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Le directeur QVT, un nouveau à la DRH

Pratiques | publié le : 11.03.2014 | DOMITILLE ARRIVET

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Le directeur QVT, un nouveau à la DRH

Crédit photo DOMITILLE ARRIVET

Portée sur le devant de la scène sociale, la qualité de vie au travail (QVT) a fait naître des batteries d’outils destinés à en soutenir la cause. Pour accompagner leur déploiement apparaissent des fonctions de responsable ou directeur QVT. Un métier aux contours différents selon les organisations.

« Nous avons toujours eu le souci d’intervenir sur les différentes dimensions de la qualité de vie au travail, notamment pour la sécurité des équipages. La création de la fonction que j’occupe en découle naturellement », explique Alain Benlezar, responsable corporate qualité de vie au travail du groupe Air France.

En effet, la compagnie aérienne a créé ce poste de référent en 2009, à la suite d’une série de chartes mises en places à partir de 2003 sur le harcèlement moral et sexuel, les violences et les incivilités, ou encore les pratiques addictives, telles que les consommations d’alcool et de drogues. « Ce poste nous a donné une identification, elle a structuré notre démarche », explique celui dont la mission principale est de coordonner un réseau pluridisciplinaire QVT, qui se déploie à l’identique dans toutes les escales et mobilise une centaine de personnes: un collectif de responsables des ressources humaines, de médecins du travail, de préventeurs, de membres du CHSCT, d’assistantes sociales et aussi de managers, tous dévolus à l’échelle de leur structure à l’amélioration du bien-être des salariés.

Pour mener à bien cette mission, la DGRH du groupe, qui chapeaute le responsable QVT, a choisi un expert en relations sociales. Aujourd’hui, outre l’animation du réseau, Alain Benlezar est aussi chargé de la coordination du baromètre sur l’évaluation du stress au travail et du déploiement de formations à la QVT. En 2013, il a ainsi sensibilisé 3 000 collaborateurs aux risques liés à l’alcool, aux incivilités en milieu professionnel, à la prévention des conduites suicidaires ou au management de la qualité de vie au travail. Enfin, le référent est aussi en première ligne dans la négociation des accords d’entreprise, dont celui intitulé “Gagner en performance par la QVT”, qui devrait voir le jour en avril.

Un champ plus large que la seule pénibilité

Plus récente, la création du poste de responsable QVT à la SNCF date de janvier 2011. Elle n’en est pas moins le fruit d’un cheminement qui remonte à 2009. « Notre politique de qualité de vie au travail découle de l’Observatoire paritaire sur la pénibilité que nous avons créé en 2009 avec les partenaires sociaux et nos services de santé. Très vite, nous avons constaté que le champ était plus large que la seule pénibilité. Nous nous sommes alors intéressés au travail, à l’environnement de travail, à la relation au travail. Cela nous a conduit à créer un pôle QVT au sein de la DRH », explique Pierre Delanoue, le responsable qui chapeaute un service de trois personnes. Sa mission au quotidien ? « Porter la politique de QVT, animer l’acculturation du management sur le sujet, négocier avec les partenaires sociaux et animer l’observatoire paritaire », détaille-t-il.

Comme son alter ego d’Air France, il ne détient pas de budget “à distribuer” mais mène une action qui, par capillarité, doit aboutir à un changement d’état d’esprit : « Notre rôle n’est pas d’être isolés dans notre bulle ni d’imposer un reporting irritant, sinon les salariés auront vite fait de croire que la QVT est encore “quelque chose en plus inventé par la DRH”. Il s’agit au contraire de veiller à ce que toute la politique RH soit tournée vers la valorisation du capital humain, en lien avec la politique du logement, l’égalité professionnelle, l’aménagement des lieux de travail… », détaille le responsable. Un cheminement qui prend du temps. « Si notre conception de la qualité du travail et de la vie au travail était naturellement portée par tous, mon poste n’aurait alors plus de sens. Mais on en a encore pour un moment. Et puis, la vigilance est de mise: il suffit d’une réorganisation pour que cette conception soit remise en cause », relève-t-il.

Bien-être physique, psychique et social

Dans d’autres grands groupes français dont le souci affiché pour la qualité de vie au travail n’est pas moins avancé, les appellations de ces fonctions de gardien du bien-être des salariés diffèrent. Ainsi, à Danone, le sujet est porté par Bruno Vercken, un ingénieur venu aux ressources humaines par la sécurité au travail. Son poste de directeur sécurité, conditions de travail et employabilité est pourtant tourné, comme chez ses confrères, vers la QVT. Rattaché au DRH groupe, son périmètre n’inclut ni les relations sociales, ni la RSE, attribuées à deux autres collaborateurs. « Depuis que mon poste a été créé il y a trois ans, je m’occupe de l’homme au travail, dans ses trois dimensions : bien-être physique, bien-être psychique et bien-être social. Chez Danone, nous constatons nous-mêmes que la question du mal-être au travail va au-delà de la simple sécurité. Par exemple, 40 % des accidents du travail sont dus à des troubles musculo-squelettiques, qui résultent à la fois de facteurs physiques et de facteurs psychologiques », détaille le professionnel, dont le rôle est aussi l’animation transverse en relation avec les médecins du travail, les services qualité et environnement, les RH et les responsables sécurité.

À Orange, à la dénomination de responsable QVT « nous avons préféré le titre de chargé du nouveau contrat social, plus en phase avec notre plan stratégique », souligne Alain André, dont les attributions sont également la santé, la sécurité et la qualité de vie au travail. Cet ancien manager opérationnel a pris ce poste créé en 2010 à la suite des crises internes, qui avaient alors conduit l’opérateur à investir en deux ans 10 millions d’euros dans l’amélioration des conditions de travail (rénovation de locaux, création d’espaces de convivialité…) et 50 millions à l’amélioration des systèmes d’information pour le confort des salariés. Aujourd’hui, le professionnel épluche tous les six mois les résultats du baromètre social, qui prend le pouls des collaborateurs. Sur cette base, il donne l’impulsion de nouvelles actions, en lien avec ses interlocuteurs RH, santé, ergonomes… « Nous étendons maintenant notre action à l’international », confie-t-il.

Une vocation commerciale

Configuration différente encore chez Malakoff Médéric qui, dans le cadre de sa réorganisation mi-2011, a choisi de confier la QVT au directeur du développement RH et des relations sociales, dont les attributions recouvrent aussi la diversité ou le handicap. Un job “chapeau” destiné à « définir un plan d’action qui intègre l’ensemble des problématiques », explique Frédéric Meyer, titulaire de ce poste. Mais au sein de cet organisme de protection sociale, la prise en considération de la QVT a aussi une vocation commerciale. En effet, la maison, qui anime le Club des directeurs santé-qualité de vie au travail qu’elle a contribué à créer, met à profit les échanges avec ses pairs pour développer, à l’intention de ses entreprises clientes, des offres de services centrées sur la QVT, qui répondent au mieux aux risques qu’ils encourent…

L’ESSENTIEL

1 Devant les aspirations grandissantes des salariés en matière de QVT, certaines entreprises créent des postes de responsables dédiés.

2 Ces fonctions sont confiées à de très petites équipes dont le rôle est essentiellement la coordination de tous les intervenants dans ce domaine.

3 Les responsables QVT estiment que leur métier devrait à terme disparaître, quand ces notions seront devenues un réflexe dans les entreprises.

Auteur

  • DOMITILLE ARRIVET