après le PSE.

• Chiffre d’affaires monde : 12,2 milliards de dollars.

Auteur

  • NICOLAS LAGRANGE